eschatologie.free.fr

ACCUEIL    TABLE     SUIVANT

DEUXIÈME SECTION: LE DESTIN GÉNÉRAL DE L’HUMANITÉ

LA FIN DU MONDE (DEUXIÈME PARTIE)[1]

 QUESTION 30: Les signes du retour du Christ concernant l’Église

Article 1: Y aura-t-il des martyrs?

Article 2: L’évangile doit-il être prêché à toutes les nations?

Article 3: L’Église doit-elle subir un martyre vers la fin du monde?

Article 4: Peut-on savoir comment se produira ce martyre?

Article 5: L’heure de l’Église sera-t-elle annoncée par la papauté?

Article 6: Sera-t-elle annoncée par la liturgie?

Article 7: Y aura-t-il des signes dans les comportements des prêtres et des évêques?

Article 8: L’Abomination de la désolation doit-elle s’installer dans le siège Apostolique?

Article 9: Le Christ, lorsqu’il viendra, trouvera-t-il la foi sur la terre?

QUESTION 31: Les signes donnés par la Vierge Marie

Article 1: La Vierge doit-elle avoir un rôle, particulier à la fin du monde?

Article 2: La Vierge apparaîtra-t-elle aux hommes?

Article 3: Y aura-t-il des apparitions d’anges?

Article 4: Deux témoins doivent-ils venir vers la fin du monde?

QUESTION 32: L’Antéchrist

Article 1: Pourquoi Dieu permettra-il ce mal avant la venue du Christ?

Article 2: Qu’est ce que l’esprit de l’Antéchrist dont parle saint Jean?

Article 3: L’Antéchrist sera t-il un homme ou un démon fait homme?

Article 4: Qu’est-ce que le chiffre de la Bête (666) ?

Article 5: Peut-on savoir quelle sera l’idéologie de L’Antéchrist?

Article 6: Peut-on savoir quelle sera l’œuvre de l’Antéchrist?

QUESTION 33: Le signe du fils de l’Homme

Article 1: Le signe du fils de l’homme est-il le signe de la croix?

Article 2: Le signe du fils de l’homme est-il le signe de Jonas?

Article 3: La croix apparaîtra-t-elle réellement dans le ciel à la fin du monde?

Article 4: Les hommes seront-ils terrorisés par l’apparition du signe du fils de l’homme?

QUESTION 34: La fin du monde

Article 1: Dieu mettra-t-il fin au monde tel qu’il est ici-bas?

Article 2: La fin des temps se distingue-t-elle de la fin du monde?00

Article 3: Peut-on distinguer sept temps dans l’histoire de l’humanité?

Article 4: Connaît-on la date de la fin du monde?

Article 5: Peut-on dire au moins que nous sommes dans les derniers temps?

Article 6: La fin du monde consiste-t-elle dans le retour glorieux du christ?

Article 7: Tous les hommes mourront-ils?

Article 8: Cette fin sera-t-elle une destruction ou une transfiguration dans un autre monde?

QUESTION 30 : Les signes du retour du Christ concernant l’Église

 

A propos de l’Église, nous nous poserons huit questions :

Article 1: Y aura-t-il des martyrs?

Article 2: L’évangile doit-il être prêché à toutes les nations?

Article 3: L’Église doit-elle subir un martyre vers la fin du monde?

Article 4: Peut-on savoir comment se produira ce martyre?

Article 5: L’heure de l’Église sera-t-elle annoncée par la papauté?

Article 6: Sera-t-elle annoncée par la liturgie?

Article 7: Y aura-t-il des signes dans les comportements des prêtres et des évêques?

Article 8: L’Abomination de la désolation doit-elle s’installer dans le siège Apostolique?

Article 9: Le Christ, lorsqu’il viendra, trouvera-t-il la foi sur la terre?

 

Article 1 : Y aura-t-il des martyrs ?

Objection 1 : Il ne convient pas qu’il y ait des martyrs sanglants. En effet, le Seigneur a donné à ses apôtres le pouvoir de chasser les démons, d’accomplir des miracles. Ils doivent donc pouvoir se défendre, selon ce texte de l’apocalypse[1] : « Si l’on s’avisait de les malmener, un feu sortirait de leur bouche pour dévorer leurs ennemis ».

Objection 2 : Le Christ a donné par son martyr un témoignage suffisant aux nations. Il paraît donc inutile que d’autres donnent leur vie à sa suite.

 

Cependant : « Avant tout cela, on portera la main sur vous, on vous persécutera, on vous livrera aux synagogues et aux prisons, on vous traduira devant des rois et des gouverneurs à cause de mon Nom, et cela aboutira pour vous ou martyr ».[2]

 

Conclusion : Les martyrs sont pour le monde signes de sa fin prochaine puisqu’ils manifestent par le don de leur vie le peu de prix qu’ils accordent aux choses de la terre en comparaison de la gloire spirituelle qui est préparée aux hommes pour l’au-delà. C’est pourquoi il convient que chaque génération ait des martyrs. Vers la fin du monde, les martyrs seront plus nombreux à cause de la persécution du démon qui, sentant son temps compté, suscitera un homme perverti qui luttera contre les saints. C’est pourquoi les martyrs des derniers temps seront encore plus immédiatement signes de la fin du monde.

Il se peut cependant qu’ils ne soient pas tous des martyres sanglants. Les méthodes de l’Antéchrist seront plus efficaces et plus subtiles. L’apocalypse en donne une idée[3] : « Nul ne pouvait plus ni acheter ni vendre s’il n’était marqué de du signe de la Bête ». Ce martyr, s’il ne va pas jusqu’au don de la vie, peut nécessiter une plus grande force car il est donné goutte à goutte, jour après jour. L’ennemi est plus difficile à identifier et s’insinue plus dangereusement dans les pensées qu’un tyran bien repéré. S’il en est ainsi, l’Église réalisera à la fin de son histoire l’image première de son martyre : Jésus fut crucifié et Marie, reine des martyres, ne le fut que dans son âme.

 

Solution 1 : Le pouvoir donné par le Seigneur à ses apôtres et à son Église tout entière, rend invincible face aux attaques de ceux qui veulent contredire la parole de Dieu, selon le Seigneur[4] « Mettez-vous dans l’esprit que vous n’aurez pas à préparer d’avance votre défense : Car moi je vous donnerai un langage et une sagesse, à quoi nul de vos adversaires ne pour résister ni contredire ». Et le martyr sanglant lui-même parachève cette victoire. C’est pourquoi le Seigneur disait à sainte Jeanne d’Arc, pour lui annoncer son martyr : « Tu seras délivrée de tes agresseurs par grande victoire ».

Solution 2 : Par leur martyr, les saints rendent visible à travers la durée de tous les temps l’unique martyr accompli par le Christ. D’autre part, ils appliquent à leur génération d’une manière efficace les grâces obtenues par la passion du Seigneur. En ce sens, ils peuvent être nommés co-rédempteurs. C’est ce que veut exprimer saint Paul[5] : « Je complète dans ma chair par les souffrances que j’endure pour vous ce qui manque aux épreuves du Christ ». Par son efficacité, le sang des martyrs est semence de chrétiens.

 

Article 2 : L’évangile doit-il être prêché à toutes les nations ? 

Objection 1 : Il semble que l’Évangile ne sera pas prêché à toutes les nations puisque le Seigneur dit à ses apôtres[6] : « qu’ils n’achèveront pas le tour des villes d’Israël avant que ne vienne le fils de l’homme ».

Objection 2 : Le Seigneur lui-même ne semble pas vouloir que toutes les nations entendent l’annonce de l’Évangile, selon les Actes des apôtres[7] : « Le Saint Esprit les empêcha d’annoncer la Parole en Asie. Ils tentèrent d’entrer en Bithynie, mois l’Esprit de Jésus, ne le leur permis pas ».

Objection 3 : Il semble que la prédication de l’Évangile à toutes les nations ne soit pas un signe de la fin du monde. En effet, dès les temps apostoliques, cette prophétie fut réalisée selon saint Paul[8] : « l’Évangile que vous avez entendu a été prêché à toutes les créatures sous le Ciel ».

Objection 4 : La réflexion théologique a désormais donné à ce signe sa vraie dimension : on admet en effet que l’annonce du Christ intéresse chaque individu qui est appelé à s’ouvrir à lui, même si c’est seulement d’une manière implicite. Depuis toujours, le drame de l’accueil ou du refus de la Vérité est universel, et ce signe, loin d’être interprété d’une façon purement géographique, doit être conçu comme l’affirmation que tout homme, lors de la venue du Christ, sera jugé selon ses œuvres d’adhésion ou de rejet de la vérité ; il n’y a pas de possibilité de rester neutre. [9]

 

Cependant : Le Seigneur annonce[10] : « Il faut d’abord que l’Évangile soit proclamé à toutes les nations ».

 

Conclusion : Il est nécessaire que la bonne nouvelle du salut proposé par Dieu soit prêchée à toutes les créatures spirituelles. En effet, comme on l’a vu, Dieu a créé les anges et les hommes en vue de communiquer sa gloire à ceux qui l’aiment. Or nul ne peut être introduit dans la gloire s’il ne la veut et nul ne peut la vouloir comme sa fin dernière s’il n’en connaît l’existence. C’est pourquoi, tous les hommes de tous les temps, les anges eux-mêmes et, s’il existe d’autres formes de vie spirituelle, tous ces êtres reçoivent l’annonce de l’Évangile, chacun cependant selon le mode de sa nature.

C’est pourquoi les anges reçurent au jour de leur Création la prédication de l’Évangile, selon le mode qui leur est connaturel, c’est-à-dire par l’infusion dans leur âme du contenu intelligible de cette parole de Dieu.

Quant à l’homme, pour la même raison, il reçoit depuis toujours la prédication explicite de la venue du Messie de la charité pendant sa vie terrestre. Nous avons montré que cette prédication était la plupart du temps réalisée à l’heure de la mort par l’ange du Seigneur. Mais il existe bien d’autres modes, selon l’époque où il vit.

Les premiers humains reçurent la prédication de l’Évangile à travers le premier père et la première mère Adam et Ève, qui le tenaient eux-mêmes de la grâce originelle. Ceux-ci devaient transmettre l’amour du salut éternel à leurs enfants. Mais, par leur péché, ils se révoltèrent contre l’humilité de leur condition et séparèrent de l’évangile l’humanité qui devait sortir d’eux. Ainsi, le contenu de l’Évangile fût-il perdu par l’homme. Il n’en demeura plus qu’un vestige à travers la promesse du Seigneur d’une rédemption future, selon la Genèse[11] : « Ta descendance écrasera la tête du serpent ». Et, jusqu’à la venue du Christ, les hommes furent disposés à recevoir le salut par la foi en la promesse d’une rédemption future. Une telle promesse qu’ils recevaient dès cette terre ou au moment la mort ne pouvait, si elle était reçue par une âme favorablement disposée, les introduire immédiatement dans la gloire éternelle. Les morts devaient attendre dans les limbes la venue du Nouvel Adam et de la nouvelle Ève qui annuleraient la révolte des premiers parents et effacerait la dette des péchés commis par le monde entier. C’est ce qui fut accompli à l’heure de la mort du Christ. C’est pourquoi le rideau du Temple se déchira et le cœur du Christ fut ouvert, ce qui symbolise que désormais, l’entrée dans la vision béatifique qui est le Saint des saints était possible à tout homme aimant Dieu. Selon saint Pierre, durant les trois jours du sépulcre, le Christ descendit aux enfers[12] : « Il s’en alla prêcher aux esprits en prison, à ceux qui jadis avaient refusé de croire lorsque temporisait la longanimité de Dieu, aux jours où Noé construisait l’Arche ». C’est donc à cette heure que l’humanité qui avait vécu avant le Christ reçut la plénitude de la révélation. Déjà ces générations avaient été jugées et les méchants ne firent que s’obstiner dans leur perversité, recevant la confirmation de leur condamnation à l’enfer éternel. Les âmes de bonne volonté adhérèrent à la personne du Christ enfin présente devant eux. Ils furent introduits dans la vision béatifique.

Quant aux hommes qui vivent encore sur la Terre après la passion du Christ, ils continuent de recevoir tous sans exception la prédication de l’Évangile. Pour tous, la prédication est donnée par le Christ lui-même, accompagné des saints et des anges lors de son apparition au moment de la mort. Et cette prédication est par elle-même signe invisible pour nous mais réel du retour du Christ et de la fin de ce monde puisque son objet propre est d’annoncer la vie éternelle.

C’est pourquoi, on doit dire que cette prophétie de Jésus sur l’annonce de l’Évangile à toutes les nations s’est toujours réalisée. Mais, pour le signifier de manière visible, Dieu n’hésite pas à la rendre visible à travers le monde politique et médiatique. Ainsi, les douze apôtres allèrent dès les premiers temps de l’Église prêcher par toute le terre, depuis l’Inde jusqu’à l’Égypte, aidés des divers charismes divins qui rendaient leur parole efficace. Vers la fin du monde, il en sera de même. La parole du Christ sera de nouveau matériellement réalisée par une prédication visible à chacun des pays de la terre[13]. Ce signe médiatique sera donné pour les hommes et ceux qui savent lire les signes des temps comprendront sa signification apocalyptique. Cela ne veut pas dire que l’Évangile sera accepté par toutes les nations.

 

Solution 1 : Il est vrai que les apôtres envoyés par Dieu à chaque génération n’ont jamais eu le temps de faire entendre leur parole à tous les hommes sans exception. Cependant, ils ont pu annoncer l’Évangile à toutes les nations du monde connu. De cette manière, ils ont réalisé symboliquement le commandement du Seigneur leur enjoignant d’aller par toutes les nations. Ils ont donné à l’humanité un signe suffisant de l’imminence du retour du Christ.

Solution 2 : Saint Paul montre que la conduite de l’Esprit Saint sur l’humanité dépasse les pensées limitées des hommes. Ainsi, que Jésus lui-même empêche ses apôtres d’évangéliser certaines nations, ce ne peut être qu’à cause d’un bien supérieur, en rapport avec le salut éternel de toute l’humanité. C’est de cette façon que l’on doit expliquer les échecs successifs des apôtres pour évangéliser 1e Chine. Selon le Psaume[14] : « Si le Seigneur ne bâtit la maison, en vain peinent les maçons ». Selon certains, de tels échecs s’expliquent par le péché des nations à convertir ou encore par celui des apôtres. Mais de tels arguments ne suffisent pas car l’évangile est fait pour les pécheurs. On doit donc parler autrement :

1. Il convient que certaines nations restent païennes afin que le zèle de l’Église à les convertir ne s’arrête jamais et qu’elle ne soit pas tentée de s’assoupir dans son attente du retour du Sauveur.

2. Les nations païennes témoignent pour celles qui sont chrétiennes de l’état de l’homme quand il ne reçoit pas la liberté de l’Évangile.

Solution 3 : Nous avons suffisamment répondu à cette objection dans la conclusion.

Solution 4 : L’accueil implicite du Christ par la bonne volonté des actes humains réalisés au quotidien par les païens ne saurait en aucun cas être identifié au signe dont nous parlons ici. L’Écriture sainte et l’Église ont suffisamment manifesté la place de ces actes bons[15] : Ils disposent au salut, c’est-à-dire à l’accueil amoureux de la vie surnaturelle mais ils ne sont pas le salut. Jésus lui-même, face à Nicodème venu le voir[16] avec toute la volonté droite, la foi et l’espérance d’Israël lui signale qu’il ne peut entrer dans le Royaume sans renaître d’en haut. Cette naissance est réalisée par la venue du Saint Esprit dans le cœur à cœur expli­cite que permet la grâce sanctifiante. La présence d’une grâce actuelle dans tout acte bon même chez les païens est sans comparaison avec cette amitié. C’est pourquoi on doit affirmer que l’Évangile sera réellement prêché à toutes les nations, c’est-à-dire à chaque homme avant la fin. Ce signe se réalise de trois manières principales : 1° Au cours de l’histoire par les apôtres et les autres moyens de l’Église terrestre ; 2° À l’heure de la mort par le Christ glorieux ; 3° À la fin du monde pour la dernière génération face au Christ glorieux.

 

Article 3 : L’Église doit-elle subir un martyre vers la fin du monde ?[17]

Objection 1 : L’Église ne doit pas être détruite à la fin du monde. Notre Seigneur affirme en effet : « que les portes de l’enfer ne l’emporteront pas sur elle »[18].

Objection 2 : Le Seigneur dit à Pierre à propos de Jean[19] : « S’il me plaît qu’il demeure sur la terre jusqu’à ce que je vienne, que t’importe ». Or Jean symbolise les disciples que Jésus aime particulièrement à cause de la pureté de leur foi. Donc l’Église subsistera au moins dans ces disciples lors au retour du Christ.

Objection 3 : L’Église est appelée par l’apocalypse[20] « l’épouse du Christ ». Or le Christ est mort pour son épouse, afin de la rendre immaculée. Il est donc inconvenant que cette épouse subisse à son tour la mort.

Objection 4 : On a montré précédemment qu’Isaac était un symbole de l’Église. Or le sacrifice d’Isaac ne fut pas consommé jusqu’au bout. Un ange arrêta le bras sacrificateur. Il doit donc en être de même à la fin du monde pour l’Église.

 

Cependant : L’apocalypse affirme[21] : « On donna à la Bête de mener campagne contre les saints et de les vaincre » ; De même, le Seigneur regardant la beauté du Temple de Jérusalem annonce sa destruction et en fait un signe de la fin du monde. Or le véritable temple, c’était son corps qui devait être broyé sur 1e croix et ressusciter trois jours plus tard. C’est aussi l’Église qui est le corps mystique du Christ.

 

Conclusion : L’Église qui est née après la mort de Jésus sur 1e croix et le don du Saint Esprit, n’a d’autre mission que de rendre présent pour tous les lieux et tous les temps la rédemption des péchés opérée par Jésus Christ, sa parole et l’espérance de la gloire promise. Elle a donc la même mission que Jésus lui-même.

D’autre part, c’est par le même Esprit Saint qu’elle est conduite invisiblement à travers les temps pour accomplir cette fin. Ainsi, ce que fit le Christ poussé par l’Esprit, c’est ce que fera l’Église poussée par le même Esprit. Ce principe doit être constamment à l’esprit pour comprendre les évènements de la fin du monde. Les évangiles montrent que Jésus fut conduit par l’Esprit Saint durant sa vie terrestre de telle façon que sa mission ne s’arrête pas par la seule prédication mais aille jusqu’au don personnel et volontaire de sa vie sur la croix. De même, l’Église qui est le Christ continué sur la terre, après avoir prêché l’Évangile à toutes les nations, sera conduite de l’intérieur pour se préparer à un martyre sanglant, à un temps de sépulcre puis à une résurrection qui sera appliquée glorieusement à tous les hommes selon cette parole de Jésus[22] : « Si le grain tombé en terre accepte de mourir, il porte beaucoup de fruits ».

C’est ce qu’exprime le Magistère ordinaire et sûr du Catéchisme de l’Église catholique[23] : « Avant l`avènement du Christ, L’Église doit passer par une épreuve finale qui ébranlera la foi de nombreux croyants. La persécution qui accompagne son pèlerinage sur la terre dévoilera le « mystère d’iniquité » sous la forme d’une imposture religieuse apportant aux hommes une solution apparente à leurs problèmes au prix de l’apostasie de la vérité. L’imposture religieuse suprême est celle de l’Anti-Christ, c’est-à-dire celle d’un pseudo messianisme où l’homme se glorifie lui-même à la place de Dieu et de son Messie venu dans la chair. L’Église n’entrera dans la gloire du Royaume qu’à travers cette ultime Pâque où elle suivra son Seigneur dans sa mort et sa Résurrection. Le Royaume ne s’accomplira donc pas par un triomphe historique de l’Église selon un progrès ascendant mais par une victoire de Dieu sur le déchaînement ultime du mal, qui fera descendre du Ciel son Epouse. Le triomphe de Dieu sur la révolte du mal prendra la forme du jugement dernier, après l’ultime ébranlement cosmique de ce monde qui passe ».

 

Solution l : Il faut se garder d’interpréter de telles paroles de Jésus de manière extérieure et politique. Elles sont avant tout spirituelles et concernent la victoire de la vie éternelle. Il ne faut pas se tromper sur le sens réel des paroles de Dieu. Qu’on se souvienne du trouble analogue qui saisit la réflexion juive de l’Ancien Testament dans la tension d’une foi enseignant sans ambiguïté que « Dieu comble de biens les hommes droits et renvoie les riches les mains vides » et la constatation quotidienne de l’inverse. Cette dramatique expérience fut source d’une mutation spirituelle majeure depuis le livre de Job vers celui de la Sagesse, en préparation de la venue de Jésus. Au temps de leur gloire, les Juifs tuaient comme hérétiques les prophètes qui osaient annoncer, chose impossible en raison de la présence réelle de Dieu, la destruction du Temple. Il fallut plusieurs ruines et déportations d’Israël pour que certains comprennent que ce qui importait à Dieu, c’était le temple spirituel du cœur de chaque homme. Il est à remarquer que Dieu se plaît dans d’apparentes contradictions. Nous en sommes frappés à l’évocation des nombreux exemples qui jalonnent l’Écriture ou la vie des saints : Jeanne d’Arc, demandant à ses voix si elle serait sauvée s’entendit répondre : « Oui, par grande victoire! » Deux jours plus tard, elle était brûlée vive. Pour le théologien, l’opposition apparente entre foi et réalité, loin d’être une torture, constitue le lieu théologique par excellence, le lieu des découvertes. Deux vérités apparemment contradictoires, dont l’une procède de la foi (les portes de l’enfer ne l’emporteront pas sur l’Église) et l’autre de l’expérience (l’Église disparaîtra de façon visible de la surface du monde) et qui sont comparables à deux silex durs qu’on frotte : la lumière en jaillit. Quand nous voyons horreur, martyre sanglant ou échec politique, il voit victoire, règne éternel et gloire. Pour lui, la victoire réelle est celle qui se termine en Vie éternelle (donc, encore et toujours humilité et charité). Elles le seront de fait car le pape et le clergé de cette époque seront disposés à faire de leur sacerdoce et de leur vie une offrande d'amour, une dernière messe unie à la Messe éternelle de Jésus. Le Ciel entier sera ébranlé devant leur sainteté et le retour du Christ ne sera plus lointain.

Ainsi, de même que, à la croix, les portes de l’enfer n’ont pas vaincu Jésus malgré ce qui apparaissait extérieurement, mais ont au contraire été détruites par le Messie, de même, à la fin du monde, le martyr sanglant et volontaire de l’Église à travers ses saints marquera la victoire définitive et sera suivi, après un temps que Dieu connaît, par le retour du Christ et la résurrection des morts.

Solution 2 : Par une partie d’elle-même, qui sera la partie visible symbolisée par Pierre[24], l’Église imitera la passion du Christ jusque dans le sacrifice total. Cependant, par une autre partie symbolisée par Jean, l’Église imitera la compassion vécue par la Vierge Marie au pied de la croix. C’est pourquoi, vers la fin des temps, la Vierge Marie préparera elle-même une partie de l’Église en vue de la rendre capable d’assister au martyre de l’Église hiérarchique et visible sans perdre la foi ou sombrer dans le désespoir.[25]

Solution 3 : Même l’analogie de l’épouse quand elle est appliquée à l’Église peut permettre de comprendre les convenances de ce martyre annoncé par Dieu pour la fin des temps. En effet, une épouse, lorsque l’amour de son époux a pleinement pris sa vie suit son époux partout où il va. S’il est condamné a mort, elle est prête à l’assister dans son martyr et à s’unir à lui par la volonté ce qui est la compassion. Mais si elle est condamnée à mort avec son époux, elle le suit et l’imite jusque dans sa passion. C’est ainsi que, à la fin des temps, l’Église dans sa partie visible s’offrira elle-même pour le salut du monde, unie par la charité de façon unique et jamais vue au sacrifice du Messie. Ce sera la dernière Messe d’une rédemption et de la coopération de l’humanité.

Solution 4 : À la fin au monde, une partie de l’Église subira réellement le martyr sanglant et en particulier sa partie visible qui est essentiellement représentés par la hiérarchie. C’est ce qu’annonce Jésus à Pierre qui symbolise cette Église hiérarchique[26] : « Il signifiait, en parlant ainsi, par quel genre de mort Pierre devait glorifier Dieu ». Cependant, le sacrifice de l’Église ne sera pas consommé au point de faire disparaître du monde tous les chrétiens. C’est ce que le Seigneur annonce en saint Matthieu[27] : « Il y aura alors une grande tribulation, telle qu’il n’y en a pas eu depuis le commencement du monde jusqu’à ce jour, et qu’il n’y en aura jamais plus. Et si ces jours là n’avaient pas été abrégés, nul n’aurait eu la vie sauve. Mais à cause des élus, ils seront abrégés ces jours-là ».

 

Article 4 : Peut-on savoir comment se produira ce martyre ?

Objection 1 : Il semble que la passion de Jésus ne doive pas être considérée comme une allégorie préfigurant la manière dont l’Église sera conduite au martyre. En effet, le Christ est mort crucifié. Il est impossible que les chrétiens le soient à la fin du monde.

Objection 2 : Ce qui est exprimé par mode d’allégorie ne peut suffire à fonder une véritable théologie. Mais seuls les textes qui expriment au sens littéral les mystères divins peuvent faire autorité. Si l’on sort de cette règle, on risque de sombrer dans l’imaginaire. Donc on ne peut savoir comment se fera le martyre de l’Église.

Objection 3 : Dans les Actes des apôtres, le Seigneur dit[28] : « Il ne vous appartient pas de connaître les temps et les moments que le Père a fixé de sa propre autorité ». De même, ne doit-on pas dire qu’il n’appartient pas à l’homme de connaître comment se produira la fin.

Objection 4 : La destruction du Temple de Jérusalem ne peut être une allégorie de celle de l’Eglise à la fin du monde. Le Temple fut détruit car périmé. L’Église le sera comme martyre sainte, à l’image du Christ.

 

Cependant : Le Seigneur ne fait rien sans en parler d’abord à ses prophètes. En outre, il a laissé à l’Église certaines prophéties contenues dans les évangiles, les épîtres et l’apocalypse. Il est donc possible de savoir comment se fera le martyre de l’Église.

 

Conclusion : Comme on l’a dit, l’Église devra subir le martyre à la fin des temps parce qu’elle est une avec le Christ. Cependant, s’il s’agit de savoir comment se produira ce martyre, il faut reconnaître qu’on ne peut rien dire de définitif. En effet, les prophéties de l’Écriture à ce propos s’appliquent aussi à d’autres événements comme la ruine de Jérusalem et la destruction du temple. De même l’apocalypse révélée à saint Jean a une signification universellement valable à toutes les époques du monde puisqu’elle explique à la fois à la conduite de Dieu sur notre âme, sur l’humanité et sur l’Église.

Il reste cependant des textes dont la signification allégorique ne fait pas de doute par rapport à la fin de l’Église. Ils peuvent donner une certaine idée des événements qui se produiront :

1. Et le premier d’entre eux est le récit de la passion rapporté par les évangiles. Comme nous l’avons montré, l’Église est invisiblement menée dans son pèlerinage terrestre par le même Esprit que celui de Jésus. La vie de Jésus est donc l’image préfiguratrice de celle de l’Église en tant qu’elle est sainte. C’est ce que Jésus veut signifier à saint Pierre quand il lui dit : « Suis-moi », après lui avoir annoncé la manière dont il mourrait[29]. La fin de l’évangile de Jean est à cet égard, le texte allégorique le plus explicite sur le rapport entre la passion de Jésus, celle de Pierre et celle de Jean imitant la Vierge Marie qui lui avait été donnée pour mère à la croix.

2. En second lieu, l’annonce de la ruine du temple de Jérusalem signifie prophétiquement celle du nouveau temple qu’est l’Église. Il faut remarquer que les récits concernant Jérusalem sont présents non seulement dans le discours eschatologique de Jésus[30] mais aussi dans le livre du prophète Daniel qui reçut la révélation des événements tragiques qui se préparaient. [31]

3. En troisième lieu, le livre de l’apocalypse peut être éclairant puisqu’il révèle ce qui est caché dans cette lutte à savoir 1e présence du démon qui, tel un dragon, poursuit la femme et sa descendance sur la terre, et la présence de Dieu qui conduit par ces épreuves les hommes vers la Jérusalem céleste.

 

Solution 1 : La passion du Christ ne doit pas être vécue par l’Église d’une manière matérielle. Mais elle est une analogie dont le sens allégorique annonce et préfigure dans quel esprit se fera cette passion. Ainsi, la mort sur la croix ne sera pas appliquée matériellement à l’Église comme si les clercs devaient être crucifiés à la fin du monde. Mais elle le sera réellement d’une manière que Dieu connaît puisque l’Antéchrist fera disparaître dans l’infamie d’une mise à mort méprisante les serviteurs de Dieu. C’est ce qu’exprime symboliquement l’apocalypse[32] : « Quand ils auront fini leur témoignage, la Bête qui surgit de l’abîme viendra guerroyer contre eux, les vaincre et les tuer. Et leurs cadavres, sur la place de la grande cité, Sodome ou Égypte comme on l’appelle symboliquement, Leurs cadavres demeurent exposés au regard des peuples, sans qu’il soit permis de les mettre au tombeau. Les habitants de la terre s’en réjouissent et s’en félicitent ». C’est ce que semble aussi annoncer le troisième secret de Fatima : « Et nous vîmes, dans une lumière immense qui est Dieu quelque chose de semblable à la manière dont se voient les personnes dans un miroir, un évêque vêtu de blanc, nous avons eu le pressentiment que c’était le Saint-Père. Nous vîmes divers autres évêques, prêtres, religieux et religieuses monter sur une montagne escarpée, au sommet de laquelle il y avait une grande croix en troncs bruts, comme s’ils étaient en chêne liège avec leur écorce. Avant d’y arriver, le Saint-père traversa une grande ville à moitié en ruine et, à moitié tremblant, d’un pas vacillant, affligé de souffrance et de peine, il priait pour les âmes des cadavres qu’il trouvait sur son chemin. Parvenu au sommet de la montagne, prosterné à genoux au pied de la grande croix, il fut tué par un groupe de soldats qui tirèrent plusieurs coups avec une arme à feu et des flèches. Et de la même manière moururent les uns après les autres les évêques, les prêtres, les religieux et religieuses et divers laïcs, hommes et femmes de classe et de catégories sociales différentes. Sous les deux bras de la croix, il y avait deux anges, chacun avec un arrosoir de cristal à la main, dans lequel ils recueillaient le sang des martyrs et avec lequel ils irriguaient les âmes qui s’approchaient de Dieu ».

 

Solution 2 : Il convient que les mystères du futur soient en partie cachés sous les voiles de l’allégorie. En effet, si les hommes connaissaient avec certitude tous les détails accompagnant la fin au monde, ils risqueraient de s’appesantir dans leur espérance, se tenant l’un à l’autre ce langage : « la fin du monde n’est pas pour notre temps ».

Par contre, il est essentiel que certains hommes connaissent d’une manière générale les raisons et les causes de la tribulation qu’ils vivent : De cette manière, ils peuvent s’unir spirituellement au mystère dont ils pénètrent en partie l’essence. C’est pourquoi le livre de l’apocalypse, dont le style est allégorique, a été donné aux hommes. Il permet de fonder une théologie de l’espérance puisqu’il annonce la fin du monde et la Jérusalem céleste. D’autre part, il invite l’homme à scruter les signes des temps qui annoncent le retour du Christ. Cependant, on doit admettre que les textes symboliques de l’apocalypse doivent être éclairés par d’autres textes tirés des évangiles ou des épîtres.

Solution 3 : Et cela répond à la troisième objection. Mais on doit admettre que nul ne peut connaître l’heure de l’Église, c’est-à-dire le moment où son martyre sera consommé. Il est possible, avec beaucoup de prudence, d’en donner un scénario général. L’Antéchrist final installera dans les cœurs humains et sur les nations son royaume de l’homme sans Dieu par des méthodes qui ne laisseront place à aucune ambiguïté. Au contraire, le vrai pape et la vraie Église de cette époque auront à subir un martyre, très souvent annoncé par l'Écriture. “ Quand tu étais jeune, dit Jésus au pape Pierre[33], tu mettais toi-même ta ceinture et tu allais où tu voulais ; quand tu seras devenu vieux, tu étendras les mains et un autre te ceindra et te mènera où tu ne voudras pas. Il indiquait ainsi, commente saint Jean, par quel genre de mort Pierre devait glorifier Dieu. Ayant dit cela, il lui dit : « suis-moi ». Se retournant, Pierre aperçoit, marchant à leur suite, le disciple que Jésus aimait, celui-là même qui, durant le repas, s’était penché sur sa poitrine et avait dit : « Seigneur, qui est-ce qui te livre ? Le voyant donc, Pierre dit à Jésus : Seigneur, et lui ? Jésus lui dit : « S'il me plaît qu’il demeure jusqu'à ce que je vienne, que t’importe ? Toi, suis-moi ». Le bruit se répandit parmi les frères que ce disciple ne mourrait pas. Or Jésus avait dit à Pierre : « Si Je veux qu’il demeure jusqu’à ce que je vienne ». Et non : il ne mourra pas ».

Ce texte est bien évidemment adressé non seulement à Pierre et à Jean individuellement mais à toutes les Églises de tous les temps. Il s’agit d'un exemple typique du style des prophéties de Jésus : Pierre est vraiment mort martyrisé et Jean de vieillesse, le jour où le Seigneur est venu le chercher par son apparition à l'heure de sa mort. Mais il s’agit aussi d'une allégorie racontant la fin de l'Église. Ainsi, le texte de saint Jean nous apprend comment se produira le martyre final de l’Église. Appuyé sur ses succès antérieurs, l’Antéchrist rendra illégales dans le monde entier les religions. Il fera adopter par toutes les nations « une interdiction définitive de prêcher ou de rendre un culte public à Dieu ou à n’importe quelle divinité inventée par le passé ». Chacun sera invité à consacrer son temps à la construction du monde d’ici­-bas, au-delà des superstitions que la peur suscite. Le culte du vrai Dieu ne sera autorisé qu’au fond de sa conscience individuelle, domaine incontrôlable par définition aux autorités politiques. L'Écriture est nette sur ce point[34] : « La corne (la puissance de l’Antéchrist) grandit et s'éten­dit en direction du pays de la Splendeur (le pays où l’on adore Dieu, à savoir les religions et en premier celle du Christ). Elle grandit jusqu’aux armées du Ciel (ceux qui servent Dieu), précipita à terre des armées (les apôtres qui luttent pour l’Évangile) et des étoiles (des docteurs qui enseignent la bonne direction à suivre) et les foula aux pieds. Elle s’exalta même contre le Prince de l'armée (le Christ), elle abolit le sacrifice perpétuel (pour les Juifs, il s’agit de l’holocauste du Temple et, pour les chrétiens, la messe et tous les sacrements de l’Église), et renversa le fondement de son autel (le pape sur qui l'Église est bâtie) et l'armée. Sur le sacrifice elle posa l'iniquité (c’est-à-dire qu’elle déclara mauvais tout culte divin) et renversa à terre la vérité ; Elle agit et elle réussit ». Ce texte comme tous les autres du même sujet ne laisse aucun doute sur l'ampleur de la destruction opérée par l’Antéchrist. Il ne laissera rien subsister de l'Église visible, surtout pas le sacerdoce. Rien ne nous permet d'être définitif sur les méthodes qu'il emploiera. Beaucoup de théologiens du passé affirmèrent à partir de ces textes et de la vie de saint Pierre qu’il s’agirait d'un martyre sanglant : une mise à mort physique des quelques milliers d’hommes que sont dans le monde le pape, les évêques et les prêtres. C'est une chose en définitive assez facile à réaliser dans un monde confiant devant sa liberté. Mais ce sens littéral du martyre n'est pas une certitude. Pour faire disparaître le sacerdoce de la vie des peuples, il suffit, après l’avoir vu s’affaiblir durant des siècles, de l’empêcher de s’exercer : surveillance, emprisonnement, déportation, toutes méthodes policières dans un monde où rien n’est laissé au hasard[35]. Nous ne pouvons affirmer qu’une chose de manière certaine : vers la fin du monde, de par l'action de l’Antéchrist, le dernier pape vivra un sacrifice total dans son ministère désormais banni de la terre. Il sera crucifié comme saint Pierre dans son âme de pasteur (et peut-être aussi dans son corps). Afin que le caractère qui fait le prêtre ne subsiste en personne, il est possible que son martyre s’accompagne de celui des prêtres.

Solution 4 : Il n’y a pas à opposer le Temple de Jérusalem et l’Eglise mais au contraire à les comparer. Ainsi, il est vrai que le Temple était périmé ; de même, à la fin du monde, l’Eglise sous sa forme terrestre devra disparaître pour être glorifiée. Il est vrai que le Temple fut détruit à cause des nombreux péchés qui y furent commis ; de même l’Eglise, faite d’hommes pécheurs, sera martyrisée en vue de la correction de ses péchés. De plus, vers la fin du monde, il semble que le Temple sera rebâti par les Juifs à sa place ancienne ; de même, l’Eglise ressuscitera sainte et définitive dans la gloire de Dieu.

Article 5 : L’heure de l’Église sera-t-elle annoncée par la papauté ?

Objection 1 : L’heure de l’Église ne pourra pas être annoncée par le pape puisqu’il ne la connaîtra pas lui-même : « Il ne vous appartient pas de connaître les temps et les moments », dit le Seigneur à ses apôtres.

Objection 2 : Il semble incroyable que la papauté elle-même puisse subir le martyre jusqu’à disparaître. Le Seigneur dit en effet : « Tu es Pierre et sur cette pierre je bâtirai mon Église. Et les portes de l’Hadès ne l’emporteront pas sur elle ».[36]

Objection 3 : La papauté ne peut disparaître définitivement sans présupposer la disparition de l’Église hiérarchique toute entière sans quoi les prêtres survivants n’auraient qu’à élire un autre pape.

Objection 4 : D’après l’évangile, la papauté ne peut être atteinte par le démon dans sa fidélité à la foi apostolique salon cette parole de Jésus : « J’ai prié pour que ta foi ne défaille pas ». Donc, il est impossible qu’elle soit vaincue par le démon dans l’essence même de son ministère.

 

Cependant : Il appartient au pape de conduire l’Église dans son pèlerinage terrestre selon cette parole du Seigneur à Pierre : « Sois le berger de mes brebis »[37]. Il lui appartient donc en premier lieu d’annoncer prophétiquement l’approche de l’heure da l’Église.

 

Conclusion : C’est sur Pierre et ses successeurs qu’a été fondée l’Église du Christ. Et le Seigneur a remis au pape la responsabilité du ministère prophétique, royal et sacerdotal. À cause de la charge prophétique qui lui incombe, le successeur de Pierre reçoit personnellement un charisme d’infaillibilité qu’il exerce d’une manière habituelle lorsqu’il exprime de sa chaire apostolique les doctrines concernant de qu’on doit croire et la manière dont on doit vivre, c’est-à-dire la foi et la morale[38]. De par sa charge sacerdotale, le pape reçoit la responsabilité de veiller au sacrifice de la messe et aux autres sacrements qui lui sont ordonnés, ainsi qu’à la liturgie qui entoure ces sacrements. Enfin, la charge royale fait du pape celui qui veille sur l’Église toute entière et la mène vers son destin éternel qui est l’entrée dans la béatitude éternelle.

A propos du martyre de l’Église, on doit dire deux choses :

1. Le fait que l’Église doive subir un martyre relève en tant qu’il s’agit d’une doctrine théologique, du ministère prophétique et du charisme de la foi. Il est donc probable que vers la fin des temps, les papes annonceront ce martyre futur ou sa possibilité, de la même façon que Jésus l’a annoncé à ses disciples. Cependant, il faut remarquer qu’une telle annonce est difficilement compréhensible pour ceux qui n’ont pas le sens de la manière dont Dieu conduit ses fidèles. Elle provoque le scandale et aucun de ceux qui suivaient Jésus quand il parlait ainsi ne compris vraiment, excepté bien sûr la Vierge Marie. De la même façon, vers la fin des temps, il est probable que seules quelques âmes contemplatives, vivant de l’esprit de la Vierge Immaculée, comprendront le contenu prophétique des avertissements des papes.

2. Le martyre de l’Église, en tant qu’il sera un événement historique, et qu’il se réalisera à une heure voulue par Dieu, concerne plutôt le ministère royal du pape, c’est-à-dire celui par lequel il conduit le troupeau de Dieu vers son sacrifice et sa glorification. Si l’on suit les Écritures, il semble que la papauté sera signe de la proximité de cette heure sans le vouloir et qu’elle essayera d’y échapper. C’est ce que signifie ce texte de l’évangile qui exprime allégoriquement les dernières heures du pape : « En vérité, en vérité je te le dis. Quand tu étais jeune, tu mettais toi-même ta ceinture et tu allais où tu voulais ; quand tu auras vieilli, tu étendras les mains et un autre te ceindra et te mènera où tu ne voudras pas ».[39] Il signifiait en parlant ainsi, Le genre de mort par lequel Pierre devait glorifier Dieu. Et nous avons dans l’histoire de la papauté une illustration de ce texte. Il est clair que pendant des siècles, la papauté fut maîtresse du monde au point de pouvoir déposer les rois. Elle allait donc où elle voulait. Puis, depuis quelques siècles, son pouvoir fut contesté et diminué sans qu’elle puisse s’y opposer, étant conduite malgré elle jusqu’au dépouillement des états pontificaux. Les papes se firent alors prisonniers volontaires au Vatican, refusant ce qui leur paraissait être une injustice. Saint Jean Bosco n’était pas entendu, lui qui avertissait en disant : « Ceci vient de Dieu ». Cette histoire préfigure un autre dépouillement qui ira jusqu’à la mort. Mais ce dépouillement final sera difficilement accepté par le pape. On peut en avoir un signe de cette réticence au martyre dans le document qui accompagne la publication de la troisième prophétie de Fatima citée plus haut : « ce texte est déjà réalisé dans l’attentat de 1981 contre Jean-Paul II », dit le Cardinal Ratzinger.

 

Solution 1 : Il peut arriver qu’un homme soit prophète sans le vouloir. Ainsi Caïphe qui était alors grand prêtre dit-il à ses confrères : « Vous ne voyez même pas qu’il est de votre intérêt qu’un seul homme meure pour le peuple et que la nation ne périsse pas tout entière ».[40] Et l’évangéliste commente cette parole en disant : « il ne dit pas ceci de lui-même mais, étant grand prêtre cette année là, il prophétisa que Jésus devait mourir pour la nation ». De même, à la fin des temps, la papauté sera conduite par le Saint Esprit à prononcer des paroles et à subir des événements qui seront signe de la fin prochaine. Et qu’elle le veuille ou non, elle imitera Jésus qui eut un comportement significatif vers sa dernière heure : Il accepta de parler aux grecs, alors qu’il réservait jusqu’ici son ministère aux seuls Juifs[41] ; il fut acclamé une dernière fois par les foules enthousiastes lors de son entrée à Jérusalem[42], il s’humilia jusqu’à laver les pieds de ses disciples[43] et fit bien d’autres choses surprenantes pour ses disciples. De même, vers la fin de l’Église, la hiérarchie ecclésiale aura un comportement qui tranchera avec ce qui se faisait précédemment ou point d’en scandaliser quelques-uns uns qui imiteront en cela le comportement généreux mais mal éclairé de Pierre lorsqu’il refusa de se faire laver les pieds par le maître[44].

Solution 2 : Comme nous l’avons montré, de telles paroles de Jésus ont d’abord une signification spirituelle : elles montrent que jamais le démon ne pourra faire dériver la foi du Magistère de Pierre ou faire que les papes dirigent l’Église vers une autre fin que l’unique possession de Dieu. Elles ne signifient pas que la papauté ne puisse pécher ou subir des échecs extérieurs et des persécutions. L’histoire montre que bien des papes sont morts martyrs. Et qu’à la fin du monde la papauté soit attaquée par l’Antéchrist au point de disparaître, ce ne sera pas un échec mais la victoire définitive qui précèdera le retour du Christ.

Solution 3 : La fin de l’Église vécue par la papauté sera comparable à celle du Christ qu’elle doit imiter et achever. Or on voit que parmi les disciples, la plupart eurent peur et s’enfuirent tandis que quelques uns trahirent comme Judas ou renièrent comme Pierre. Dans la dernière lutte de l’Église, l’Antéchrist fera régner une telle terreur qu’il en sera ainsi parmi les prêtres. Ceux qui seront fidèles seront mis à mort, les autres abandonneront leur sacerdoce. C’est pourquoi Daniel prophétise[45] « Des forces viendront de sa part profaner le sanctuaire-citadelle, ils aboliront le sacrifice-perpétuel, et y mettront l’Abomination de la désolation ». Ce sera pour l’Église, à travers les générations qui vivront cela, une époque de sépulcre et pour les chrétiens un moment de tentation spirituelle intense que seules une foi et une espérance comparables à celles de la Vierge au samedi saint pourra vaincre.

Solution 4 : Le successeur de saint Pierre reçoit de la part de l’Esprit Saint un charisme personnel d’infaillibilité lorsqu’il enseigne, en tant que Prince des apôtres, une doctrine concernant la foi ou la morale. Il est donc impossible, à cause de la puissance du Saint Esprit, que le pape soit vaincu sous ce rapport.

 

Article 6 : Sera-t-elle annoncée par la liturgie ?[46]

Objection 1 : On ne voit pas comment la liturgie sacramentelle pourrait être signe de la proximité du martyre de l’Église et du retour du Christ puisqu’elle demeure inchangeable, étant instituée par le Christ.

Objection 2 : Lorsque les papes changent la manière dont est célébré le rite préparatoire au sacrement, ils ne veulent pas annoncer le retour du Christ mais seulement adapter à la sensibilité du peuple la manière de célébrer Dieu.

Objection 3 : Le peuple des fidèles par la manière dont il préfère vivre la liturgie ne peut être considéré comme un signe des temps. Car la sensibilité dépend plus de la culture ambiante et de la mode que de l’Esprit Saint.

 

Cependant : L’apocalypse écrit[47] : « La femme criait dans les douleurs de l’enfantement ? » Or cette femme symbolise l’Église dans son cheminement vers la gloire. Et le cri de l’Église, c’est la liturgie. Donc il y aura des signes dans la liturgie.

 

Conclusion : La liturgie est la prière par laquelle l’Église rend un culte à Dieu. 1° Or parmi les actes liturgiques, il en est qui sont institués par le Seigneur lui-même. Ceux-là ne peuvent en aucune façon évoluer ou être changés puisqu’ils dépendent de la volonté de Dieu et non de celle de l’Église. Par exemple, les paroles et les gestes consécratoires de l’eucharistie sont essentiels au sacrement au point qu’ils ne peuvent être changés.

2° D’autres actes liturgiques sont entièrement dépendants de la volonté de l’Église puisque le Seigneur n’a rien fixé les concernant. Il dépend donc du pape et des évêques unis au pape d’en déterminer les règles. Ainsi, la forme des vêtements liturgiques, les prières préparatoires à la consécration eucharistique, la forme de l’autel ou de la table du sacrifice et d’autres choses du même genre fixées par les rituels.

3° Enfin, certains aspects de la liturgie sont laissés à la libre initiative des prêtres et des fidèles : la manière de chanter et le contenu des psaumes de libre louange, les offrandes données à l’Église lors de l’offertoire.

Et, selon ces trois aspects, la liturgie est signe de la fin au monde.

1. Ce qui est institué par le Seigneur est sar essence signe du retour du Christ puisque, à chaque fois qu’un sacrement est conféré, le Christ vient dans l’âme et préfigure par là sa venue définitive accomplie à la mort de chacun.

2. Ce qui dépend de l’Église et de la papauté peut être plus particulièrement encore signe de la proximité du retour du Christ tel qu’il se produira à la fin au monde. En effet à chaque fois qu’un pape change la liturgie de l’Église, il est mu invisiblement par le Saint Esprit qui donne à sa réforme une signification prophétique. De la même manière que le Christ a été honoré diversement par les hommes selon qu’il était plus ou moins proche de l’heure de sa passion, de même l’Église offrira à Dieu le sacrifice eucharistique selon des modes différents jusqu’à la fin.

3. Ce qui dans la liturgie dépend du peuple de Dieu peut aussi être signe des temps car les fidèles sont invisiblement mus par un sens prophétique qui vient du Saint Esprit.

 

Solution 1 : On a vu de quelle manière la liturgie sacramentelle, en tant qu’elle est instituée par le Christ, est pour chaque homme signe de la fin du monde. Cependant, vers la fin du monde, cette liturgie sera plus particulièrement encore signe de son retour selon Daniel[48] : « Ils aboliront le sacrifice perpétuel ». Il est en effet probable que les armées de l’Antéchrist feront disparaître la célébration de l’eucharistie. Et cette terreur qui semblera marquer la victoire définitive du démon sera pour l’Église un temps de sépulcre qui précédera une résurrection glorieuse et définitive dans la gloire du retour du Christ.

Solution 2 : De même que le peuple d’Israël était un signe prophétique à travers chacun des événements de son histoire, de même l’Église qui est le nouvel Israël. On doit donc apprendre à lire avec le regard de l’Esprit Saint l’histoire de l’Église selon se signification eschatologique. Et cette histoire peut être comparée à celle de Jésus lors de son pèlerinage terrestre. Ainsi, on peut lire dans les évangiles que Jésus fut honoré diversement au cours de sa vie apostolique : il y eut un moment plus caché lorsque les Juifs commencèrent à entendre parler de lui, il y eut ensuite un moment de gloire extrême où il fut honoré par la majorité au peuple ; il y eut enfin un moment douloureux, accompagné de luttes qui aboutirent à la dernière liturgie, celle au sépulcre, accomplie par des laïcs qui n’étaient même pas ses compagnons de route. De même, la liturgie de l’Église connut des phases analogues depuis les premières maisons de prière dans l’Empire romain. Elle ne cessera d’être signe des temps jusqu’à la dernière liturgie. Lorsque le sacerdoce sera effacé de la terre. Alors viendra la liturgie du silence, jusqu’au retour du Christ.

Solution 3 : Les fidèles sont mus intérieurement par l’Esprit Saint qui oriente leur cœur en y inspirant ses volontés. Et plus les fidèles sont proches de Dieu, plus cette motion est accomplie facilement, selon le livre des Proverbes[49] : « Le cœur du roi est aux mains du Seigneur comme l’eau courante qu‘on oriente partout à son gré ». Ainsi, on doit être attentif à la spiritualité des fidèles, selon qu’il y a de saint en eux. L'art a de tout temps été signe de la mentalité des époques. Ainsi, le XIIIème siècle, époque de la civilisation chrétienne où tout s'unifie autour du Christ, brille par l'harmonie des cathédrales gothiques qui ressemblent à des vaisseaux en marche vers la lumière. La Renaissance qui est le siècle de la redécouverte de valeurs humaines autonomes du christianisme et trop oubliées se caractérise par ses oeuvres profanes aux lignes classiques ; l'époque moderne et contemporaine qui se caractérise par l’oubli progressif de Dieu a été source d'un art de plus en plus profane et aujourd’hui torturé, non figuratif et parfois même sans vie apparente, marqué du même désespoir que le monde qui ne croit plus devoir espérer un salut après la mort. L’art est donc un signe philosophique de chaque époque. Il en est de même au plan théologique mais l’art s’appelle liturgie, et le temps se déroule vers le retour du Christ. Durant sa vie terrestre, Jésus reçut de la part de ceux qui l’entouraient des marques qui étaient des signes de leur attachement à son égard. Il fut honoré diversement au cours de sa vie apostolique. Il y eut un temps plus caché au moment où les Juifs commencèrent à entendre parler de lui. De même, l'Église à ses débuts dans l'Empire romain, encore soupçonnée et objet de méfiance, se réunissait dans des maisons individuelles et, comme aux noces de Cana, ne donnait qu'en privé le vin de la Parole. Au cours de sa vie, Jésus connut ensuite un moment de gloire extérieure. Les gens venaient de tout Israël pour écouter sa parole et voir ses miracles. On voulait le toucher, le faire roi. De même, l'Église connut une époque de gloire. Elle dominait le monde, pouvant excommunier les rois et leur enlever leur trône. Sa liturgie devint somptueuse, riche et solennelle, à l'image du pouvoir spirituel (et matériel) qu’elle possédait. Dans une troisième phase de sa vie apostolique, Jésus connut la lutte et les abandons. On vint moins l'écouter. Il fut souvent seul. Il en est de même pour l'Église depuis le siècle des Lumières et de plus en plus actuellement. Alors, poussée par l'Esprit saint, elle changea de liturgie. Après le Concile Vatican II, elle l'appauvrit, la rendit plus familiale en insistant davantage durant la Messe sur l'aspect “ repas intime ” de la Cène de Jésus et moins sur la gloire du Sacrifice universel de la croix. L'Église avait bien sûr le droit d'agir ainsi, puisant dans l'immense richesse des trésors de l'Évangile. Mais elle fut contestée. Pourtant, elle donnait aux chrétiens l'un des plus grands signes des temps de la fin. Nous pouvons être sûrs que d'autres signes seront donnés par la liturgie dans le futur, à mesure que s’approchera l'Heure de l'Église. Les chrétiens de ces époques futures devront y être attentifs et, chaque fois que les signes de petitesse s'approfondiront, se réjouir “ et redresser la tête car leur Rédemption s'approche ”[50]. Cette liturgie de pauvreté sera poussée très loin, à l'image de Jésus. Sa dernière liturgie, celle de son sépulcre, fut accomplie par des laïcs qui n’étaient même pas ses compagnons de route mais de simples admirateurs[51]. Il en sera donc de même pour l’Église.

 

Article 7 : Y aura-t-il des signes dans les comportements des prêtres et des évêques ?

Objection 1 : Judas trahit Jésus par convoitise. L’attitude de cet apôtre ne peut être le type du comportement de certains clercs vers la fin du monde. En effet, s’il s’agit de s’enrichir, les hommes n’ont pas intérêt à entrer dans les ordres.

Objection 2 : De même, l’attitude de Pierre fut tout de générosité proclamée puis de lâcheté devant la réalité. Il s’agit d’une psychologie très particulière et non le prototype d’une tendance ecclésiale vers la fin du monde.

Objection 3 : Jean fut le seul apôtre au pied de la croix. Mais il fut présent plus par amitié humaine que par foi puisque l’Écriture nous dit qu’il crut quand il vit le tombeau vide, ce qui sous-entend qu’il ne croyait plus avant.

Objection 4 : La plupart des autres apôtres s’enfuirent, dont certains « tout nus »[52]. Il est inimaginable que, face aux évènements de la fin, il y ait une telle lâcheté. L’Esprit de force n’a-t-il pas été donné ?

 

Cependant : La vie et la mort de Jésus sont l’archétype de la vie et la mort de l’Église. Les tentations connues par ses apôtres se retrouveront à la fin de l’Église chez les clercs.

 

Conclusion : En contemplant la vie de Jésus, on s’aperçoit que, plus encore que des luttes extérieures, il eut à souffrir d'oppositions sourdes à l'intérieur du cercle de ses amis. La plus terrible d'entre elle fut le fait de son apôtre Judas. Sa révolte éclate en saint Jean, après qu'une femme pleurant ses péchés et pleine de reconnaissance pour la douceur de Jésus à son égard eût versé sur ses pieds un parfum de grand prix[53]: “ Pourquoi ce parfum n’a-t-il pas été vendu trois cents deniers qu’on aurait donnés à des pauvres ? Jésus lui répondit : Laissez-la : c’est pour le jour de ma sépulture qu’elle devait garder ce parfum. Les pauvres en effet, vous les aurez toujours avec vous ; mais moi, vous ne m'aurez pas toujours. ” L'attitude de Judas est compréhensible : trois cents deniers représentent un salaire ouvrier d'une année. Le geste d'amour gratuit de la femme lui parut une perte considérable par rapport à l'annonce de l’Évangile, qui est un message d'attention aux plus pauvres et par rapport à sa propre bourse puisqu’il « volait »[54]. Il oppose donc de fait l'amour de Jésus et l'amour des pauvres, deux commandements pourtant unis par Dieu en un seul. Il s’agit là sans aucun doute d'un signe des temps qui apparaîtra dans l'Église vers la fin du monde. Nous montrerons que le dernier antichristianisme séduira le monde entier en raison des riches valeurs d’humanisme sans Dieu qu'il intégrera. S'il y eut jadis des chrétiens généreux mais peu clairvoyants pour se laisser séduire au nom de l'amour de Dieu, par le fanatisme religieux ou encore par le nationalisme et le marxisme, comment pourrait-il en être autrement de l'Humanisme qui ressemble beaucoup plus à l’Évangile du Christ ? L'humanisme fait même partie du christianisme mais celui-ci sait le consacrer au Dieu aimé.

 

Solution 1 : De nos jours, nous avons vu apparaître dans l'Église un courant de pensée très puissant qui réduit l’Évangile à la lutte pour le bien social. Ses membres sont familièrement qualifiés sous l’étiquette de progressistes parce qu’ils semblent en harmonie avec le progrès du monde. Ils se caractérisent par une sourde opposition aux décisions des papes jugées en décalage par rapport à notre temps. Ils critiquent en particulier ses positions en matière de comportement sexuel. La liberté, telle est sans doute aux yeux de ce courant le qualificatif le mieux choisi pour résumer l’Évangile. “ Il est l’Évangile de la liberté ”.Il est surprenant comme une petite variation d’interprétation peut avoir de conséquences. Nous disions précédemment que l’Évangile se spécifie d’abord dans l’amour de Dieu et du prochain... L’amour de Dieu et du prochain est premier, la liberté conséquence. Ainsi, pour le courant progressiste, l’encouragement de l’Église pour la vie consacrée à la prière paraît être une perte de temps et d'énergie pour l'action sociale. L'amour gratuit de Jésus aimé et servi comme un époux au jour le jour paraît n’être le fruit que d'une fuite du monde. Ce courant de pensée ne se séparera jamais de l'Église par un schisme bien qu'il le soit par le cœur. Ne constitue-t-il pas un signe des temps très significatif car analogue à ce qu'on voit dans la vie de Jésus ? Vers la fin du monde, il est probable que le progressisme humaniste ira en s'approfon­dissant. Il supportera de moins en moins l'infaillible fidélité des papes à l'Évangile. À l’image de Judas au moment de sa tentation, il aura sans doute un rôle de coopération dans l’œuvre qui aboutira à la fin de l'Église visible.

Solution 2 : Un autre signe des temps, tout aussi significatif, mérite d'être rapporté. Quelques jours avant sa mort, Jésus voulut se comporter avec eux comme s'il était leur esclave. Il se mit à laver les pieds de ceux qui étaient à table. Mais Pierre ne voulut pas se laisser faire : « Seigneur toi, me laver les pieds ? Jésus lui répondit : Ce que je fais, tu ne le sais pas à présent ; par la suite tu comprendras. Pierre lui dit : Non, tu ne me laveras pas les pieds, jamais! Jésus lui répondit : Si je ne te lave pas, tu n'as pas de part avec moi »[55]. Pierre n'agit ainsi qu'à cause de son amour pour Jésus, du sens de sa dignité de Maître et Seigneur. Son cœur était généreux mais absolument incapable de pensées divines. Pour lui, un Messie est fait pour devenir un roi politique. Un maître de vérité est fait pour avoir raison. Mais pour Jésus, un Messie est fait pour être le serviteur de tous jusqu'à en mourir. Là encore il convient d'être attentif car l'Église, conduite sur le même chemin d'abaissement que Jésus, connaîtra nécessairement de la part de certains de ses membres la même réaction. Il existe d'ailleurs depuis le Concile Vatican II un courant de pensée qui ressemble à s'y méprendre à saint Pierre le jour du lavement des pieds. Familièrement, il est qualifié de mouvement intégriste car il rêve de voir l'Église avec l’intégrité des traditions qui firent sa force au temps passé. Ils rêvent d'une Église sûre de sa Vérité, ne s’abaissant pas à s'adresser aux autres religions en courant le risque qu'ils considèrent comme actuel, d'être mis au même niveau qu'elles. Ils voudraient une liturgie de gloire, comme au temps des fastes, et non celle instaurée par les papes après le Concile. La défense de la liberté religieuse, selon la conscience de chacun, leur parait s'opposer aux décrets faisant du christianisme la religion des Etats du temps où ceux-ci étaient catholiques. Alors, tel saint Pierre devant Jésus ceint d'un tablier, ils ne reconnaissent plus leur Église en tenue de servante. Ils vont jusqu'à enseigner : « Les papes depuis Jean XXIII et le Concile sont peut-être des antipapes. L'abomination de la désolation[56] est dans le Temple Saint, c'est-à-dire aux sommets de l'Église atteints par l'apostasie ». Ils oublient qu'il est impossible que ce texte des Evangiles se réalise de cette manière à cause de la promesse solennelle de Jésus faite aux papes : « J'ai prié pour que ta foi ne défaille pas ». Ils interprètent mal des textes qu'ils savent pourtant adressés à tous les papes légitimement élus. Cette contradiction torture leur esprit. Mais, si l’on compare leurs agissements au comportement de saint Pierre qui les prophétise, on ne peut nier que leur révolte soit liée à leur bonne volonté et à leur amour (mal éclairé) du Seigneur. Saint Pierre se laissa finalement laver les pieds mais sa foi, sa confiance ne fut pas assez forte pour tenir face à la croix. Il en sera de même à la fin du monde pour ceux parmi les chrétiens qui rêveront encore d'une Église intègre et glorieuse. Ils ne tiendront pas. Ils s’enfuiront à la vue de la destruction spirituelle à venir. Ils n'auront pas comme ceux parmi les chrétiens qui se seront laissés formés par Marie, la capacité d'avoir part à la victoire finale de l'Église enfin devenue grande aux yeux de Dieu. Ils se diront plutôt, relisant fiévreusement les promesses de Jésus : “les portes de l’enfer ne l'emporteront pas sur elle! ”[57] que tout cela n’était peut-être que vanité... Ils passeront par les mêmes doutes que Pierre après l'arrestation et la mort de Jésus, doutes qui l'amenèrent à renier trois fois. Il y aura dans leur souffrance un signe des temps important.

Solution 3 : Au pied de la croix, seule Marie croyait et vivait de l'intérieur, debout, la mort de Dieu. Elle ne douta pas un seul instant que Dieu transformerait cela en salut pour toutes les nations. Cette confiance unique ne se retrouve pas chez saint Jean pourtant présent à la croix et appelé « le disciple que Jésus aimait ». Il en sera de même à la fin du monde lorsque l’Antéchrist triomphera : l'Église sera petite, réduite aux seuls domaines des cœurs et sans vie extérieure et politique. On la croira morte pour toujours, en reprenant la promesse visiblement manquée de Jésus. Qui pourra songer qu'au moment même où les portes de l’enfer sembleront avoir extérieurement tout détruit, comme à trois heures le jour de la mort de Jésus, que c'est absolument l'inverse aux yeux de Dieu, que tout est accompli et que le retour glorieux du Christ sera aussi rapide que les trois jours de son sépulcre. Personne ne pourra imaginer cela sauf ceux qui auront la même foi que Marie. Seule une foi invincible, digne de la mère de Dieu, tiendra en ces heures dernières. Tous les autres faibliront aussi sûrement que Jean face à ce qu'il ne comprit pas.

Solution 4 : L’espérance théologale ne doit pas être confondu avec l’espoir qui attend un bien terrestre d’une puissance terrestre. À la fin du monde, seule l’espérance qui attend avec certitude la victoire de Dieu, qui est un bien de la vie éternelle, de la puissance divine, pourra vivre dans la joie les évènements selon cette parole[58] : « Quand vous verrez tout cela, redressez-vous et relevez la tête car votre rédemption est proche ».

 

Article 8 : L’Abomination de la désolation doit-elle s’installer dans le siège Apostolique ?

Objection 1 : Cela semble impossible. À la différence du Temple de Jérusalem qui était un lieu précis et pouvait facilement être transformé en temple de la violence (ainsi devint-il juste avant sa destruction, de la faute des zélotes en 70 après JC) ou des idoles, le Siège apostolique peut changer de lieu puisqu’il est là où est le Pape. C’est ce que nous apprend l’histoire : le Siège apostolique fut souvent déplacé en Avignon.

Objection 2 : Le Siège Apostolique est un lieu matériel. Il ne peut donc être profané puisque le culte du Nouveau Testament est spirituel, selon cette parole du Seigneur[59] : « L’heure vient ou ce n’est ni sur cette montagne ni à Jérusalem que vous adorerez le Père ? ».

Objection 3 : Ce texte doit, semble-t-il, être interprété de toute autre façon : l’abomination de la désolation dans le temple saint signifiait et annonçait la venue d’un grand prêtre perverti qui collaborerait avec les Grecs pour installer une autre religion que celle du Dieu unique. Il s’agit du grand prêtre Jason[60] et de ses successeurs. De même, à la fin du monde, il semble que l’on assistera à la venue d’un antipape sur le siège de Pierre. Il prêchera un anti-christianisme et entraînera un grand nombre à sa suite.[61]

 

Cependant : Le Seigneur annonce en saint Matthieu[62] : « Lors donc que vous verrez l’Abomination de la désolation dont a parlé le prophète Daniel installée dans le Saint lieu (que le lecteur comprenne) alors que ceux qui seront en Judée s’enfuient dans les montagnes que celui qui sera sur la terrasse ne descende pas dans sa maison pour prendre ses affaires, et que celui qui sera aux champs ne retourne Pas en arrière Pour prendre son manteau! Malheur à celles qui seront enceintes et à celles qui allaiteront en ce jour là ».

 

Conclusion : Comme on l’a montré, la ruine de Jérusalem et la destruction du temple perpétrée par les Romains sont des signes prophétiques de ce que subira le nouveau temple qui est l’Église à la fin des temps. Or d’après le Seigneur le signe symbolisé par « l’abomination de la désolation dans le lieu saint » sera ensuite donné. Historiquement, il s’agit d’une prophétie du prophète Daniel. Elle fut réalisée une première fois par le roi Antiochos Epiphane qui enjoint aux Juifs des pratiques païennes. La fidélité à la loi de Moïse devint un acte de rébellion politique. Et ce roi alla jusqu’à construire l’autel du Baal Shamem ou Zeus Olympien sur le grand autel des holocaustes au Temple de Jérusalem. Elle fut réalisée une deuxième fois par les Romains qui incendièrent le Temple et construisirent à la place un Temple consacré à leur Panthéon. La résistance juive qui se dressa alors ne réussit pas et fut définitivement anéantie en 135 après J. C.

De même, vers la fin du monde, l’Église subira une grande tribulation menée par l’Antéchrist. Elle aboutira, comme on l’a vu, à la destruction de l’Église visible et à l’arrêt du sacrifice eucharistique et il est certain que l’Antéchrist, pour manifester en plénitude sa victoire sur le culte divin, établira une nouvelle Église consacrée aux culte du Dieu de la liberté égoïste, Lucifer et à l’adoration de l’homme. Tout au long de l’histoire, nous avons eu des préfigurations de ces antichristianismes. Mais le dernier aura la particularité d’être mondial et pacifiant au point de « séduire les saints eux-mêmes ».[63]

Quant à l’hypothèse de l’installation du Siège de cette nouvelle Église anti-chrétienne sur le lieu même où gouvernait auparavant l’Église romaine, c’est-à-dire dans la cité du Vatican où fut crucifié Pierre, il est possible qu’elle se réalise matériellement. Cependant d’autres estiment que le siège de l’Antéchrist sera la Ville Sainte, c’est-à-dire Jérusalem puisque l’Église de la fin des temps avant son martyre, aura un rapport avec le peuple d’Israël. Il est impossible d’être définitif sur de tels signes, au moins en ce qui concerne la matérialité de leur réalisation puisque leur signification est d’abord celle de la réalité spirituelle.

 

Solution 1 : Le symbolisme du Temple a plusieurs sens dont le profond se rapporte au corps de l’homme, temple de son esprit que Dieu veut habiter. Comme on l’a montré, vers la fin du monde, la papauté sera détruite par l’Antéchrist. Celui-ci établira pour le monde entier un culte qu’il qualifiera d’universel, c’est-à-dire de catholique et il se proclamera seul sauveur du monde. Beaucoup d’hommes adhèreront à cette nouvelle religion, séduits par cette perspective d’unité mondiale à travers un seul culte. En ce sens, on peut dire que l’Antéchrist établira son temple au fond des cœurs qui sont le véritable temple de Dieu.

En un second sens, la présence de l’abomination dans le Temple saint peut signifier matériellement que les églises, les mosquées et tous les lieux où l’on adore le Dieu unique seront transformés en temple du démon. De même il est permis de penser que le Siège Apostolique deviendra celui du nouveau culte.

Solution 2 : Comme tous les lieux saints, le Siège apostolique est consacré à Dieu et rien de profane ne peut s y installer sans que cette consécration en soit souillée. C’est pourquoi, on avait l’habitude de purifier les églises où un crime avait été commis. De même, Judas Maccabées fit purifier le Temple de Jérusalem après sa profanation par les idoles grecques[64]. De ce fait, l’installation de l’abomination du culte des idoles dans le Siège Apostolique constituera, s’il a lieu, un suprême blasphème et un défi à Dieu. Et il y aura grande désolation et douleur chez les croyants à cette époque.

Solution 3 : Quoiqu’il arrive dans le futur, il est impossible qu’un pape légitimement élu se mette à enseigner en tant qu’il est pape autre chose que l’Évangile de Jésus. Toute l’histoire de l’Église le montre : nous avons eu des papes assassins, adultères ou polygames mais jamais de pape hérétique. La seule exception à ce fait, Honorius I qui enseigna un temps le monothélisme (Jésus n’aurait eu qu’une volonté divine, pas de volonté humaine) n’est pas significative puisque son affirmation dont il se rétracta par la suite, relève du domaine privé de ses opinions. La raison de ce fait est simple : en tant qu’homme, les papes ne sont pas impeccable (incapables de péchés) mais en tant que successeurs de Pierre, ils sont infaillibles au plan doctrinal non de leur propre force mais parce que Jésus a promis[65] : « J’ai prié pour que ta foi ne défaille pas ». Il est donc certain que, quelles que soient les décisions des papes du futur, non seulement en tant qu’ils exercent leur fonction de Magistère mais aussi, à un autre degré, en tant qu’ils sont Pasteur suprême, elles seront de Dieu. Pour illustrer ce fait, saint Jean Bosco fit un rêve concernant les épreuves de la fin du monde : Il voyait l’Église comme un navire secoué par la tempête. Mais seuls survivaient au naufrage ceux qui s’appuyaient sur trois blancheurs : la Vierge Marie pour son espérance inébranlable à la croix, Jésus pour son eucharistie et son inhabitation dans l’oraison, le pape enfin pour sa foi toujours vraie. Ceci dit, nous avons vu (article 5° en quel sens la papauté sera signe de la fin du monde.

 

Article 9 : Le Christ, lorsqu’il viendra, trouvera-t-il la foi sur la terre ?

Objection 1 : Le Christ ne trouvera pas la foi sur terre En effet, l’Écriture affirme que la Bête aura le pouvoir de vaincre les saints. Or sa victoire ne serait pas totale s’il restait la foi sur la terre.

Objection 2 : À la mort de Jésus, qui est la préfiguration de celle de l’Église à la fin du monde, il ne resta personne pour croire excepté la Vierge Marie. Or la Vierge Marie était immaculée dans sa conception ce qui la rend différente du reste de l’humanité. Donc à la fin du monde, il n’y aura personne pour croire alors que tout semblera perdu.

Objection 3 : Une foi comme celle de Marie est réservée aux contemplatifs mais ne peut appartenir à la masse des chrétiens. Or, les ordres contemplatifs seront détruits Par l’Antéchrist à la fin des temps. Donc la foi ne subsistera pas sur la Terre.

 

Cependant : Le Seigneur dit à propos de saint Jean[66] : « S’il me plait qu’il demeure jusqu’à ce que je vienne ? ». Et l’évangéliste commente ainsi cette parole mystérieuse : « le bruit se répandit alors chez les frères que ce disciple ne mourrait pas ». Or Jésus n’avait pas dit à Pierre : « Il ne mourra pas » mais : « si je veux qu’il demeure jusqu’à ce que je vienne ». Donc, lors au retour bu Christ, il restera sur la terre des croyants dont la foi est symbolisée d’une manière allégorique par celle de saint Jean, le disciple bien-aimé.

 

Conclusion : De même qu’à la croix subie par Jésus, il est resté quelques personnes (surtout des femmes) qui ont cru et n’ont jamais douté, de même lors de la passion que subira l’Église, et pendant le temps de sépulcre qui s’en suivra et qui précèdera immédiatement le retour du Christ, la foi demeurera sur la terre.

Or il est remarquable de voir que la seule personne à avoir infailliblement cru, d’une foi divine appuyée sur la seule confiance en la parole de Dieu, est la Vierge Marie. En effet, l’apôtre saint Jean lui-même fut davantage présent à la croix par amitié envers Jésus que par véritable foi divine comme le prouve le fait qu’il retrouva une foi plus assurée en voyant le sépulcre vide et le linceul posé à sa place[67]. Quant à Marie Madeleine, sa fidélité n’était pas exempte d’un motif humain comme l’indique la passion qu’elle éprouvait pour Jésus ; Joseph d’Arimathie et Nicodème exprimèrent leur respect à un homme qu’ils admirèrent et non à un Dieu.

De même, à la fin du monde, seuls les croyants ayant une foi à l’image de celle de Marie pourront rester fidèlement dans l’attente de la résurrection finale. Et si l’on en croit les paroles de Jésus, une telle foi existera. C’est ce qu’il indique dans le texte cité à propos de saint Jean : ce disciple en effet, symbolise celui qui croit comme la Vierge Marie puisqu’il la pris chez lui à l’heure de la passion[68]. Mais il existera d’autres hommes à pleurer le grand malheur subi par l’Église, à l’image de Joseph d’Arimathie. Ceux-là auront le courage d’exprimer face à l’Antéchrist leur tristesse.

 

Solution 1 : Cette victoire de l’Antéchrist ne sera pas totale puisque les temps de se lutte seront limités « à cause des élus qui devront avoir la vie sauve ».[69] Quant à la victoire de l’Antéchrist, elle ne sera qu’apparente. Par ses manœuvres et la séduction appuyée sur l’efficacité des résultats dont il pourra se valoir, il fera disparaître toute apparence de culte extérieur et les remplacera par le culte d’un nouveau Dieu, prêchant un nouvel Evangile de la liberté et de la fierté. Mais il ne pourra jamais arracher de la nature humaine son orientation faite pour le vrai Dieu de l’humilité et de l’amour, ni la foi et la charité de ceux qui prient dans le secret. Le monde qu’il créera sera donc en apparence en paix sans Dieu et en réalité en état d’inanition spirituelle. Nous en avons une image dans le martyre subi par l’Église de Russie sous la violence de Staline.

Solution 2 : La Vierge Marie n’était pas seule à croire. D’autres femmes restèrent fidèle, en s’appuyant sur elle. Mais la pureté de la foi de Marie, pour laquelle elle fut proclamée bienheureuse[70], fut unique. Elle n’est pas hors de portée du reste des chrétiens. Cependant, elle ne peut être acquise que par une patiente éducation réalisée par la mère de Dieu. C’est pourquoi Jésus à confié sa mère à son disciple bien-aimé, invitant par la même occasion les autres à l’imiter. De même, la prière du Rosaire qui est une contemplation accompagnée de Marie de la vie de Jésus est une pratique essentielle pour l’acquisition de l’esprit de Marie.[71] C’est pourquoi aussi, nous le verrons, Marie recevra de Jésus vers la fin du monde une concrète mission apostolique pour l’Eglise de la terre.

Solution 3 : La vie contemplative n’est réservée aux ordres contemplatifs mais elle est donnée à tous les chrétiens selon cette parole du Christ « Tu as caché cela aux sages et aux savants mais tu l’as révélé aux tout-petits ».[72] Vers la fin du monde, la Vierge aura d’après saint Louis-Marie Grignon un rôle particulier puisqu’elle préparera en vue du martyre de l’Église une Église qui lui sera consacrée et qui sera rendue prête à vivre du mystère de se compassion

 

QUESTION 31 : Les signes donnés par la Vierge Marie[73]

 

 

A propos de la Vierge Marie, qui est appelée Reine de l’Église, nous nous demanderons :

1. La Vierge doit-elle avoir un rôle, particulier à la fin du monde ?

2. Apparaîtra-t-elle aux hommes ?

3. Y aura-t-il des apparitions d’anges ?

4. Deux témoins doivent-ils venir vers la fin du monde ?

 

Article 1 : La Vierge doit-elle avoir un rôle, particulier à la fin du monde ?

Objection 1 : Le culte de la Vierge Marie ne peut être particulier à la fin du monde au point de devenir indispensable pour garder la foi. En effet, la foi des chrétiens s’appuie en premier lieu sur le Seigneur Jésus, qui est l’unique médiateur entre Dieu et les hommes.

Objection 2 : La Vierge Marie s’est toujours effacée derrière le Seigneur Jésus. On ne voit pas pourquoi elle devrait agir autrement à la fin du monde.

 

Cependant : Saint Bernard écrit : « de même que le Christ nous a été donné par la Vierge Marie une première fois, de même a la fin du monde il nous sera donné par elle une deuxième fois ». Donc la Vierge Marie aura un rôle particulier à la fin du monde.

 

Conclusion : D’après saint Louis-Marie Grignon, la Vierge prendra une importance de plus en plus essentielle vers la fin du monde[74]. Et il est facile d’en trouver la raison d’après ce que nous avons dit : lorsque l’Esprit de l’Antéchrist commencera à répandre sa séduction sur le monde, il deviendra très difficile de rester fidèle à son baptême car les attaques du démon porteront sur la légitimité même de la foi en Dieu qui est le fondement de tout l’édifice chrétien. Viendra donc un temps où seule une foi fondée sur le Roc qui est Jésus Christ lui-même pourra tenir. Et une telle foi n’est autre que celle de Marie. Il est donc probable que vers la fin des temps, elle sera expressément et de plus en plus recommandée aux chrétiens comme le modèle et l’éducatrice indispensable. Elle sera recommandée à la fin par la papauté dont le rôle est d’orienter la piété ces fidèles, et par les saints qui seront intimement mus par l’Esprit Saint à proclamer l’urgence d’une telle dévotion.

Lorsque viendra l’Antéchrist et ses armées matérielles, il détruira la papauté et empêchera la célébration de l’eucharistie. Alors la Vierge restera le seul support intérieur des fidèles dans leur désir de rester fidèles au Seigneur Jésus. Elle aura donc un rôle indispensable dans ces moments difficiles. C’est ce qu’exprime C’est ce qu’exprime le verso de la médaille donnée par la Vierge à sainte Catherine Labouré lors de son apparition à la rue du Bac (1830° : Elle représente une croix qui est portée par un M symbolisant que vers la fin du monde, la foi dans la rédemption de la croix ne tiendra que chez ceux qui auront la Vierge au centre de leur vie de prière.

 

Solution 1 : Une chose peut être indispensable de deux manières : 1. D’une manière absolue au point qu’on ne peut rester croyant sans l’avoir. En ce sens, la Vierge Marie ne sera cas indispensable à la fin du monde mais seulement l’esprit intérieur dont elle a vécu jusque dans l’attente du sépulcre où tout semblait perdu. 2. D’une manière relative, en tant qu’elle permet de mieux réaliser la fin désirée. De cette manière, on peut dire que des ailes sont utiles pour monter vite. Pris en ce sens, la Vierge Marie sera indispensable puisqu’elle enseignera aux chrétiens à vivre de cet esprit de foi dont elle a elle-même vécu. Elle représentera un moyen surajouté par la miséricorde de Jésus pour ceux qu’il a choisis pour vivre dans la compassion ces dernières heures du monde.

Solution 2 : Vers la fin du monde, lorsque le temps sera compté, le Seigneur demandera à la Vierge de préparer une Église sainte et immaculée à son image. Quant à la Vierge, elle ne recevra pas un culte finalisé par elle-même mais elle n’aura pas d’autre but que de conduire les hommes vers Jésus. C’est ce qu’exprime saint Louis-Marie : « Lorsque l’on crie Marie, elle répond Jésus ».[75]

 

Article 2 : La Vierge apparaîtra-t-elle aux hommes ?

Objection 1 : Cela ne semble pas. Si elle apparaît aux hommes, elle supprimera la foi puisque tous auront vu la vérité du message évangélique. Or la vertu de foi est nécessaire au salut à cause de l’humilité qu’elle entretient dans le cœur de l’homme.

Objection 2 : Le signe donné par l’apocalypse au chapitre 12 doit être pris au sens symbolique puisqu’il peut signifier plusieurs choses comme l’Église, Israël, et l’âme des saints. Donc il ne signifie pas que la Vierge apparaîtra réellement.

Objection 3 : D’après l’apocalypse, la femme est enceinte et crie dans les douleurs de l’enfantement. Or la Vierge Marie est déjà glorifiée. Elle ne peut donc souffrir, donc cette parole de l’apocalypse ne parle pas d’elle.

 

Cependant : L’apocalypse 12 annonce « un signe grandiose apparut dans le Ciel : une femme! Le soleil l’enveloppe, la lune est sous ses pieds et douze étoiles couronnent sa tête. Elle est enceinte et crie dans les douleurs de l’enfantement ». Et d’après les saints, ce signe est celui de l’Église, d’Israël et de la Vierge Marie. Donc la Vierge se rendra visible à la fin du monde. [76]

 

Conclusion : La Vierge a reçu au pied de la croix Jean pour fils. Et cette nouvelle maternité signifie qu’elle est rendue responsable de mener le disciple bien aimé par un enseignement intérieur vers le Christ et son apparition glorieuse. Saint Luc confirme cette profondeur de la Vierge puisqu’elle « gardait tous les enseignements de son fils dans son cœur ».[77] C’est pourquoi on doit affirmer que la mission de Marie est d’abord intérieure.

Cependant, les attaques du démon sur la foi surabondant, les grâces de Dieu surabonderont de la même façon. Et comme l’homme est un être sensible, il convient qu’il reçoive par des signes sensibles extérieurs, certaines révélations selon l’urgence des temps qu’il vit. C’est pourquoi il convient que la Vierge apparaisse vers la fin du monde, attirant ainsi l’attention des hommes vers la nécessité d’une conversion avant qu’il ne soit trop tard et que l’Antéchrist paraisse.

Cependant le signe de la femme revêtue du soleil, c’est-à-dire de l’amour de Dieu, quant à la lune sous ses pieds (ce qui signifie la pureté de son âme immaculée) et douze étoiles (ce qui signifie sa maternité sur l’Église), ne sera donné d’une façon glorieuse qu’au moment du retour du Christ dont il accompagnera l’apparition.

 

Solution 1 : Dans les temps qui précéderont la fin du monde, la Vierge n’apparaîtra pas à tous les hommes mais seulement à quelques-uns qui recevront la mission de proclamer au monde le contenu de ses paroles. Et elle accompagnera ses apparitions de certains signes et miracles suffisants pour manifester aux fidèles et à la hiérarchie ecclésiale la vérité de sa venue. Cependant, même chez ceux qui l’auront vu, La foi ne disparaîtra pas tout à fait puisqu’elles n’auront pas en même temps la vision de l’essence divine qui seule peut supprimer toute obscurité dans l’intelligence.

Solution 2 : Il est vrai que les signes annoncés par l’apocalypse ont un sens symbolique. Cependant, rien n’empêche que Dieu les donne matériellement aux hommes vers la fin du monde afin de marquer leur imagination et de mieux les convaincre de la proximité de l’épreuve. C’est ce qu’on voit dans l’apparition de la rue du Bac à sainte Catherine en 1830 et où la Vierge donna sur une médaille le signe annoncé par l’apocalypse.

Solution 3 : Les douleurs se l’enfantement ne signifient pas que la Vierge souffre mais qu’elle a reçu mission de conduire l’Église dans l’enfantement qui l’introduira tout entière dans la gloire de l’autre monde.

 

Article 3 : Y aura-t-il des apparitions d’anges ?

Objection 1 : L’ange de l’apocalypse est présenté comme « debout sur le soleil »[78] ou encore « avec le pied droit sur la mer, le gauche sur la terre ».[79] Et il est évident que ces textes ont un sens symbolique. Ils veulent simplement montrer que les décisions viennent de Dieu qui est comme le soleil et qu’elles concernent le monde entier symbolisé par la terre et la mer. Donc il n’y aura donc pas d’apparitions d’anges.

Objection 2 : L’ange est une créature spirituelle. S’il apparaît, ce ne peut être qu’en se façonnant une apparence de corps. Or ce qui est une apparence n’est pas la vérité. Il ne convient donc pas que des anges apparaissent à la fin du monde.

 

Cependant : L’apocalypse annonce[80] : « L’ange que j’avais vu, debout sur la mer et sur la terre, leva la main droite au Ciel et jura par celui qui vit dans les siècles des siècles » « Plus de délai! Mais aux jours où l’on entendra le septième ange, quand il sonnera de la trompette alors sera consommé le mystère de Dieu ». Donc il y aura des apparitions d’anges.

 

Conclusion : Si l’on regarde attentivement les textes de l’apocalypse, on doit admettre que leur sens est d’abord symbolique[81]. Ils signifient sous un mode allégorique l’ordre des décisions de Dieu concernant l’humanité. Cependant, comme on l’a vu, Dieu rend parfois visible d’une façon matérielle de telles décisions. Ainsi il n’est pas indispensable qu’avant la fin du monde il y ait de réelles apparitions d’anges. Car ces anges, dont le nom signifie « missionnaires » peuvent signifier l’envoi de prophètes humains dont la parole puissante rappellera à l’humanité la proximité de la fin du monde, puisque, au sens étymologique, le mot ange signifie envoyé de Dieu.[82]

 

Solution 1 : Et cela répond à la première objection. Cependant on doit dire que l’ange de l’apocalypse est déjà venu sur la terre et a parlé par la bouche d’un grand prophète canonisé par l’Église, saint Vincent Ferrier. Ce dernier annonça qu’il était cet ange que saint Jean vit voler par le milieu du Ciel, criant à haute voix « peuples, craignez le Seigneur et rendez-lui gloire, parce que le jour du jugement approche ». Et ce saint confirma la vérité de ses paroles en ressuscitant un mort et en faisant bien d’autres miracles. C’est pourquoi l’Église en le canonisant au XVème siècle, lui a donné le titre d’ « ange de Dieu ». Saint Vincent Ferrier annonça la venue après lui d’autres envoyés qui parleront de la fin du monde.

Solution 2 : Lorsque les anges se rendent visibles, ils ne veulent pas faire croire aux hommes qu’ils ont un corps qui leur est personnel mais ils veulent adapter leur langage à l’homme en manifestant par des signes sensibles le contenu de leur message. C’est pourquoi l’Écriture montre de nombreuses apparitions d’anges. Ainsi le deuxième livre des Macchabées[83] raconte qu’au cours d’un combat « les ennemis virent apparaître cinq hommes magnifiques qui se mirent à la tête des Juifs et les adversaires, bouleversés par l’éblouissement se dispersèrent dans le plus grand désordre ». De même, avant la fin du monde, il pourra y avoir des signes semblables. Mais de tels miracles, s’ils ont lieu, ne suffiront pas à retourner le cœur des incrédules qui sauront trouver des explications naturelles au phénomène. Par contre, si l’on regarde l’apparition des anges selon le premier sens que prennent tous les textes eschatologiques, c’est-à-dire l’heure de la mort individuelle, alors on doit dire que tous les hommes auront une apparition d’ange. En effet, dans la mort, le Christ est précédé ou suivi par l’ange de la mort comme nous l’avons montré (question 15°.

 

Article 4 : Deux témoins doivent-ils venir vers la fin du monde ?[84]

Objection 1 : Il semble difficile d’affirmer que deux témoins viendront à la fin du monde. En effet, le texte de l’apocalypse dont on parle est allégorique. On doit donc dire qu’il s’agit d’une image représentant un témoignage spirituel de l’Église.

Objection 2 : Les deux témoins ne peuvent signifier l’Église et l’islam puisque ces deux religions sont par essence en opposition à cause de leur foi différente sur le mystère du Christ.

Objection 3 : Les deux témoins semblent être l’Église et Israël et non l’Église et l’islam. C’est ce que suggère le texte de saint Paul qui parle de l’olivier franc et de l’olivier sauvage[85].

 

Cependant : L’apocalypse[86] annonce la venue de deux témoins qui prophétiseront avant d’être mis à mort puis de ressusciter.

 

Conclusion : Traditionnellement, on considère que les deux témoins qui doivent venir à la fin des temps sont Énoch et Élie, les deux hommes justes dont l’Écriture raconte qu’ils ne moururent pas mais turent enlevés au Ciel. Énoch fut le septième patriarche après Adam[87] : « Énoch marcha avec Dieu, puis il disparut car Dieu l’enleva ». Quant à Élie, il disparut dans un char de feu sous les yeux du prophète Elisée[88]. Certains théologiens juifs et chrétiens pensèrent donc que ces deux prophètes attendaient dans le paradis terrestre et devaient revenir à la fin du monde annoncer la venue ou le retour du Christ. Cependant, si l’on regarde les Écritures, on doit parler autrement. En effet, le Seigneur affirme que le prophète Élie qui devait revenir n’était autre que Jean-Baptiste, le fils d’Elisabeth[89]. Il ne peut donc s’agir matériellement de cet Élie qui a vécu au temps de la reine Jézabel, mais il s agit plutôt d’un homme revêtu de l’esprit d’Élie, c’est-à-dire de sa spiritualité.

Il en sera donc de même à la fin du monde. Et pour connaître ce que peuvent représenter les spiritualités d’Énoch et d’Élie, il suffit de regarder leur vie. Ainsi Énoch représente la fidélité intérieure puisqu’il marcha avec Dieu. Il est l’esprit de l’amour de Dieu. Quant à Élie, il est remarquable par le zèle qui le brûlait à l’égard du Seigneur. Il n’hésita pas à faire cesser toute pluie durant son ministère pour conduire les hommes à la conversion. De même, il leur prouva la vanité du Dieu Baal en ridiculisant ses prophètes par un défi où le vrai Dieu devait répondre. Il fit mettre à mort les serviteurs de Baal. L’esprit d’Élie est donc celui de l’intransigeance de la foi, celui de la fidélité extérieure au Seigneur. Et Jean-Baptiste, qui n’hésita pas à reprocher au roi Hérode son péché avec la femme de son frère jusqu’à en perdre la vie fut réellement rempli de ce zèle de l’honneur de Dieu. [90]

Ainsi, les deux témoins qui doivent venir à la fin du monde pour témoigner extérieurement de Dieu peuvent représenter en un sens spirituel, la vie contemplative qui est l’esprit d’Énoch et la vie apostolique qui vit du zèle d’Élie. Pris en ce sens, Énoch et Élie doivent être considérés comme présents à chaque époque à travers les moines et les apôtres.

Selon une autre interprétation, si l’on suit le texte de l’apocalypse, ils sont les deux oliviers, c’est-à-dire selon sont Paul l’Église et Israël d’un côté, qui ne formeront qu’un seul olivier à la fin du monde lorsque Israël se convertira au Christ, et l’islam de l’autre. Ainsi, vers la fin du monde, l’Église du Christ sera aux yeux du monde témoin de l’amour de Dieu tandis que l’islam proclamera avec l’intransigeance de sa foi le Dieu unique et leur témoignage uni sera pour le monde insupportable. C’est pourquoi l’apocalypse parle de la guerre que leur fera le démon, jusqu’à les détruire.

Une troisième interprétation n’est pas exclue : Celle qui pense que les deux témoins seront deux prophètes suscités par Dieu à la fin du monde et dont l’efficacité apostolique sera immense à cause des nombreux charismes dont ils seront revêtus. Ces deux hommes, revêtus avec puissance de la confiance d’Énoch et du zèle d’Élie, ramèneront à Dieu de nombreux hommes. [91]

Pour confirmer ce double témoignage d’un envoyé de l’amour chrétien et du zèle musulman, on peut trouver dans les enseignements de l’islam une théologie analogue concernant les signes de la fin du monde à propos du « Mahdi ».[92] Le Mahdi est évoqué dans des hadiths authentiques. Le Prophète a annoncé l’apparition d’un homme parmi sa communauté. Le Mahdi (le bien guidé) répandra la justice sur toute la terre qu’il trouvera dominée par le despotisme et l’injustice. Le Prophète a affirmé que son nom correspondra au sien et que le nom de son père correspondra à celui du père du Prophète. Il sera de la tribu de Quraich. Il restera sur terre sept ans. Dieu le fera intègre et vertueux car il est bien guidé. En son époque apparaîtra l’imposteur, l’Antéchrist. C’est le Mahdi qui sera l’imam (guide de la prière). Il vivra à l’époque où descendra Jésus, tous deux s’activeront pour réparer ce qui a été détruit et remettre cette communauté, qui s’est éloignée des prescriptions islamiques, sur le droit chemin.

 

Solution 1 : Le texte de l’apocalypse n’est pas d’abord à prendre au sens matériel. Ainsi, que la mission des deux témoins doive durer 1060 jours, c’est-à-dire trois ans et demi, cela signifie qu’ils auront la même mission que le Christ dont la prédication a duré trois ans et demi ; De même, que leurs cadavres doivent rester sans vie trois jours et demi signifie qu’ils vivront la même passion que le Christ puis ressusciteront comme lui. Cependant, le sens spirituel de ces textes n’exclut pas forcément une certaine littéralité. Il est donc possible que les deux témoins représentent l’Église et Israël ou encore l’Église et l’islam qui subiront comme nous l’avons dit, les attaques de l’Antéchrist à la fin au monde ; Ils peuvent aussi représenter deux hommes aussi réels que Jean Baptiste lors de la première venue du Christ. Et la raison de cette multiplicité des sens de ces textes vient de Dieu qui peut manifester aux hommes le même mystère de multiples manières.

Solution 2 : Vers la fin du monde, lorsque l’Antéchrist commencera ses attaques contre Dieu, les divisions et les oppositions entre le christianisme et l’islam paraîtront moins importantes devant la gravité du danger. Aussi, il est probable qu’il y aura un rapprochement entre tous les adorateurs de Dieu qui donneront ainsi un seul témoignage.

Solution 3 : En un certain sens, les deux témoins peuvent représenter l’Église et Israël. C’est ainsi que durant des siècles, dans les nations chrétiennes où habitait une partie du peuple d’Israël en en exil, Dieu fut adoré par ces deux religions.

Cependant, vers la fin du monde, lorsque Israël adhérera à la foi au Christ, il ne fera qu’un avec l’Église. Le monde n’aura donc plus que deux religions issues d’Abraham et ces deux religions témoigneront devant l’Antéchrist.

 

 

QUESTION 32 : L’Antéchrist[93]

 

Selon saint Paul, il faut tenir comme une certitude que le retour du Christ sera précédé par la venue de l’Antéchrist[94] : « Je vous en supplie, mes frères, que personne ne se laisse troubler comme si le jour du Seigneur était près d’arriver. Car le Fils de Dieu ne descendra pas une seconde fois qu’on n’ait vu paraître l’Homme de péché, le fils de perdition, celui qui doit se déclarer l’adversaire, s’élever au-dessus de tout ce qui est appeler Dieu ou qui est adoré, jusqu’à s’asseoir dans le temple de Dieu, s’y montrant comme s’il était Dieu ».

 

A propos de l’Antéchrist, il faut étudier :

1 : Pourquoi Dieu permettra-t-il ce mal avant le retour du Christ ?

2 : Qu’est-ce que l’esprit de l’Antéchrist dont parle saint Jean ?

3 : L’Antéchrist sera-t-il un homme ou un démon fait homme ?

4 : Qu’est ce que le chiffre de la Bête ?

5 : Peut-on savoir quelle sera l’idéologie de l’Antéchrist ?

6 : Peut-on savoir quelle sera l’œuvre de l’Antéchrist ?

 

Article 1 : Pourquoi Dieu permettra-il ce mal avant la venue du Christ ?

 

Relire la Question 26, article 3

 

Article 2 : Qu’est ce que l’esprit de l’Antéchrist dont parle saint Jean ?

Objection 1 : Il semble que l’esprit de l’Antéchrist n’est pas l’amour de soi poussé jusqu’au mépris de Dieu. En effet, saint Jean montre qu’il est un esprit qui s’oppose à la foi dans l’incarnation du Christ[95].

Objection 2 : D’après saint Jean, l’Antéchrist est un homme qui doit venir[96]. Il semble qu’il sera animé par un démon qui inspirera tous ses actes. Donc l’esprit de l’Antéchrist est Lucifer lui-même.

Objection 3 : Dans l’ordre, la hiérarchie des valeurs morales du christianisme sont 1° la charité (α et Ω de la loi), 2° l’humilité (fondement et effet de la charité), 3° la vertu (observation des commandements). Donc, au sans moral, l’esprit de l’Antéchrist n’est réductible à l’amour de soi poussé jusqu’au mépris de Dieu.

 

Cependant : Saint Jean écrit : « À ceci reconnaissez l’esprit de Dieu : tout esprit qui confesse Jésus-Christ venu dans la chair est de Dieu et tout esprit qui ne confesse pas Jésus n’est pas de Dieu. C’est là l’esprit de l’Antéchrist ».

 

Conclusion : Comme son nom l’indique, l’esprit de l’Antéchrist est l’inverse de l’esprit du Christ. Comme le Christ est l’image de la sagesse de Dieu, on peut déduire que l’esprit de l’Antéchrist s’oppose directement à la sagesse de Dieu dans ce qu’elle a d’essentiel.

Il faut donc chercher à savoir quelle est la valeur première de la sagesse de Dieu. Comme nous l’avons montré, Dieu a créé les êtres spirituels en vue de les introduire dans la vision de son essence. Mais cette béatitude suprême ne peut être communiquée qu’à ceux qui l’aiment. Parce que Dieu est amour, sans aucun mélange d’égoïsme, il désire créer un monde où, unis à lui par l’amour d’amitié, tous les hommes s’aiment au point de former une communion de saints. C’est pourquoi la sagesse de Dieu considère la charité et ses deux commandements, comme la plus haute vertu. C’est ce qu’exprime saint Augustin lorsqu’il dit qu’être dans la cité de Dieu, c’est aimer Dieu jusqu’au mépris de soi.

En conséquence, on peut dire que l’esprit de l’Antéchrist consiste dans l’opposé de cet amour oblatif : c’est « l’amour de soi poussé jusqu’au mépris de Dieu et du prochain ».[97] Il s’agit donc d’une révolte contre l’ordre de Dieu. Son premier effet s’appelle l’orgueil (l’exaltation de sa propre volonté comme source du bien et du mal) de même que la disposition comme le premier effet de la charité est son contraire, l’humilité. Cet esprit de révolte s’est manifesté dès le commencement de la création, quand une partie des esprits angéliques se détourna de Dieu, refusant de servir comme le Seigneur le leur avait demandé, et s’exaltant en eux-mêmes à cause de l’amour excessif de leur dignité. C’est pourquoi l’on peut dire que l’esprit de l’Antéchrist trouve son origine première dans l’orgueil luciférien, symbolisé dans l’apocalypse par le dragon[98].

Dans l’humanité, l’esprit de l’Antéchrist qui s’oppose à la charité est symbolisé la première fois par l’arbre de la connaissance du bien et du mal parce qu’Adam et Ève, à cause d’un amour désordonné d’eux-mêmes, refusèrent de se soumettre aux commandements de Dieu mais se donnèrent à eux-mêmes une morale d’où la charité était exclue. L’orgueil humain est symbolisé dans l’apocalypse[99] par la bête de la mer avec sept têtes et dix cornes. L’une des têtes, blessée à mort, et qui avait été guérie, symbolise cet orgueil qui est vaincu sans cesse par la faiblesse de la condition humaine mais renaît malgré tout sans cesse. Les autres têtes sont les six autres péchés capitaux par lesquelles les hommes cherchent leur bien individuel : la gourmandise (au sens d’une convoitise de nourriture pour sa survie individuelle), l’avarice, la luxure, l’envie, la paresse, la colère. Ainsi, on peut dire que l’esprit de l’Antéchrist qui est l’amour égoïste de soi est source de tous les péchés intérieurs qui sont dans le monde (les sept têtes), et de tous les actes extérieurs mauvais (les dix cornes).

 

Solution 1 : Puisque l’esprit de l’Antéchrist est l’opposé de la charité, il lutte contre tout ce qui conduit à la charité et il essaye de construire tout ce qui va dans le sens de l’amour de soi et de l’orgueil. C’est pourquoi les orgueilleux rejettent le Christ et sont prêts à nier sa mission, même si elle leur est démontrée par les miracles les plus éclatants. Lors du jugement dernier, l’esprit de l’Antéchrist sera donc manifesté à tous par ce péché dont parle saint Jean ou par tout autre blasphème contre le Saint Esprit.

Solution 2 : Au sens moral, on peut dire que l’esprit de l’Antéchrist est Lucifer. En effet, comme nous l’avons montré, l’Ange révolté est celui qui inspire à tout homme la révolte contre Dieu et l’amour de soi. Cependant, au sens ontologique, Lucifer ne peut être l’esprit de l’Antéchrist puisque il est, quant à son être, créé car Dieu et bon. Seul son choix a fait de lui un ange révolté. Il est donc plus correct de parler de la spiritualité de l’Antéchrist. En ce sens, elle vient de Satan et lui est commune avec les hommes pervertis. [100]

Solution 3 : Ces trois valeurs morales sont résumée dans une seule : la charité. De même, l’esprit de l’Antéchrist qui au cours des temps s’est incarné dans des milliers de nuances, depuis les simples convoitises aux idéologies les plus sophistiquées comme celle de Freud, Sartre, peut se résumer en son fondement selon Augustin : l’amour de soi poussé jusqu’au mépris de Dieu et des autres.

A l’argument Cependant : On peut répondre : le vrai Dieu, celui de Jésus Christ est, au plan de ses attributs intérieurs, amour, humilité et perfection. Celui donc qui rejette Jésus Christ, en sachant pleinement cela, ne peut le faire qu’à cause d’une contradiction interne qu’il trouve en lui. Mais attention : le rejet de Jésus Christ connu superficiellement ou à travers les péchés des chrétiens peut être un signe que la personne est disposée à vivre du véritable esprit du Christ. On raconte qu’avant d’être exécuté, l’empereur inca Atahualpa se vit proposer le baptême par l’aumônier. Il le refusa en disant que si le paradis était dirigé par Jésus Christ, dieu de ces guerriers adorateurs de l’or, il préférait aller en enfer avec ses idoles[101]. Donc, au moins avant l’apparition glorieuse du Christ qui supprimera l’erreur, ce texte doit être interprété non selon la lettre mais selon l’esprit.

Article 3 : L’Antéchrist sera t-il un homme ou un démon fait homme ?

Objection 1 : Il semble que l’Antéchrist sera plutôt un homme qu’un démon. La Vierge annonce dans son apparition de la Salette qu’il naîtra de l’union d’une fausse religieuse juive et d’un évêque.

Objection 2 : Saint Jean affirme[102] : « C’est que beaucoup de séducteurs se sont rependus dans le monde, qui ne confessent pas Jésus venu dans la chair. Voilà bien le séducteur, l’Antéchrist ». Il semble que l’Antéchrist sera une secte et non un homme.

Objection 3 : Les textes qui parlent de l’Antéchrist semblent être des mythes signifiant par allégorie l’universalité des tyrans et des persécuteurs qui viendront dans le monde. Il s’agit donc non d’un homme mais de l’image collective de tous les impies et les hérésiarques qui combattent Dieu. [103]

 

Cependant : Saint Paul écrit aux Thessaloniciens[104] : « Auparavant doit venir l’apostasie et se révéler l’homme impie, l’Être perdu, l’Adversaire, celui qui s’élève au-dessus de tout ce qui porte le nom de Dieu ou reçoit un culte, allant jusqu’à s’asseoir en personne dans le sanctuaire de Dieu, se produisant lui-même comme Dieu ».

 

Conclusion : En suivant les textes prophétiques de l’Écriture sur l’Antéchrist, on doit admettre qu’il ne s’agit pas seulement d’une spiritualité, ni de Satan lui-même bien que l’apôtre montre que l’impiété est déjà à l’œuvre ; il ne s’agit pas seulement des nombreux faux prophètes qui sont venus[105] ; il s’agit en définitive d’un homme qui viendra à la fin du monde et résumera en lui avec perfection tout le mystère du péché : il prêchera une idéologie bien adaptée à l’orgueil humain dont l’inspiration viendra du démon et séduira des foules de ses serviteurs.

1° Quant à son intelligence, il adoptera l’esprit de l’opposition au Christ d’une manière parfaite et il saura enseigner cette doctrine avec logique et persuasion. Il s’opposera par son enseignement à tout ce qui est respectable et sacré[106] ». Il s’exaltera avec audace contre le Dieu des dieux et réputera comme néant le Dieu de ses pères ».

2° Quant à l’efficacité, il recevra en don de la part du démon le pouvoir d’accomplir toute sorte de prodiges séducteurs qui sembleront confirmer la vérité de ses dires. Certains Pères, s’appuyant sur le livre de l’apocalypse au chapitre 13 n’hésitent pas à affirmer qu’il ira jusqu’à s’élever dans les airs comme Siméon le Magicien et qu’il opérera une résurrection apparente. Il sera donc pour le monde d’une grande séduction, plus que tous les autres antéchrists venus précédemment. Saint Thomas affirme que, de même que la plénitude de la divinité habite corporellement dans le Verbe Incarné, ainsi la plénitude de tout mal habitera dans l’Antéchrist dont la mission et les oeuvres seront une copie inversée de la mission et des oeuvres de Jésus Christ.

La raison qui explique l’humanité charnelle de l’Antéchrist tient à ceci : la connaissance et l’action de l’homme étant liées au corps, il ne convient pas que ce qui le conduit à la connaissance et à l’action reste purement spirituel ou abstrait. C’est pourquoi le Verbe éternel de Dieu, voulant s’adresser parfaitement aux hommes, s’est fait chair. C’est pourquoi, à l’heure de la mort, la parole de Dieu et celle du démon seront données à travers des apparitions sensibles. C’est pourquoi aussi les antichristianismes, lorsqu’ils réussissent, s’incarnent toujours dans la personne d’un leader politique qui les prêche. Aussi en fut-il pour le racisme avec Hitler, Staline, Pol Pot.

Ceux qui tiennent l’opinion selon laquelle l’Antéchrist sera un démon fait homme ne doivent pas être suivis. En effet, Le démon n’a pas le pouvoir d’assumer une nature humaine au point de former un seul être avec elle, tel que le fit Dieu dans l’humanité du Christ. En effet, la puissance naturelle du démon n’est autre que celle de la nature angélique. Elle est donc limitée à certains effets secondaires mais ne peut atteindre la substance des réalités. Un tel pouvoir sur l’être des choses appartient par essence à Dieu qui est cause de l’être. En conséquence, le démon ne peut s’unir à un homme que de deux manières : 1- En assumant son corps à la manière d’un moteur extérieur, comme on le voit dans certaines possessions démoniaques. Mais dans ce cas, ce n’est pas vraiment l’homme qui agit. C’est le démon qui agit par l’intermédiaire des actes corporels du possédé. Il ne semble pas que cela puisse correspondre à l’Antéchrist qui agira de lui-même puisqu’il sera l’homme impie, selon saint Paul. 2- En coopérant avec l’homme par une union morale en vue d’une oeuvre commune. Et une telle unité qui est celle que l’on trouve dans les contrats de sorcellerie semble davantage convenir à la perversité de l’Antéchrist. Il semble donc qu’il sera un sorcier.

 

Solution 1 : Cette parole de l’apparition de la Salette peut être prise en divers sens selon que l’on regarde l’Antéchrist comme une spiritualité ou comme un homme : en tant que spiritualité, l’esprit de l’Antéchrist naîtra du judéo-christianisme. C’est ce que saint Jean signifie[107] : « il est sorti de chez nous ». Et la raison en est que la foi et la charité, qui mûrissent à l’extrême l’intelligence et le cœur de l’homme jusqu’à l’absolu du don de soi et de la vraie liberté adulte, s’ils sont rejetés, conduisent à l’inverse qui est l’absolu de l’amour de soi choisi librement. Et nous avons une image de cela dans le fait que tous les prophètes des athéismes contemporains étaient soit chrétiens soit juifs d’origine et étaient tous de culture occidentale judéo-chrétienne.

Cependant, si l’on regarde l’Antéchrist en tant qu’il sera un homme, on peut présumer qu’il singera jusque dans son origine la naissance du Christ qui a eu pour mère la Vierge immaculée. Ainsi on peut supposer par analogie que son adversaire déclaré, suscité par Satan, naîtra d’une union impure et sera le fruit d’une femme d’impudicité. « Il sera fils de la fornication » dit saint Jean Damascène[108].

Solution 2 : Comme nous l’avons montré, il viendra avant le dernier Antéchrist, d’autres antéchrists qui en seront les préfigurations. Mais, au fur et à mesure que l’humanité progresse, on constate que leur influence sur les hommes se fait de plus en plus profonde. Au commencement, tous les antéchrists ne visaient qu’une convoitise matérielle : plaisirs, conquêtes et richesses. Ils imposaient leur pouvoir aux corps ; puis ils devinrent des messianismes politiques c’est-à-dire que leur conquête visait à imposer le bonheur par une idéologie et une transformation de la nature humaine. Ils prétendaient s’imposer aux intelligences (voir les sept confessions politiques successivement mises en place à l’époque moderne). Vers la fin du monde, le dernier Antéchrist sera une religion, c’est-à-dire qu’il imposera jusqu’au fond des consciences l’adoration d’un nouveau dieu et d’une nouvelle espérance après la mort.

Solution 3 : Il est permis de lire dans un sens allégorique les textes concernant l’Antéchrist puisqu’ils sont universellement donnés pour les hommes de tous les temps qui auront à subir la violence injuste des tyrans. Cependant, le sens allégorique ne s’oppose pas à une lecture littérale du texte.[109]

 

 

Article 4 : Qu’est-ce que 666, le chiffre de la Bête ?

Objection 1 : Dans diverses langues, les chiffres peuvent se traduire en caractères alphabétiques, et réciproquement les lettres alphabétiques en caractères chiffrés. Il semble donc que le chiffre 666 signifie le nom de l’Antéchrist, dans une langue inconnue qu’on ne pourra discerner qu’au jour de sa venue.

Objection 1 : On a pu calculer que ce chiffre le nom du roi à l’époque où fut écrit l’apocalypse. Donc 666 signifie Néron qui est le symbole des persécuteurs impies.

 

Cependant : l’apocalypse écrit[110] : « Tous, petits et grands, se feront marquer sur la main droite et sur le front du nom de la Bête ou au chiffre de son nom. C’est ici qu’il faut avoir de la finesse! Que l’homme doue d’esprit calcule le chiffre de la Bête, c’est un chiffre d’homme : son chiffre, c’est 666 ».

 

Conclusion : La parole de Dieu est donnée à tous les hommes, de telle façon que son sens n’échappe pas complètement à ceux qui la lisent et s’en imprègnent. Il est donc impossible que son premier sens appartienne aux savants calculateurs. Il doit exister une signification plus simple et plus proche du commun des fidèles.

Dans l’Écriture, on voit que certains chiffres sont donnés avec une signification symbolique qui revient toujours. Ainsi, le chiffre trois signifie la plénitude de la divinité puisque Dieu est en trois personnes ; de même, le chiffre sept signifie la perfection de la création puisque le monde fut achevé le septième jour par le repos de Dieu qui dit que tout était très bon. C’est de cette manière qu’il faut regarder le chiffre de la Bête. Et plusieurs interprétations peuvent être données qui se rejoignent en une seule :

1° Dans l’Écriture Sainte, Dieu affirme sans cesse à l’homme qu’il lui a donné six jours pour travailler[111] : « Pendant six jours tu travailleras et feras tout ton ouvrage. Mais le septième jour est un sabbat pour Yahvé ton Dieu ». Ainsi, si l’homme oublie le septième jour qui est consacré à Dieu, il se marque lui-même de la marque du chiffre six qui signifie qu’il vit sans Dieu.

2° Dans la loi[112], Dieu commande aux maîtres qui s’achètent la main d’œuvre d’un esclave Hébreu, de le garder six années puis de le laisser aller libre la septième année sans qu’il doive rien payer. Si le maître n’agit pas ainsi la septième année, n’obéissant pas à la loi de Dieu, il se marque lui-même du chiffre six qui signifie l’homme sans Dieu.

3° Selon le philosophe Aristote, il existe sept axes par lesquels l’homme peut être étudié selon tout ce qu’il est. En effet, on peut connaître l’homme en tant 1° qu’il existe, par la métaphysique ; 2° qu’il possède une nature humaine et c’est la philosophie de la nature et de la vie ; 3° qu’il est capable de transformer l’univers et c’est la philosophie du travail ; 4° qu’il est capable de connaître ce qui existe et c’est la philosophie critique ; 5° qu’il peut être en rapport avec un autre homme et c’est la philosophie morale ; 6- qu’il vit en communauté et c’est la philosophie politique ; 7- qu’il dépend de l’Être Premier et c’est la théologie naturelle. Ainsi, celui qui supprime de la connaissance humaine le rapport avec Dieu, ne voulant étudier l’homme qu’en tant qu’il se possède lui-même, se marque du chiffre de la Bête qui est six.

En conclusion, on peut dire que le chiffre de la Bête signifie l’acte par lequel l’homme s’exalte contre Dieu. C’est pourquoi l’apocalypse l’appelle un chiffre d’homme. Et si le chiffre six est répété trois fois, c’est parce que l’Antéchrist réalisera un monde où l’homme vivra parfaitement, quoique séparé de Dieu. Il pensera avoir établi un ordre divin dans une humanité sans Dieu.

 

Solution 1 : Cette interprétation n’exclut pas d’autres lectures plus savantes du chiffre de la Bête. Il n’est donc pas exclu que la Bible qui est l’œuvre parfaite de la révélation de Dieu renferme d’une manière codée le nom des tyrans qui opprimeront le monde et principalement du dernier d’entre eux qui détruira provisoirement sur la terre le règne de Dieu.

Solution 2 : L’Empereur Néron est une image prophétique quoique imparfaite de l’Antéchrist qui viendra à la fin du monde. Il n’est donc pas exclu que son nom soit présent sous le chiffre de la Bête, de la même façon que la Bible a coutume de symboliser le monde en tant qu’il dépend du péché par des noms de lieux comme Babylone ou l’Égypte.

 

Article 5 : Peut-on savoir quelle sera l’idéologie de L’Antéchrist ?[113]

Objection 1 : Il ne se peut pas que l’Antéchrist conduise l’humanité non seulement à une apostasie des religions révélées mais aussi à un rejet explicite de Dieu et de ses volontés alors même que son existence sera reconnue. Ce serait un blasphème contre l’Esprit, et Dieu ne pourrait tolérer qu’une génération entière se damne.

Objection 2 : Il n’est pas possible que l’Antéchrist réussisse dans ses oeuvres et crée un monde sans Dieu, selon la signification de son chiffre. En effet, un tel monde est impossible à cause du cœur de l’homme qui est fait pour l’éternité.

Objection 3 : Il ne semble pas que l’Antéchrist sera détruit par le retour du Christ. En effet, l’apocalypse parle d’un temps de mille années pendant lequel l’humanité vivra en paix avec Dieu tandis que le démon sera provisoirement enchaîné en enfer, au point qu’il ne pourra plus fourvoyer les nations[114]. Le retour du Christ aura donc lieu ultérieurement, après ces milles années et non au temps de l’Antéchrist.

Objection 4 : Il est hors de sens d’imaginer, vers la fin du monde, une humanité unifiée autour du culte religieux de Lucifer. Le texte de saint Paul parle de l’esprit caché sous le dernier antichristianisme et non d’une adoration explicite.

 

Cependant : Les Écritures donnent certaines prophéties générales suffisantes pour avoir une certaine idée de l’idéologie de l’Antéchrist. Saint Paul écrit aux Thessaloniciens[115] : « Il s’élève au-dessus de tout ce qui porte le nom de Dieu ou reçoit un culte, allant jusqu’à s’asseoir en personne sur le trône de Dieu, se produisant lui-même comme Dieu ».

 

Conclusion : Si l’on suit l’Écriture, on doit affirmer que l’Antéchrist, à la fin du monde établira son projet insensé d’humanité sans Dieu. Car il s’agit bien là, selon les textes les plus explicites de l’Écriture, du projet de l’Antéchrist. Mais, pour mieux comprendre ce qui est présent à la racine de son idéologie, on doit considérer deux choses : 1° la finalité qu’il visera : étant au service de Lucifer, il cherchera en premier lieu non à construire mais à détruire le bien réel que sont l’humilité et l’amour ; 2° la manière dont il l’établira à la fin du monde. Pour établir fortement l’homme dans l’individualisme et l’orgueil, de telle façon qu’ils maintiennent ce choix à l’heure de la mort, il s’efforcera d’établir dès cette terre la grandeur du « mystère de l’iniquité », c’est-à-dire de la révolte de Lucifer. Il utilisera des moyens politiques et réalisera un nouvel ordre du monde[116].

1° Pour comprendre quel bien qu’il réussira à détruire, il faut se rappeler ce qui constitue la racine première de la révolte contre Dieu. C’est en effet en comprenant la cause originelle que l’on peut en saisir l’effet ultime dans l’humanité. La révolte est fondamentalement celle de Lucifer. Il est dit dans le livre de la Genèse[117] qu’il « rampe sur son ventre » en ce sens qu’il passe aujourd’hui son temps, aidé de l’armée des anges déchus, à tenter l’homme et la femme sur des péchés matériels. C’est un travail étrange pour des créatures purement spirituelles. Mais c’est aussi une oeuvre très intelligente car très adaptée à l’homme. Il éduque l’homme par où il est le plus accessible à l’apprentissage de l’amour égoïste de soi. Il s’efforce de l’entraîner là où il peut le mieux le saisir. Mais tout cela ne constitue qu’une première étape. Il espère qu’à l’heure de la mort, devenu individualiste, chaque homme le suivra dans le péché qui motive son action et qui n’a plus de rapport avec la chair, si ce n’est sa racine d’égoïsme et d‘orgueil exalté. La vraie révolte de Lucifer n’est pas le péché de la chair, la convoitise de l’argent ou de la vanité. Elle est un refus total, face à la parole de Dieu suffisamment manifestée, de son projet d’établir l’univers selon l’ordre de l’amour et de l’humilité. Lucifer désire un autre ordre, celui que donne l’intelligence et la puissance naturelle. C’est ainsi que, à l’heure de la fin, chaque homme reçoit de manière objective et face à sa liberté, la prédication par Satan du bien qui se trouve en enfer.

2° Quant à la manière dont Lucifer et de son serviteur l’Antéchrist établiront le système politique, vers la fin du monde, c’est à cette lumière qu’elle doit être comprise. De même qu’il fait tomber les individus dans les actes de l’égoïsme charnel dans le seul but du blasphème contre l’Esprit Saint, de même il s’efforce de conduire l’humanité dans divers péchés politiques pour en arriver, au terme, par étape, au rythme lent des générations humaines, à la révolter explicitement contre Dieu.

Concrètement, le dernier antichristianisme sera une religion, avec un dieu et une promesse de vie éternelle. Il instaurera sur terre le « mystère de l’iniquité », c’est-à-dire le motif premier et initial de toute révolte dans l’acte de Lucifer. On peut, en suivant les textes, décrire la prédication du dernier Antéchrist ainsi : « Arrivée à la plénitude du savoir et de l’expérience, l’heure est venue pour l’humanité d’adhérer à la sagesse qui peut la combler tout entière. Après des siècles d’errance, le monde est mûr pour se donner à la vraie religion, l’Évangile éternel voulu par le Créateur, celui qui libère l’homme de toutes ses peurs.

L’humanisme sans Dieu disait que la vie s’arrête avec la mort, plongeant l’humanité dans l’exclusive recherche du bonheur immédiat et dans la désespérance. Les faux Évangiles affirmaient que l’homme devait être un serviteur, humble et soumis aux autres. Le vrai affirme qu’il a été créé pour être un dieu. Il a été fait pour la liberté et la puissance, pas pour la dépendance. Il le peut dès ici-bas.

Cette vie n’est qu’un commencement. Après la mort, l’homme vit[118]. De l’autre côté du voile, il lui est proposé, pour l’éternité, liberté et dignité. Cela se réalise très concrètement par l’apparition du dieu suprême, « celui qui porte toute vraie lumière », Lucifer[119]. L’homme qui choisit la liberté, qui refuse librement la dépendance que lui propose le faux dieu[120], prolongera sa puissance dans l’autre monde pour l’éternité, dans la communion intellectuelle avec le projet grandiose de l’Ange de Lumière.

Ainsi pacifiée et maîtresse d’elle-même, l’humanité va enfin s’appartenir. Elle va se mettre debout. Libérée de l’angoisse du néant, en contact spirite avec l’autre monde, elle va connaître la pleine possession d’elle-même[121]. Rien ne lui sera plus impossible. L’humanité deviendra maîtresse de son destin, décidant elle-même ce qui est bien ou mal ».

Ce discours ressemble beaucoup à l’Évangile du Christ. On y parle même d’un Dieu, d’une vie après la mort. Il n’y a plus d’athéisme. Il est aisé de se laisser abuser, même en étant chrétien. Pourtant, le vrai créateur est humble et aimant, jusqu’à la mort et la mort sur une croix.

Il semble que c’est ainsi que parlera le dernier Antéchrist à la fin du monde, conduisant l’humanité à certains comportements ultimes et limites. Ces événements, terribles au plan spirituel, ressembleront fortement au blasphème contre l’Esprit Saint tel que nous l’avons défini. Pourtant, il ne faut pas confondre. Une apparence de blasphème contre l’Esprit n’est pas nécessairement sa réalité. Il peut arriver qu’un groupe d’homme se mette à rejeter Dieu tout en sachant qu’il existe, mais sans savoir ce qu’il fait vraiment, à cause de l’entraînement d’une folie collective [122]: “ Père, pardonne leur, ils ne savent pas ce qu’ils font ”, disait Jésus à propos de ce peuple qui avait vu ses miracles, l’acclamait quelques jours plus tôt avant de rire devant sa mort. C’est pourquoi, même lorsque ces événements arriveront, il ne faudra pas douter de la puissance de Dieu qui ne permet le mal que pour un bien supérieur, lié au salut éternel du plus grand nombre.

 

Solution 1 : La lettre des Ecriture oblige à affirmer que Dieu permettra cela. L’observation des comportements humains dans les sociétés occidentales au XXème siècle donne une certaine idée de ce que sera l’orgueil collectif de la fin. Une humanité attachée à sa liberté au nom de ses plaisirs égoïstes peut aller jusqu’à rejeter l’idée même de Dieu, alors même qu’elle en connaît l’existence. Jésus disait [123]: « Même si un mort ressuscitait, ils ne croiraient pas ». Ils ne croient pas parce qu’il leur est pénible de croire et d’en tirer les conséquences morales. Mieux vaut ne pas se poser de questions plutôt que de perdre la liberté de profiter du quotidien. Il en sera de même à la fin du monde. Pour l’illustrer, on peut se rappeler les évènements de Fatima. En 1917, cent mille portugais virent le soleil danser, comme l’avait annoncer la Vierge. Le reste de l’Europe, en guerre, ne considéra pas le phénomène, d’avance considéré comme impossible. De même, à la fin du monde, il est possible que l’humanité dans son ensemble accepte intellectuellement la réalité de l’existence d’un Créateur et d’un jugement dernier, mais prenne volontairement la résolution de lutter contre. En tout état de cause, la voie d’un aveuglement volontaire entretenu par ses élites est un phénomène sociologique possible.

Solution 2 : Selon saint Paul[124], la persécution ultime perpétrée par l’Antéchrist sera permise par Dieu « parce que les hommes n’ont pas reçu l’amour de la vérité pour être sauvés. En punition, Dieu leur enverra un esprit qui donnera l’efficacité à l’erreur, en sorte qu’ils croiront à l’erreur, afin que tous ceux qui n’ont pas cru à la vérité, mais qui se sont plus dans l’injustice, soient condamnés ». Ce texte doit être interprété comme suit : « en punition », c’est-à-dire par mode d’éducation. « Il leur enverra un esprit de sorte qu’ils croiront à l’erreur », en ce sens qu’ils vivront jusqu’à l’absurde de la logique de leur péché, collés au temps présents, incapable de discerner la destruction à long terme qui sort toujours de l’amour égoïste. Ils recevront dès cette terre le salaire de leur péché sous la forme des diverses souffrances et angoisses qui en sont le salaire naturel. Ainsi, celui qui se croit immortel dans sa jeunesse souffre davantage quand arrive la vieillesse ; celui qui construit sa vie sur les plaisirs immédiats demande la mort quand il ne peut plus jouir. Ils vivront jusqu’à leur mort l’absence de Dieu dans les misères spirituelle, jusqu’à qu’il révèle sa vérité et son amour et leur propose son pardon. Alors beaucoup se tourneront vers lui, dans la confusion, mais avec beaucoup d’amour puisqu’ils auront été beaucoup pardonnés.

En outre l’Antéchrist est destiné à faire ressortir et à manifester avec éclat la fidélité et la constance de ceux dont les noms sont écrits dans le livre de vie et que toutes ses violences et ses artifices n’auront pu parvenir à ébranler. En tout cela, l’homme ne sera pas tenté plus qu’il ne peut en supporter car la grâce de Dieu sera donnée en abondance à cette époque. On doit aussi affirmer que tout cela aboutira en une victoire finale, jusque dans la politique, de Dieu grâce à la Parousie du Christ.

Solution 3 : Selon saint Augustin, les mille années ont un sens symbolique et ne doivent pas être prises au sens matériel comme un temps qui suivrait la venue de l’Antéchrist. Elles signifient que, quoiqu’il arrive dans le monde par la faute du démon, il s’agit avant tout d’une volonté de Dieu qui prépare ainsi dans l’épreuve la charité des fidèles, en vue de leur bonheur éternel. Cela est important pour l’espérance des fidèles qui vivront ces moments difficiles. Comme la Vierge Marie, ils devront vivre de l’espérance certaine de la résurrection finale.

Solution 4 : Tout cela ne peut se faire que par étape, au fur et à mesure du renouvellement des générations. L’histoire moderne révèle d’ailleurs sans cesse de nouveaux antichristianismes que la génération précédente ne pouvait pas imaginer. Ainsi, les soldats de la grande guerre auraient-ils imaginé que leurs petits enfants avorteraient, au nom du bonheur adulte, un enfant à naître sur quatre ? En y regardant de plus près, on remarque que l’histoire des antichristianismes, commencée avec l’orgueil de la chrétienté du XIIIème siècle, suit une certaine logique de progressivité. Ils ont d’abord corrompu la place de la charité et de l’humilité comme fondement de la vie chrétienne (hérésies rigoristes ou piétistes, culte de la puissance des l’Eglises etc.). Une fois le vrai évangile dénaturé ou discrédité par ses guerres, les antichristianismes devinrent des évangiles politiques (capitalisme, marxisme, nationalisme, nazisme, consumérisme, hédonisme, société des loisirs). Rien n’empêche donc que dans les générations à venir, « ce qui le retient ayant été enlevé [125]», la place laissée vide par les anciennes religions laisse un vide que viendra remplir la religion de l’Antéchrist.

 

Article 6 : Peut-on savoir quelle sera l’œuvre de l’Antéchrist ?

Objection 1 : Il s’agit de regarder maintenant non plus l’esprit de l’Antéchrist, mais les œuvres de puissance qu’il réalisera pour séduire les hommes. Il ne semble pas qu’il fera disparaître les guerres, les famines et les maladies. Le livre de l’apocalypse montre que ces fléaux sont envoyés par Dieu pour éviter à l’homme un mal pire : l’orgueil et sa conséquence, la damnation éternelle. Dieu qui veut le salut de tous ne pourra permettre que de tels remèdes disparaissent.

Objection 2 : De même, il ne pourra réaliser l’unification de l’humanité, la disparition des nations, des langues. Cette division vient de Dieu et date du début de l’humanité, à la tour de Babel[126] : « Allons! Descendons et confondons leur langage pour qu’ils ne s’entendent plus les uns les autres ». Il empêcha ainsi que l’humanité ne se prenne pour Dieu, dans sa puissance. Puisqu’il s’agit du salut éternel, Dieu divisera de nouveau les hommes et ne laissera pas l’Antéchrist réussir.

Objection 3 : Dieu ne permettra pas qu’il fasse disparaître toutes les religions.

Objection 4 : C’est a fortiori vrai pour la maîtrise de l’arbre de vie : « Dieu posta devant le jardin d’Eden les chérubins et la flamme de leur glaive fulgurant pour garder le chemin de l’arbre de vie ». Si l’homme trouvait le moyen de rendre éternelle sa vie sur la terre, loin de Dieu, une telle permission de Dieu dépasserait l’entendement.

Objection 5 : Il n’est pas crédible qu’à la fin, le dernier Antéchrist révèle de manière explicite l‘existence de Satan et le projet de révolte universelle de l’humanité à sa suite contre Dieu et le mystère de la charité. Il sera un homme intelligent. Il comprendra que les hommes, une fois éclairés, rejèteront une telle révolte comme suicidaire.

Objection 6 : Selon l’apocalypse[127], l’Antéchrist ne réussira pas dans ses oeuvres : « Les rois de la terre se mettront tous d’accord pour remettre à la Bête leur puissance et leur pouvoir. Ils mèneront campagne contre l’Agneau mais l’Agneau les vaincra ».

Objection 7 : Au cours de l’histoire, les divers antéchrists ont eu en commun de manifester un grand mépris pour la vie humaine. Ils tuèrent des hommes par tous les moyens possibles, depuis la guerre jusqu’aux actes qualifiés de libératoires de la souffrance comme l’avortement, l’euthanasie ou le suicide. Il semble donc que l’Antéchrist final, pour montrer à Dieu le peu de valeur de l’humanité, la conduira à s’autodétruire dans une dernière guerre mondiale.

 

Cependant : Le texte de saint Paul aux Théssaloniciens[128] manifeste avec d’autre la réussite de l’Antéchrist, mais sa réussite éphémère : « Dès maintenant oui, le mystère de l’impiété est à l’œuvre. Mais que seulement celui qui le retient soit d’abord écarté. Alors l’Impie se révèlera. Le Seigneur le fera disparaître par le souffle de sa bouche, l’anéantira par la manifestation de sa Venue. Sa venue à lui, l’Impie, aura été marquée par l’influence de Satan, de toute espèce d’œuvres de puissances, de signes et de prodiges mensongers, comme de toutes les tromperies du mal ».

L’Antéchrist réussira car Dieu le laissera réussir. Pour comprendre son oeuvre, Jésus invite à se référer aux prophéties de Daniel[129]. Voici les trois principales : “ Quatre royaumes viendront qui n'auront pas la force du précédent. Et, au terme de leur règne, au temps de la plénitude de leurs péchés, se lèvera un roi au visage fier, sachant pénétrer les énigmes. Sa puissance croîtra en force (non en raison de sa propre puissance), il tramera des choses inouïes, il prospérera dans ses entreprises, il détruira des puissants et le peuple des saints. Et, par son intelligence, la trahison réussira entre ses mains. Il s'exaltera en son cœur et détruira un grand nombre par surprise. Il s'opposera au Prince des princes (le Christ) mais, sans acte de main, il sera brisé. Elle est vraie la vision qui a été dite. ”[130]

“ (...). Et après soixante-deux semaines, un messie sera supprimé, et il n’y a plus pour lui (de place). La ville et le sanctuaire seront détruits par un prince qui viendra. Sa fin sera dans le cataclysme et, jusqu'à la fin, la guerre et les désastres décrétés. Et il consolidera une alliance avec un grand nombre. Le temps d'une semaine ; Et le temps d'une demi-semaine, il fera cesser le sacrifice perpétuel et l'oblation et sur l'aile du temple sera l'abomination de la désolation jusqu’à la fin, jusqu’au terme assigné pour le désolateur. ”[131].

“ Je regardais, moi Daniel, et voici : deux anges se tenaient debout, de part et d'autre du fleuve. L'un dit à l’homme vêtu de lin (le Christ) qui était en amont du fleuve : quand se produiront ces choses inouïes ? J'entendis l'homme vêtu de lin, qui se tenait en amont du fleuve : il leva la main droite et la main gauche vers le Ciel et attesta par l'Eternel Vivant : “ pour un temps, des temps et un demi-temps, et toutes ces choses s'achèveront quand sera achevé l’écrasement de la force du Peuple Saint. ” J'écoutais sans comprendre ; puis je dis : Mon Seigneur, quel sera cet achèvement ? Il dit : Va, Daniel ; ces paroles sont écrites et scellées jusqu'au temps de la Fin ; Beaucoup seront lavés, blanchis et purifiés ; les méchants feront le mal, les méchants ne comprendront point ; les savants comprendront. À compter du moment où sera aboli le sacrifice perpétuel et posée l'abomination de la désolation : 1290 jours. Heureux qui tiendra et atteindra 1335 jours. Pour toi, va, prend ton repos ; et tu lèveras pour ta part à la fin des jours. ” [132]

 

Conclusion : Les textes de l’Écriture révèlent que l’Antéchrist, par des manœuvres diverses, sera efficace. À la fin du monde établira son projet insensé d’humanité séparée du vrai Dieu humble et amour et debout face au faux dieu libre et orgueilleux. Il pourra être reconnu comme le dernier Antéchrist par le fait qu’il réalisera de manière mondiale ce projet désiré par nombres d’hommes avant lui.

Voulant établir la puissance de l’égoïsme et de l’orgueil, ces deux valeurs essentielles dans le service de la révolte du démon caché sous cette lutte, il saura agir pour proposer aux hommes la réalisation concrète de l’humanité égoïste, orgueilleuse et sans Dieu. Pour comprendre son œuvre, il faut se demander jusqu’où il est possible de réaliser un monde sans Dieu et sans véritable amour, de telle manière que les hommes s’y complaisent au moins dans la partie sensible de leur être.

En regardant l’histoire de l’humanité, on peut discerner diverses étapes dans la réalisation de l’œuvre des antéchrists. De même que l’égoïsme et l’orgueil d’un enfant ne sont pas les mêmes que celui d’un homme libre arrivé à la plénitude de la maîtrise de soi, de même l’antichristianisme du début portant sur les plaisirs charnels et les guerres de domination paraîtra enfantin par rapport à celui de l’humanité lorsqu’elle aura mûri. Quand on regarde l’histoire de l’humanité, on constate que les antichristianismes ont empiré par étapes, de manière analogue à ce qui est visible dans la vie d’un individu quand il mûrit dans le péché. Ainsi, les péchés peuvent, chez celui qui se damne, empirer en trois étapes selon que l’égoïsme est du à la faiblesse de leur chair, à l’ignorance de l’amour de Dieu ou au contraire à la lucidité d’une volonté obstinée dans le mal. De même, on peut discerner trois étapes du péché dans l’histoire de l’humanité :

1° Le péché contre le Père (faiblesse) : Les tyrans du commencement de l’humanité sont, à l’image de Néron, des hommes exaltés dans leur pouvoir ou par leur plaisir. Ils suivent leurs convoitises. Ils sont souvent les esclaves de leurs passions qu’ils appliquent à la politique, pour le malheur de leur peuple. Leur motivation n’est pas l’ignorance de l’existence de Dieu mais le plus souvent, le péché contre le Père, c’est-à-dire une certaine faiblesse due à l’emprise des trois convoitises (plaisirs, argent, pouvoir). Puisque c’est au Père éternel qu’on attribue la force, ces antéchrists s’opposent au Père. C’est aussi à de genre de péché que se rendirent coupable bien des chrétiens lors des guerres de religion, salissant l’Église d’une tâche définitive.

2° Le péché contre le Fils (ignorance) : Après la révolution française, l’humanité entra dans une nouvelle étape puisqu’il ne s’agit plus seulement de convoitise mais, pour la première fois, de la conviction que le christianisme et les religions révélées ne sont que des inventions de la superstition. Il y eut chez ces hommes, à partir de cette époque, une véritable ignorance de l’existence de Dieu. On l’appelle péché contre le Verbe puisque c’est au Verbe qu’est attribué par appropriation, la connaissance en Dieu pour le bien des hommes. Les antichristianismes de cette époque s’efforcèrent donc de construire un système nouveau, une idéologie capable de donner à l’humanité le bonheur « sans référence à Dieu ». On tâtonna tragiquement. Mais les diverses tentatives d’humanisme sans Dieu, -le nationalisme (exaltation du pouvoir), le capitalisme et son opposé le marxisme (exaltation de l’argent), l’hédonisme (exaltation des plaisirs)-, ont tous en commun la croyance, souvent sincère, que Dieu n’existe pas et qu’une nouvelle humanité doit naître. Le XXème siècle est à cet égard significatif de la manipulation du démon caché sous l’histoire puisqu’il inspira à l’homme des idéologies effrayantes aboutissant aux massacres de masse, d’Auschwitz à l’avortement[133].

3° Le péché contre l’Esprit Saint (lucidité, maîtrise de soi, face à Dieu) : Arrivé à ce point, il y aura une dernière étape pour que la plénitude du mystère de l’iniquité soit révélée. Il est déjà venu beaucoup d’Antéchrist, mais ils n’ont jamais été que des préfigurations du dernier puisqu’ils n’ont jamais osé ou pu proclamer de manière explicite sur la terre la grandeur du blasphème contre l’Esprit Saint. Cela leur était impossible car l’orgueil humain ne l’aurait pas reçu. Mais, vers la fin du monde, une troisième étape doit être franchie, si l’on en croit la lettre des Écritures. L’existence de Dieu étant reconnue, il est probable qu’on verra l’humanité lutter explicitement contre lui. Il semble donc que les hommes se révolteront contre un Dieu dont ils connaissent l’existence.

S’agit-il d’un péché contre l’Esprit Saint, devenu la manière de vivre de l’humanité entière ? Nous avons vu dans la première partie qu’un individu peut aller très loin dans le péché. Il peut aller jusqu’au refus libre et conscient de tout amour oblatif, quitte à se séparer pour l’éternité de Dieu en enfer. Il n’existe pas de plus grand péché. Mais l’humanité dans son ensemble ne peut aller jusque là parce que le blasphème contre l’Esprit Saint est le fait d’un individu libre et non d’une communauté. Chaque être humain est unique et il n’existe pas sur terre d’unanimité totale ni pour le mal ni pour le bien. Il est inimaginable que l’humanité choisisse comme un seul homme de lutter contre Dieu de manière libre et consciente, c’est-à-dire en sachant qu’il existe et ce qu’il veut.

Il est cependant possible à l’humanité de commettre un tel péché, en tant que ses autorités politiques la structure autours de lui. L’humanité dans son ensemble constitue une structure où chaque individu peut être conditionné et entraîné vers des actions qu’il ne ferait pas seul. Dans certaines conditions, une communauté, ses dirigeants et ses médias peuvent prendre un tel ascendant sur les individus, qu’ils semblent unanimement d’accord avec la direction de l’ensemble. Jean-Paul II appelait ce mécanisme « une structure du péché ». Il employait cette expression dans l’analyse sociologique du nazisme en Allemagne. Chaque allemand, pris individuellement se serait sans doute révolté à l’idée de l’extermination par la guerre de millions d’hommes innocents. Pourtant, le peuple tout entier, entraîné dans un enthousiasme communicatif (désir de revanche nationale, misère matérielle et morale, charisme de son guide), applaudit l’idée d’une guerre. Il en sera ainsi à la fin du monde. Mais, de même que le nazisme des allemands pris individuellement ne résista pas à la manifestation de sa vraie nature, de même, il ne faut pas croire que chacun de ceux qui soutiendra avec enthousiasme l’Antéchrist à la fin du monde se damnera à l’heure de la mort, quand le Christ dévoilera la vérité.

La victoire de l’Antéchrist sera de courte durée. D’après l’apocalypse[134], elle durera trois jours et demi, c’est-à-dire le temps d’un sépulcre, le temps que les fidèles qui resteront en vie à cette époque puissent être l’image de la Vierge Marie après la mort de son Fils, vivre de l’attente de la résurrection finale de l’Église. Selon saint Paul, l’Impie sera anéanti d’un seul coup par la manifestation de la Venue du Seigneur, par le souffle de sa bouche[135].

 

Solution 1 : La victoire de l’Antéchrist final sera extérieure, c’est-à-dire médiatique et politique. Mais elle ne pourra jamais atteindre le fond même de la nature humaine, faite par essence pour l’infini du vrai Dieu. C’est pourquoi, s’il lui est possible avec un minimum d’organisation et d’intelligence politique de faire disparaître les fléaux cités en ce qui concerne leur signification matérielle, il lui et impossible de le faire au plan de leur signification psychologique et spirituelle. C’est pourquoi, malgré tous ses efforts, il ne réussira pas à supprimer les fléaux intérieurs, voulus par Dieu et qui continueront à façonner l’humilité de l’humanité. Ce sera vrai bien avant la venue du dernier Antéchrist.

1° Dans une étape qui précèdera la naissance de l’Antéchrist, il apparaître une génération qui rejettera violemment toute référence à toute religion. Les péchés passés des religions (peut-être la grande guerre annoncée dans l’islam) et le confort matériel provoqueront ce rejet. Les générations suivantes, privées de toute religion, vivront donc dans un grand vide spirituel (le soleil s'obscurcira etc.). Peu d’hommes penseront encore à la possibilité d'une vie après la mort. Le monde dans son ensemble, c’est-à-dire la très grande majorité des hommes, se retrouvera sur une terre habitable et correctement gérée. On n'y manquera de rien au plan matériel mais il n’y aura plus de nourriture pour les âmes. Ainsi, simultanément, il y aura une grande paix extérieure et sociale (quand on dira paix et sécurité) ainsi qu’une grande souffrance intérieure à cause de la disparition de l’espérance (les nations de la terre seront dans l'angoisse).

2° Comme “ l’homme ne vit pas seulement de pain mais de toute parole qui sort de la bouche de Dieu ”[136], à l’époque du dernier Antéchrist, il y aura sa nouvelle religion. Pourtant, rien n’y fera, elle n’aura pas le pouvoir de supprimer le feu dans le cœur de l’homme. Fait pour le vrai Dieu qui est amour, le cœur de l’homme ne peut se satisfaire, même dans l’espoir de vivre éternellement, d’un dieu de l’égoïsme. Devant cette soif, la majorité des hommes ne comprendront pas que c’est l'absence du vrai Dieu qui les consume. Comment pourra-t-il en être autrement puisque nul prophète ne sera là pour le leur révéler. Il y aura en ce temps une multiplication des angoisses, des névroses et des suicides. On cherchera la lumière mais on ne la trouvera pas car, ajoute saint Matthieu[137] : “Aussitôt après la tribulation, le soleil s’obscurcira, la lune ne donnera plus sa lumière, les étoiles tomberont du Ciel et les puissances des cieux seront ébranlées. ”

Solution 2 : En sens contraire, la lettre de l’Ecriture dit que l’Antéchrist réussira à créer une paix mondiale. De fait, il est probable que l’Antéchrist ne triomphera que par des armes intellectuelles, celles de ses idées, de sa connaissance de la nature humaine, de ses ruses[138]. C'est ainsi : plus l’humanité approchera de son terme et se spiritualisera, plus ses guerres seront celles de l'Homme sans Dieu contre l'Homme au service de Dieu. Ce sont deux conceptions du monde opposées et qui l'emportent plus par la parole que par les armes. L’Antéchrist l'aura compris, lui qui connaît l'Histoire.

Très vite, porté par l'enthousiasme des nations devant son projet politique, l’Antéchrist étendra son pouvoir sur le monde entier : “Il consolidera une alliance avec le grand nombre ”[139]. Intelligemment et avec respect des différentes mentalités humaines, il centralisera le gouvernement du monde et saura mettre les sciences et les techniques au service de tous. Il supprimera définitivement la famine. De même, la médecine fera reculer la maladie dans les nations les plus reculées. Il multipliera les lois de ce genre et il réussira. Il établira pour la première fois dans toute l'histoire de l'Humanité une paix universelle. Chacun pourra le constater. À cause des forces armées intelligemment utilisées au service de la paix, il saura séparer et pacifier les ennemis d'hier. “ Quand les hommes diront paix et sécurité (...)”, commente saint Paul[140].

Solution 3 : L’Antéchrist saura discerner le risque considérable que représentent les restes des religions pour la durée de son oeuvre. Il sera intelligent et ne négligera pas la puissance des idées. A l’image du philosophe Feuerbach, il connaîtra la faille de son système d'humanité sans Dieu : cet­te soif insatiable du cœur de l'homme vers l'absolu, le tout-autre, l’Amour, la Lumière, en un mot vers le vrai Dieu. Sans doute ce danger lui paraîtra-t-il d’autant plus réel que l’Église, dans un dernier sursaut, aura su prêcher avec un certain succès les failles présentes dans l’humanisme sans Dieu (les deux témoins) puis dans la nouvelle religion fondée sur l’adoration du Dieu de la liberté et de l’amour de soi. l’Antéchrist entre­prendra donc une lutte contre le peuple de Dieu et réussira. Il le fera de deux manières :

1° pour ceux qui ne seront pas assez fixés sur le Christ, il séduira. Plus encore que les autres, une partie des chrétiens de cette époque se mettra au service de ce grand projet. Leur sens de l'amour du prochain les poussera à cela. « C’est l'Évangile de Jésus », les entendra-t-on proclamer partout. Le texte de Daniel décrit cette séduction exercée sur le peuple de Dieu en ces termes : “Il détruira des puissants et le peuple des saints. Et, par son intelligence, la trahison réussira entre ses mains ”[141]. Sûr de sa force, “ l’Antéchrist s'exaltera dans son cœur et détruira un grand nombre par surprise ”[142].

2° Pour ceux qui seront lucides et distingueront bien le vrai Dieu de l’humilité et de l’amour du faux Dieu de la liberté et de l’égoïsme, l’Antéchrist interdira ou détruira. C'est même, si l'on suit saint Paul et Daniel, le signe majeur qui devra précéder le retour du Christ : « Toutes ces choses s'achèveront quand sera ache­vé l’écrasement du Peuple Saint ”[143]. Pourtant, nous l’avons dit, il subsistera toujours, en secret, des fidèles de toutes les religions et ce jusqu’au retour du Christ. Il seront même devant Dieu d’une telle qualité qu’on n’aura rien vu de tel, sauf en Marie à la croix.

Solution 4 : Le jardin d’Eden et l’arbre de vie sont le symbole du rêve ultime de l’homme. Puisqu’il désire vivre éternellement, dans la maîtrise de sa liberté, il ne cesse d’en rechercher le moyen. Ainsi vit-on l’empereur Chin avant Jésus Christ et Staline plus récemment expérimenter des recettes de vie éternelle. On voit des hommes faire congeler leur corps dans l’espoir d’être ramenés à la vie un jour. Vers la fin du monde, l’homme percera certains secrets génétiques de la programmation de la vie humaine à ne jamais dépasser 120 ans, selon la lettre de la Genèse[144] : « Puisque l’homme n’est que chair, sa vie ne sera que de 120 ans ». Il ne résistera pas à la tentation de modifier cela.

Si l’on suit la lettre du livre de la Genèse, avant cette décision divine due à l’abus du péché, les hommes vivaient sept cent, huit cents ans[145]. Il n’est pas aberrant de croire que ces chiffres ont une valeur réelle. Vers la fin du monde, il est probable que l’Antéchrist réalisera cela, revenant ainsi aux sources de l’humanité. L’apocalypse rejoindra la Genèse, de même que le péché premier d’Adam et Ève[146] : « Vous serez comme des dieux, maître du bien et du mal », sera celui de la fin de manière explicite.

Mais cette oeuvre butera sur une limite infranchissable : celle de la mortalité de toute chair. Il sera impossible à l’Antéchrist, malgré toute sa science, de rendre immortels les individus. Il ne pourra que les faire paraître immortels en allongeant leur vie. En effet, si Dieu ne réalise pas l’assomption de l’homme dans l’éternité, son corps est finalement toujours détruit car l’état de sa matière n’est pas entièrement soumis à son esprit.

Solution 5 : Nous l’avons montré dans l’article précédent, l’humanité ne se comprend pas seulement comme la somme des libertés individuelles. Elle est aussi une structure sociologique parce que la plupart des hommes suivent le courant qui domine. En ce sens, il peut y avoir un acte politique et mondial de défi à Dieu, qui est le fait de la grande majorité, quoique très peu en saisissent la profondeur. Lors de la passion de Jésus, le peuple entier, c’est-à-dire sa partie bruyante, visible dans la rue, réclama sa mort, allant jusqu’à dire[147] : « Son sang, qu’il retombe sur nous et sur nos enfants ». De même, à la fin du monde, il y aura une révolte explicite, politique et médiatique contre Dieu qui ressemblera, extérieurement, à un blasphème contre l’Esprit. Mais, intérieurement, il ne sera que médiatisation et phénomène sociologique.

En agissant ainsi, l’Antéchrist réalisera en plénitude les nombreuses prophéties de l’Écriture : “ Il s’élève au-dessus de tout ce qui porte le nom de Dieu, il s'assoit en personne dans le sanctuaire de Dieu, il se produit lui-même comme Dieu ”[148] puisqu'il se juge digne d'établir sur l'univers les lois décidant de toutes choses, le bien et le mal, l’origine de la vie, son but et la manière de la vivre. Lorsque l'Écriture affirme qu’il établira son siège dans le sanctuaire de Dieu, elle ne veut pas signi­fier autre chose. Il se produira comme le Maître suprême de la vérité (Magister), comme le berger de tous (Pastor Oves) et même comme l’organisateur de toutes les fêtes et réjouissance de l'hu­manité nouvelle (Pontifex maximus). Ces trois titres, attribués tradition­nellement aux papes de l'Église catholique, sont une délégation des titres de Dieu. En ce sens là, l’Antéchrist sera l’Antivicaire du Christ. On voit que celui qui, à cette époque, vivra profondément de sa foi chrétienne n'aura aucun risque de le confondre avec un vrai pape. C'est aussi en ce sens qu’il faut interpréter les prophéties de Jésus ­annonçant « l'Abomination de la désolation dans le temple saint ».[149]

Solution 6 : La victoire de l’Antéchrist ne sera qu’apparente et provisoire (un temps dont, nous le verrons, il est impossible de calculer la durée réelle). Elle sera anéantie en un instant par la Vérité glorieuse de l’apparition du Christ que saint Paul appelle le souffle de la bouche du Seigneur. Cela se passera soit par la mort individuel des hommes soit, plus probablement, par le retour définitif et final du Messie, la fin des fins. Et cette victoire finale sera inaugurée par divers signes cosmiques effrayant, peut-être même par l’apparition visible dans le Ciel du signe de la croix sur lequel l’Agneau fut immolé[150]. Les hommes auront soif, ils brûleront sans aucune possibilité d’identifier qu’il s’agit de l’absence du vrai Dieu.

Solution 7 : Le démon inspire aux hommes de tuer parce que l’homicide est l’un des péchés les plus mortels pour l’amour. Mais il ne le fait que dans un seul but : qu’à l’heure de sa mort le criminel choisisse dans sa perversion de le suivre dans la révolte de l’enfer. C’est pourquoi, plutôt que de tuer les corps, il cherche à tuer les âmes selon la parole de Jésus[151]. C’est pourquoi, à la fin, il ne cherchera pas à détruire l’humanité mais à la convaincre de se révolter contre Dieu lucidement dans un blasphème contre le Saint Esprit.

 

A l’argument du cependant, il faut répondre : la réussite de l’Antéchrist sera certes éphémère. Mais il faut se garder d’être trop affirmatif pour l’interprétation de ce mot. Certains disent que (et je l’ai enseigné aussi longtemps), lorsque l’antichristianisme mondial paraîtra, alors le retour du Christ sera nécessairement réalisé dans les quelques années qui suivront, puisque toutes les prophéties auront été réalisées. Mais tout cela n’est pas certain, au moins si l’on parle du sens politique de ce retour. De même, Jésus annonça son retour « avant que cette génération ne passe ».[152] Les chrétiens crurent interpréter à bon droit sa parole comme l’annonce du retour visible et général, avant la mort du dernier de ceux qui l’avaient connu. Or il revint effectivement avec puissance pendant cette génération. Mais cela se produisit de manière invisible pour les habitants de la terre, à la mort de chacun et non pour tous en même temps. De même, il se peut que Dieu laisse l’humanité vivre des siècles ou des millénaires dans son antichristianisme. Dans cette hypothèse, il laissera l’homme construire dans sa liberté le monde qu’il souhaite. Tout sera alors réalisable par l’Antéchrist et ses successeurs, selon cette parole de la Genèse[153] : « Maintenant, aucun dessein ne leur sera impossible ». Tout peut être imaginé au plan des réussites techniques de l’humanité, aussi bien dans le domaine de la maîtrise de la vie et de sa transformation que de la colonisation de l’univers. Une seule limite restera par décret divin infranchissable : celle de l’immortalité car améliorer la longévité humaine ne signifie pas le rendre immortel. Il y aura une grande gloire matérielle et une grande misère spirituelle qui préparera efficacement la venue du Messie.

 

QUESTION 33 : Le signe du fils de l’Homme

 

Quatre questions :

 

1 : Le signe du fils de l’homme est-il le signe de la croix ?

2 : Est-il le signe de Jonas ?

3 : La croix apparaîtra t-elle réellement dans le Ciel à la fin du monde ?

4 : Les hommes seront-ils terrorises par l’apparition du signe du Fils de l’Homme ?

 

 

Article 1 : Le signe du fils de l’homme est-il le signe de la croix ?

Objection 1 : Il ne semble pas : Lorsque Jean demande à Jésus s’il est le Messie attendu, celui-ci lui fait répondre[154] : « Allez rapporter à Jean ce que vous avez vu et entendu : Les aveugles voient, les boiteux marchent, les lépreux sont purifiés et les sourds entendent, les morts ressuscitent, la bonne nouvelle est annoncée aux pauvres ». Il semble donc que le signe du Fils de l’homme consiste avant tout en la puissance des miracles opérés par Dieu.

Objection 2 : Lors de sa passion, le Christ donna des signes de sa mission : la terre trembla, les rochers se fendirent, des morts ressuscitèrent et se montrèrent à beaucoup de gens. Il semble donc que le signe du fils de l’homme ne consiste pas dans la croix mais dans des phénomènes effrayants comme ceux-là.

Objection 3 : Au début de l’Église, les chrétiens se donnaient comme signe de reconnaissance de leur foi un poisson. Il semble qu’il s’agit donc ici du signe du fils de l’homme.

 

Cependant : le Seigneur dit[155] : « Lorsque vous aurez élevé le fils de l’homme, alors vous saurez que Je Suis ». Or le Christ qui est Dieu fut élevé sur la Croix. Donc la croix est le signe de l’homme fait Dieu ; de même, à la fin du monde, il convient que le signe qui manifestera la prochaine élévation de l’homme à la vision de Dieu soit la croix.

 

Conclusion : La mission du Christ sur la terre consiste essentiellement dans la manifestation de l’amour qui se communique en profusion à ceux qui l’aiment. C’est en mourant pour nous que Jésus a manifesté avec puissance son amour pour les hommes. Il a montré que pour accéder à la vie éternelle et aux qualités intérieures qui lui sont présupposées, il n’y a pas de meilleur moyen que la souffrance de la vie terrestre. Et cet amour est l’article de foi le plus important, selon la parole de saint Jean : « Et nous, nous avons reconnu l’amour que Dieu a pour nous et nous y avons cru »[156]. C’est pourquoi les chrétiens se sont donnés pour signe de reconnaissance la croix dont ils tracent le signe sur leur corps, manifestant ainsi leur foi dans le salut opéré par le Christ à la croix. C’est pourquoi l’Église chante à Pâques : « Bénie sois-tu, Croix! C’est par toi que le salut est entré dans le monde ». Le terme ultime de la croix, c’est-à-dire de l’humilité du Christ fut son séjour au tombeau. C’est pourquoi le Christ dit aux Lévites qui demandent un signe de sa puissance[157] : « Vos n’aurez pas d’autre signe que celui de Jonas. De même que Jonas est resté dans le ventre du poisson pendant trois jours, ainsi le Fils de l’homme sera dans le sein de la terre durant trois jours et trois nuits ».

 

Solution 1 : Les miracles et la prédication de l’Évangile ne sont pas les signes spécifiques du fils de l’homme mais ils témoignent aux yeux des hommes de la mission divine qui l’anime jusque dans son anéantissement. De la même façon, pour les prophètes et apôtres, les miracles ont ce rôle. C’est pourquoi l’Écriture rapporte de Josué, lorsqu’il arrêta le soleil[158] : « Il n’y a pas eu de fournée pareille, ni avant ni depuis, où Dieu ait obéit à la voix d’un homme ». Et un tel miracle manifesta à tous que Dieu était avec le peuple d’Israël.

Solution 2 : La croix en elle-même est signe de la condition du fils de l’homme puisqu’il fut dans la misère sur cette terre. Quant aux miracles qu’il accomplit, ils signifient que Jésus est aussi Fils de Dieu et qu’il est plus fort que le péché et ses conséquences dont il ébranle l’empire. C’est pourquoi des morts ressuscitèrent manifestant sa victoire sur la mort. Le signe du Verbe fait chair est donc la croix glorieuse. Cependant, le signe du fils de l’homme est la croix douloureuse.

Solution 3 : Le signe du poisson permettait aux chrétiens de se reconnaître entre eux alors que les persécutions sévissaient. En effet, ils ne pouvaient arborer extérieurement le signe de la croix qui les aurait trop facilement fait repérer par les persécuteurs romains. Quant au signe du poisson, il convenait car son orthographe grecque (ICHTUS) donne en grec les initiales du nom de Jésus-Christ, fils de Dieu. Un tel signe disparut de la tradition chrétienne à la fin des persécutions. Il ne s’agit donc pas là du signe du fils de l’homme mais simplement d’un signe provisoire adopté par les chrétiens à une certaine époque de leur histoire.

 

Article 2 : Le signe du fils de l’homme est-il le signe de Jonas ?

Objection 1 : Le propre d’un signe est de manifester ce qui est signifié. Or le signe de Jonas, qui est le sépulcre, manifeste plutôt l’échec de la condition humaine que la victoire du ressuscité. Donc il ne peut être le signe du Fils de l’homme.

 

Cependant : Le Seigneur dit aux Juifs incrédules[159] : « Cette génération réclame un signe, et de signe il ne lui sera donné que celui de Jonas. De même en effet que Jonas fut dans le ventre du monstre marin trois fours et trois nuits, de même le Fils de l’homme sera dans le sein de la terre durant trois Jours et trois nuits ». Le signe de Jonas signifie donc le mystère du sépulcre.

 

Conclusion : Le signe de Jonas symbolise et annonce dans l’Évangile la future passion du Seigneur : Il a pris sa croix en vérité, subissant jusqu’à la mort les souffrances. La baleine qui engloutit Jonas signifie la mort que le Christ a endurée ; le salut de Jonas qui fut rejeté sur le rivage vivant signifie la résurrection du Sauveur. Le signe de Jonas rappelle donc aux croyants la prophétie d’Isaïe sur le Christ[160] : « Homme de douleur, familier de la souffrance, comme quelqu’un devant qui on se voile la face, méprisé, nous n’en faisions aucun cas. Or ce sont nos souffrances qu’il portait et nos douleurs dont il était chargé ». Le sépulcre est avec la croix le plus grand signe de l’amour de Dieu. Il peut être considéré avec elle comme le signe du Fils de l’homme. Il marque tout ce qui est fait ici-bas par les fils des hommes puisque la finalité de la vie terrestre, loin d’être en elle-même, consiste à s’achever dans la mort. L’homme doit découvrir alors sa limite et sa misère et, par là même, se tourner vers Dieu et son salut.

 

Solution 1 : Le sépulcre vécu par le Christ n’était pas la fin de sa mission puisqu’il est ressuscité d’entre les morts. Mais ce temps de sépulcre manifeste aux hommes l’intensité de son amour qui, pour nous sauver, ne nous impose pas d’en haut une vie de purification, mais la vit lui-même alors qu’il n’en a pas besoin.

Pendant que son corps reposait au tombeau, son âme descendait dans le séjour des morts. Comme l’enseigne Urs von Balthazar[161]. Il est certain que le Christ accepta de vivre pendant ce séjour dans l’Hadès notre condition humaine. Il sauva tout l’homme en vivant tout de la vie de l’homme excepté le péché. Nous comprenons ainsi que le signe de Jonas, c’est-à-dire le sépulcre, manifeste conjointement à la croix l’amour excessif de Dieu.

 

Article 3 : La croix apparaîtra-t-elle réellement dans le ciel à la fin du monde ?

Objection 1 : Il semble que la croix n’apparaîtra pas comme un signe glorieux du retour du Christ à la fin du monde. En effet, une telle apparition supprimerait le mérite de la foi ce qui ne convient pas à la sagesse de Dieu.

Objection 2 : On voit mal pourquoi la croix devrait apparaître avant celui qui fut crucifié. En effet, elle est le signe du supplice et n’a de valeur qu’à cause de la charité du Sauveur.

Objection 3 : La croix ne signifie pas pour tous les hommes le salut : pour les musulmans par exemple, il est plutôt signifié par le croissant. Or on a dit que le Seigneur adapte ses signes à la sensibilité de chacun. Donc elle ne doit pas apparaître à la fin du monde.

Objection 4 : La fin du monde est semblable, comme nous l’avons montré, à la fin de chaque individu en particulier. Or la croix glorieuse n’apparaît pas à la mort de chacun.

 

Cependant : [162]« Et alors apparaîtra dans le Ciel le signe du Fils de l’homme ; et alors toutes les races de la terre se frapperont la poitrine et l’on verra le Fils de l’homme venant sur les nuées du Ciel avec puissance et grande gloire ».

 

Conclusion : L’apparition du signe du Fils de l’homme, à la fin des temps peut être prise en deux sens.

1° Le premier sens est le plus certain car il touche l’aspect spirituel, quoique réel du mystère. Il s’agit de la passion et du sépulcre que devra subir l’Église à l’image de son Seigneur, l’Oumma (l’islam) à l’image du sacrifice d’Ismaël, et toutes les religions. Dans ce sens, le signe du Fils de l’homme est la croix douloureuse ou encore le signe de Jonas. L’Église, en vivant du même mystère que le Christ manifestera profondément aux yeux du monde le mystère de la charité quand elle pousse l’homme à donner sa vie pour son frère. Seuls quelques-uns comprendront en ces heures douloureuses le signe de Jonas ainsi donné, à l’image de la Vierge Marie durant les trois jours du sépulcre. Et ce signe de Jonas sera pour les croyants qui resteront le signe certain et définitif sur lequel ils pourront fonder leur foi en l’imminence du retour du Christ[163] : « Relevez-vous et redressez la tête car votre Rédemption est proche ». Tout sera accompli.

2° En un second sens qui complète et manifeste sensiblement le premier pour les hommes plus charnels, il s’agit de l’apparition de la croix glorieuse qui précédera le retour du Christ et marquera la fin du sépulcre de l’Église. Cette apparition manifestera au monde entier la victoire du Christ et celle de l’Église à sa suite. Devant la lumière de la croix, l’humanité sera obligée de reconnaître la valeur salvatrice de la passion du Christ et de l’Église à sa suite, d’une manière analogue au centurion romain à la croix[164] : « Vraiment, celui-ci était le fils de Dieu ».

 

Solution 1 : Comme nous l’avons dit, l’apparition de la croix glorieuse, ni même celle du Christ ne suppriment totalement la foi. Certes les hommes seront obligés de reconnaître l’existence de Dieu et de son Messie, à cause de l’évidence de ces signes. Cependant, ils seront amenés à adhérer par la foi en la possibilité de la gloire qui est la vision de l’essence divine. Et il est probable que certains, à cause de la perversité de leur cœur, refuseront volontairement de croire à cette promesse, se plongeant ainsi dans la damnation éternelle. D’autres se contenteront de noter le phénomène, sans en tirer les conséquences, mais comme on prend un miracle quand on ne s’attache qu’à son caractère merveilleux. Ainsi furent dans le passé les réactions humaines face au miracle de Fatima (1917°. Seuls quelques-uns ressentiront en profondeur la gravité des événements de cette époque et le drame profond qu’aura été l’éradication des religions et de l’Église.

Solution 2 : Il convient que la croix apparaisse dans la lumière véritable de son mystère. En effet, c’est par elle que le Sauveur a effacé la cédule de notre péché et a ouvert pour nous la porte du Ciel. De même, c’est par elle que l’Église unie à la passion du Christ a mérité pour l’humanité tout entière la manifestation glorieuse et définitive de ce salut ; enfin, c’est par elle que tout homme est introduit dans la gloire puisque tous doivent mourir à eux-mêmes pour renaître à la vie éternelle.

Solution 3 : Comme nous l’avons dit, à la fin du monde, l’Évangile aura jadis été prêché partout, de telle façon que nul n’ignorera complètement, au moins dans un fond culturel lointain, la signification de la croix. Cependant, même si certains l’oublient complètement, ils comprendront à ce moment sa signification puisque l’apparition de la croix glorieuse sera accompagnée par une intuition intérieure infusée par Dieu qui enlèvera dans l’intelligence de chacun l’ignorance quant à ce mystère. C’est pourquoi « toutes les races de la terre se frapperont la poitrine ».

Solution 4 : Chaque individu, à l’heure de sa mort, s’il ne voit pas sensiblement apparaître la croix glorieuse, n’est pas moins conduit de deux manière à vivre de ce signe : 1° Physiquement puisqu’il meurt ; 2° Intérieurement par la grâce du Seigneur puisqu’il reçoit la révélation de l’amour qui est allé jusqu’à s’offrir en sacrifice pour le sauver. D’autre part, il comprend qu’il lui faut lui-même renoncer à l’amour égoïste de soi-même, à la manière du grain de blé qui meurt, s’il veut entrer dans la béatitude éternelle.

 

Article 4 : Les hommes seront-ils terrorisés par l’apparition du signe du fils de l’homme ?

Objection 1 : On ne peut craindre ce qui est un bien. Or la venue du Seigneur sera un bien puisqu’elle manifestera la victoire sur le péché et sur la mort qui sont les deux maux principaux.

Objection 2 : le Seigneur dit que tous les hommes se frapperont la poitrine. Un tel geste semble figurer davantage le repentir que la peur. Donc les hommes ne seront pas terrorisés par l’apparition du signe du signe du Fils de l’homme.

Objection 3 : le signe de la croix précèdera de peu l’apparition glorieuse de Christ lui-même. Or nul ne peut avoir peur du Christ qui est l’essence même de la bonté.

 

Cependant : Isaïe, en parlant de la manifestation de Dieu dit aux hommes[165] : « Va dans le rocher, terre-toi dans la poussière devant la terreur de Dieu, devant l’éclat de sa majesté, quand il se lèvera pour faire trembler la terre. L’orgueil humain baissera les yeux ».

 

Conclusion : La crainte est une passion qui a pour objet un mal que l’homme fuit. Or, que la venue du Christ manifestée par la croix puisse être vécue par l’homme comme un certain mal, cela ne peut tenir à la personne du Christ lui-même puisque, étant l’image de Dieu, il n’y aura rien en lui qui ne soit bonté. Or nul ne peut haïr la bonté en tant que telle. Il la fuit à cause d’autre chose qui l’accompagne. Ainsi, les pécheurs dont l’intention de vie se porte vers les biens de ce monde, seront terrorisés à l’idée de perdre leurs richesses. Et cette crainte mondaine les conduira à rejeter la venue du Christ comme un mal. C’est ce qu’on voit très concrètement à la mort des mondains. L’apparition pour eux de la proximité de cet événement est source des plus grandes terreurs.

Ceux qui serviront Dieu sans toutefois l’aimer avec l’amour de charité éprouveront devant la croix du Seigneur de la peur à cause des peines qu’ils sauront devoir subir pour leurs fautes. Il s’agit d’une crainte servile. Ainsi, certains hommes se convertissent-ils vers Dieu à l’approche de leur fin par peur du jugement.

Ceux enfin qui aimeront Dieu éprouveront lors de sa venue de la crainte à cause des péchés qui resteront en eux. Leur amour du Seigneur provoquera la crainte de ne pas paraître purs en sa présence. Il s’agit d’une crainte filiale ou encore, pour ceux dont la charité sera parfaite, d’une crainte chaste semblable à celle qu’éprouvent les époux entre eux lorsque leur amour réciproque atteint une grande délicatesse dans sa forme.

Ainsi, on doit dire que tous les hommes éprouveront une grande crainte lors de la manifestation glorieuse du Seigneur par la croix, même si la crainte des bons sera d’une autre nature que celle qu’éprouveront les méchants.

 

Solution 1 : La victoire sur le péché n’est pas un bien pour ceux qui vivent dans le péché. Elle représente plutôt la ruine de leurs espérances puisque personne n’emporte dans l’au-delà le fruit de ses rapines. De même, en tant qu’il reste dans le cœur de tout homme vivant sur la terre des restes du péché, les saints eux-mêmes craindront la venue du Seigneur. Toutefois, cette crainte ne portera pas sur la victoire du Christ elle-même mais plutôt sur le fait que cette victoire n’a pas encore tout pris dans leur âme.

Solution 2 : Le geste qui consiste à se frapper la poitrine représente simplement le regret. Or il est possible que l’homme regrette plusieurs choses : la perte de ses biens, l’obligation de subir une peine ou encore le fait de ne pas avoir assez aimé.

 

Solution 1 : L’apparition du Christ qui suivra celle de la croix manifestera pleinement la bonté de Dieu qui est miséricordieux et lent à la colère. Elle fera disparaître toute crainte servile chez les bons puisqu’ils aimeront Dieu et désireront subir les peines du purgatoire avec joie pour se rendre conforme à leur Sauveur. Cependant, cette apparition glorieuse ne supprimera en rien la crainte mondaine chez ceux qui seront donnés au péché et perdront tout. De même elle ne supprimera pas la crainte filiale mais aura tendance à la transformer en une crainte chaste à cause de la grandeur de l’amour que les saints éprouveront pour Dieu.

QUESTION 34 : La fin du monde[166]

 

La fin du monde sera provoquée par l’apparition du Christ glorieux. Nous avons déjà étudié le mystère du retour du Christ à propos de la mort individuelle (Question 8°. Comme nous l’avons dit au début de cette section, ce sera le même mystère sauf que tous les hommes le verront en même temps. Il nous reste à étudier la fin du monde qui suivra immédiatement le retour du Christ, nous nous poserons six questions :

1° Dieu mettra-t-il fin au monde tel qu’il est ici-bas ?

2° La fin des temps se distingue-t-elle de la fin du monde ?

3° Peut-on distinguer sept temps dans l’histoire de l’humanité ?

4° Connaît-on la date de la fin du monde ?

5° Peut-on dire au moins que nous sommes dans les derniers temps ?

6° La fin du monde consiste-t-elle dans le retour glorieux du Christ ?

7° Tous les hommes mourront-ils ?

8° La fin du monde sera-t-elle une destruction ou une transformation dans un autre monde ?

 

Article 1 : Dieu mettra-t-il fin au monde tel qu’il est ici-bas ?

Objection 1 : Cela ne semble pas. Dans le livre de la Genèse, après avoir détruit le monde par le déluge, Dieu dit [167]: « plus jamais je ne frapperai tous les vivants comme je l’ai fait. Tant que durera la terre, semailles et moissons, froidure et chaleur, été et hiver, jour et nuit ne cesseront plus ». Donc Dieu ne mettra pas fin à l’ordre du monde tel qu’il est ici-bas.

Objection 2 : Dieu fait tout avec ordre, poids et mesure. Il a donc créé l’univers parfait. Il n’y a donc pas de raison à ce qu’il lui donne un terme.

Objection 3 : Par la faculté de génération, les espèces vivantes sont ordonnées par Dieu à durer sans fin, puisque les parents engendrent un être semblable à eux-mêmes, que lui-même donne la vie à un semblable. Or ce que Dieu a ordonné à la durée ne peut manquer à sa finalité. Donc l’ordre du monde ne cessera jamais.

Objection 4 : Le monde matériel a été crée par Dieu pour que l’homme se prépare à entrer en possession de la gloire éternelle. Une telle œuvre divine a son origine dans son infinie bonté qui veut se communiquer. Or il ne convient pas que cette bonté trouve une limite en s’arrêtant à un nombre fini d’élus. Il convient donc que la terre dure toujours pour que, éternellement, des hommes nouvellement créés se préparent à entrer dans la gloire.

 

Cependant : le Seigneur annonce en saint Matthieu[168] : « Ainsi en sera t-il à la fin du monde : Les anges se présenteront et sépareront les méchants d’avec les justes ». Or actuellement, la méchanceté est unie à la justice donc l’ordre du monde tel qu’il est ici-bas ne durera pas toujours.

 

Conclusion : Le monde d’ici-bas doit avoir une fin. Et cela peut être prouvé aussi bien par la raison naturelle que par la foi.

1° Par la raison naturelle, l’homme peut se rendre compte que les éléments du monde courent à leur destruction. C’est ce que démontrent les scientifiques à propos de toutes les réalités matérielles, depuis les atomes, les astres, jusqu’aux vivants individuels et aux espèces. Tout est soumis à la loi de l’entropie. Tout se dégrade. Ainsi, le soleil qui est un corps d’énergie limitée, doit cesser son rayonnement par épuisement de sa capacité réactive ; de même le mouvement atomique des éléments qui composent la matière tend à se dégrader insensiblement. En conséquence, on doit dire que l’univers matériel qui est notre milieu vital finira nécessairement, s’il reste soumis aux seules lois naturelles qui le dirigent, par devenir impropre à la vie. Seul Dieu est capable de le rendre éternel, à condition qu’il lui infuse à partir de sa propre puissance, une énergie capable de renouveler son activité. Saint Paul le confirme[169] : « Elle passe la figure de ce monde ».

2° Par la foi, il est évident que l’ordre du monde tel qu’il est ici-bas ne durera pas, puisque la terre n’est pour l’homme qu’un séjour temporaire où il subit l’épreuve et est éduqué en vue d’entrer en possession de la béatitude éternelle qui consiste en la vision de Dieu. Ainsi, lorsque tous les hommes dont Dieu a décidé la naissance, auront terminé leur vie terrestre, le monde tel qu’il est ici-bas n’aura plus aucune utilité. C’est ainsi que, dès maintenant, la mort de chaque individu est comparable pour lui à la fin du monde puisqu’il entre dans une autre dimension de l’univers crée par Dieu. Le Christ reviendra et son apparition, comme l’éclair de l’Orient à l’Occident, mettra fin au cycle des générations et à la nécessité du purgatoire de cette terre.

Le cardinal Ratzinger commente[170] : « Le monde qu’elles observent est caractérisé par un antagonisme qui lui est propre : d’une part, c’est un monde qui s’use, en vertu du principe de l’entropie, qui par conséquent est engagé dans un mouvement vers un néant insipide ; d’autre part, c’est un monde qui apparaît emporté dans un devenir vers des unités de plus en plus complexes et donc dans un mouvement ascensionnel. La question de savoir où s’achèvera ce mouvement, pris au dilemme du déclin et de l’épanouissement, ne reçoit pas de réponse évidente, même si elle penche davantage dans le sens du déclin que de l’épanouissement. Seul un principe qui viendrait de l’extérieur peut permettre ici une affirmation nouvelle. Le message chrétien attend à la fois l’un et l’autre : le déclin par le déroulement du cours normal du monde, et l’épanouissement par cette puissance nouvelle, venue de l’extérieur, qui s’appelle le Christ. D`ailleurs, la foi ne voit pas dans le Christ une réalité vraiment extérieure, mais le point de départ véritable de tout l’être créé qui, par suite, venant de l’extérieur, peut épanouir ce qu’il y a de plus intime dans le cosmos ».

 

Solution l : Dans ce passage de la Genèse, Dieu s’engage à ne plus soumettre le monde à une destruction massive comme celle qui frappa les hommes lors du déluge. Mais il ne prétend pas que le monde n’aura pas de fin. Cette fin est au contraire suggérée par le texte : « Tant que durera la terre ». C’est donc que la fin du monde ne sera pas provoquée par une catastrophe de la nature mais par la venue glorieuse de Dieu qui mettra un terme au cycle des générations.

Solution 2 : L’univers a été crée parfait, selon le livre de la Genèse. Cela était « très bon ». Cependant, il s’agit d’une perfection relative et provisoire et non de la perfection plénière de la fin qui sera atteinte lorsque l’univers sera glorifié. Ainsi, on dit qu’un enfant est parfait relativement à son âge et non selon la perfection essentielle de la nature humaine qui n’est atteinte qu’à l’âge adulte.

Solution 3 : Tout ce qui est dans cet univers, les astres et la matière atomique eux-mêmes est soumis à une loi de corruption, une forme d’entropie. Les espèces vivantes ne durent en moyenne que 4 millions d’années et, même si elles portent en elles-mêmes par la génération une apparente capacité de durer toujours, cela ne signifie pas qu’il doit en être ainsi. Soumises aux lois de la génération, elles perdent la détermination de leur richesse génétique. Elles finissent par se dégrader et disparaître. Une telle corruptibilité de ce monde est voulue par Dieu comme un moyen en vue du bien de l’homme qui trouve dans la constatation de sa propre corruptibilité un motif de ne pas s’enorgueillir. Dans l’au-delà aucun homme, élu ou damné n’aura plus besoin de l’expérience de la vanité des choses puisque chacun sera à jamais déterminé. La corruptibilité des choses telles qu’elles sont ici-bas sera donc inutile.

Solution 4 : Le nombre des hommes a été fixé par Dieu et c’est un nombre fini. La raison en est qu’une société dont les membres seraient infinis en nombre ne peut être ordonnée et est ingouvernable. Or l’univers recrée pour les élus proclamera la gloire de Dieu par l’ordre qui y règnera selon la hiérarchie de la charité. C’est pourquoi l’Écriture affirme[171] : « le temps viendra où seront au complet leurs compagnons de service ».

 

Article 2 : La fin des temps se distingue-t-elle de la fin du monde ?[172]

Objection 1 : Il semble que ce soit la même chose. Le prophète Daniel[173] parle « du temps de la fin » ce qui parait être synonyme de la « fin des temps ».

Objection 2 : Quand les temps seront accomplis, il n’y aura plus de délai avant la venue du Christ ; Il en a été déjà ainsi lors de sa première venue selon Jean-Baptiste « le temps est accompli et le royaume des cieux est proche : repentez vous et croyez à l’Évangile »[174]. Il est donc inutile de distinguer la fin des temps et la fin du monde.

 

Cependant : Dans l’Évangile, Jésus parle de la fin du temps des nations. Mais il ne dit pas que la fin du monde viendra immédiatement, donc il y a une différence entre les deux.

 

Conclusion : Chaque individu, chaque communauté humaine ainsi que le monde dans son ensemble, a reçu de la part de Dieu un certain délai de vie, et une série de périodes pour accomplir son pèlerinage terrestre. Toute chose est mortelle. Et c’est la comparaison entre la vie humaine et la vie de l’humanité qui permet de comprendre de la plus simple manière les expressions derniers temps, temps de la fin, fin des temps, fin du monde.

1° Ainsi, pour chaque individu, la mort représente la fin du monde. Mais auparavant, Dieu dans sa providence, assigne à l’homme une durée de vie faite de plusieurs étapes, plusieurs temps, selon la parole de Qohelet[175] : « Il y a un temps pour toutes choses sur la terre : un temps pour enfanter et un temps pour arracher le plant ». Le premier de ces temps est vécu par chacun dans le sein de sa mère puisqu’il suit la conception. Il est suivi normalement par le temps de l’enfance (temps du commencement), puis par d’autres périodes comme l’adolescence, l’âge adulte. Pour ceux qui y parviennent, la vieillesse représente toujours le dernier temps, qu’on peut appeler le temps de la fin. La vieillesse dure souvent très longtemps. Certains y entrent à 60 ans et en sortent par la mort à 90 ans. Les quelques mois qui précèdent la mort pourraient être qualifiés de fin des temps puisqu’ils précèdent la mort, la fin des fins.

2° Ce qui est vrai des individus l’est aussi pour les diverses sociétés humaines. Chaque civilisation reçoit un temps pour durer avant de sombrer dans la décadence. Ainsi, la civilisation romaine vécut le premier temps de sa petite enfance avec Romulus et Remus ; le temps de sa vie adulte avec ses conquêtes ; elle entra dans le temps de la fin quand ses citoyens furent plus adonnés au plaisirs qu’au sens civique ; la fin des fins, la fin du monde fut accomplie en Occident par la mort du dernier empereur, Romulus Augustule.

3° De même, l’humanité dans son ensemble connaîtra un jour un terme définitif dans son pèlerinage terrestre. Mais auparavant, Dieu lui accorde des temps : A un certain moment, après l’épisode court de la grâce originelle, aucun homme (sauf les exceptions d’Énoch, Abraham, Moïse et Élie) ne s’approchait intimement de Dieu. Cette première période est le temps du silence de Dieu. Puis vint, à partir de la Pentecôte, la dernière, le temps de la grâce. Il correspond à l’entrée dans la vieillesse puisque, nous le savons avec certitude dans la foi, il n’y aura pas d’autre Alliance de Dieu avec l’homme avant la fin du monde. Il dure pourtant depuis de nombreux siècles, de la même manière que la vieillesse d’un homme peut durer de longues années. Jésus divise ce dernier temps en trois distincte : le temps de l’annonce de l’Evangile, suivi du temps de sa contestation, suivi du temps de son rejet définitif (l’apostasie généralisée). Ainsi, depuis la résurrection du Christ, nous sommes dans le dernier temps. Lorsque certains signes précis annoncés par Jésus seront accomplis, nous saurons que la fin de cette période sera arrivée. Ce sera donc la fin du monde ou la fin des fins puisqu’il n’y aura pas d’autre période de délai terrestre. La fin du monde est donc le « terminus ad quem » du dernier temps. Le Christ reviendra dans sa Gloire suivi immédiatement par la destruction du cosmos et par sa transfiguration.

 

Solution 1 : Immédiatement avant la fin du monde, il y aura un temps particulièrement difficile pour l’humanité puisqu’il sera lié à des guerres « entre le roi du nord et du midi » selon Daniel[176], à des tremblements de terre et à beaucoup d’autres malheurs. Ce temps de la fin précèdera de peu la fin du monde mais n’est pas identifiable à la fin du monde elle-même, de même que la dernière phase d’un mouvement n’est pas identifiable à son terme final.

Solution 2 : Si l’on regarde la fin des temps comme le moment où les prophéties de l’Écriture seront toutes accomplies, alors nous pouvons dire que nous sommes déjà dans la fin des temps, de la même manière que saint Paul[177] : « Nous touchons à la fin des temps ». En effet, le Christ a accompli l’Écriture en plénitude par sa venue, sa prédication, sa mort et sa résurrection. Toutes les prophéties furent réalisées d’une manière ou d’une autre puisque les premiers apôtres, après avoir prêcher dans le mode connu de leur époque, furent mis à mort. Cependant, l’expérience nous montre qu’après la venue du Christ qui était le dernier des temps de l’humanité, Dieu a laissé à l’humanité un autre temps pour se convertir. C’est pourquoi la fin des temps ne doit pas être confondue avec la fin du monde, même si elle annonce l’imminence de cette fin ultime, selon l’apocalypse[178] : « Il n’y aura plus de délai! »

 

Article 3 : Peut-on distinguer sept temps dans l’histoire de l’humanité ?

Objection 1 : Le chiffre sept semble davantage lié à une volonté de concorder avec les sept jours de la création qu’à une véritable nécessité liée à la révélation. On aurait pu diviser tout autrement les phases de l’histoire, comme on le voit chez Joachim de Flore.

Objection 2 : Pour parler de sept temps, il faut pouvoir dater. C’est possible pour les trois premières phases. Mais la phase d’évangélisation, celle du rejet de l’Évangile et de l’apostasie sont des phases vécues en permanence dans l’Église et non des événements datables comme la révélation faite à Moïse ou l’incarnation du Verbe.

Objection 3 : Il ne semble pas qu’on doive compter sept « jours » après la venue du Christ. En effet, encore aujourd’hui, chacune de ces sept phases est vécue par une ou plusieurs parties de l’humanité. Ainsi, certaines tribus reculées vivent séparées de toute révélation comme au temps du silence de Dieu. Elles adorent encore des idoles et des démons ; Les juifs, quant à eux, vivent de la deuxième phase puisqu’ils attendent le Messie ; Certaines chrétientés ont déjà apostasié et bien des antéchrists sont déjà venus. D’autre part, des civilisations entières ont déjà vécu le retour du Christ puisque tous leurs membres sont morts.

 

Cependant : Jésus parle dans le discours eschatologique[179] de trois temps qui sont comparables aux trois phases de l’accouchement.

 

Conclusion : L’histoire de l’humanité peut être regardée selon plusieurs points de vue. Les paléontologues l’observent à travers les vestiges matériels comme les tombes, l’art et les outils. Ils distinguent sous ce rapport divers temps qu’ils divisent habituellement en deux périodes selon l’existence ou non de documents écrits. La préhistoire leur paraît divisible en quatre temps comme l’âge de la pierre taillée (paléolithique), l’âge de la pierre polie (néolithique), l’âge du bronze, l’âge du fer. Mais lorsqu’il s’agit de l’histoire documentée, la division des périodes est beaucoup plus complexe et discutée tant les critères possibles sont divers : armes, taille des cités, structures sociologiques etc. On constate que, ici où là sur terre, quelque soient les critères retenus, tous les âges de l’humanité subsistent de quelque manière. On trouve encore des tribus vivant comme au néolithique.

Dans le domaine de la théologie, les divisions se prennent du rapport de l’humanité avec la grâce. En effet, il n’a pas toujours été possible à la foule des hommes d’approcher Dieu. En fonction de ce critère, on peut discerner sept étapes de l’histoire sainte, sept temps de l’humanité qui subsistent encore ici ou là dans certaines parties de l’humanité:

Les trois premiers temps de l’humanité qui suivirent la chute d'Adam et Ève. 1° Le temps où Dieu se taisait, 2° le temps où il promit à quelques-uns un sauveur, 3° celui enfin où il se fit chair et annonça l'Évangile. Chacune de ces périodes dispose les cœurs au salut. Ces trois temps, commencés après le péché originel, sont toujours d’actualité. Ils sont vécus de nos jours par des milliers d’hommes qui n’ont jamais entendu parler du Christ.

Après son ascension, Jésus annonce de nouveau trois temps, trois étapes de l'histoire durant lesquelles il préparera les nations à son retour glorieux. On peut les discerner à la lecture de son discours eschatologi­que[180] et des multiples prophéties dispersées ici et là dans les lettres des apôtres.

4° Le premier de ces temps est celui de l'extension de l'Évangile dans le monde. C'est une période accompagnée de luttes et de souffrances nombreuses.

5° Le second est celui du rejet de l'Évangile par le monde.

6° Le troisième est le temps de sa disparition quasi complète du monde. C’est le temps de l’Antéchrist.

 

Solution 1 : Nous accordons cette objection. On pourrait par exemple mettre l’époque qui précède le péché originel sous un jour et unifier le temps qui précède la venue du Christ en un seul puisque l’annonce d’un salut fut donné dès le départ, quoique de manière imprécise[181] : « Ta descendance écrasera la tête du serpent ». De même, les temps qui suivent la venue du Christ pourrait être divisés autrement, par exemple comme le fait Jésus quand il les décrit à la manière d’un accouchement avec ses premiers signes, les douleurs et l’accouchement lui-même.

Solution 2 : Ces trois temps ainsi que le règne de l’Antéchrist ne sont pas uniquement des événements symboliques ou spirituels. Leur réalisation est aussi certaine que l'étaient pour les Juifs les prophéties de l'Ancien Testament. Quand un prophète annonçait qu'une jeune fille vierge serait enceinte, les Juifs n'y voyaient pas seulement un symbole, une image d'Israël en attente de la manifestation de Dieu. Il en est de même pour les événements de la fin du monde. Chaque prophétie de Jésus a un sens symbolique, c'est certain, mais aussi un sens historique : “ Le Ciel et la terre passeront mais mes paroles ne passeront pas. ”[182]. La raison en est que l’homme n’est pas fait que d’esprit, mais que ce qui est spirituel en lui se réalise toujours de quelque manière dans son corps, sa psychologie et dans le monde qui l’entoure. C’est ce que l'Esprit saint veut, et cela sera. Toute la difficulté consiste à démêler leur écheveau. Les trois temps qui précéderont le retour du Christ peuvent déjà être en partie datés. Le premier, celui de l'annonce de l’Évangile, commence avec le jour de la Pentecôte et dure jusqu’à aujourd'hui. Il se caractérise par l'extension de la chrétienté à travers le monde et par des luttes que le Seigneur appelle “ des guerres et des rumeurs de guerre ”[183]. Le second, le temps de l'apostasie qui se généralise, trouve des racines dans les idées de la fin du Moyen Age et de l’excès de la domination du pouvoir chrétien (guerres de religion en particulier) et de son rejet au siècle des Lumières. En effet, nul ne peut apostasier ce qu’il n’a d’abord reçu[184]. Mais il commence au plan politique avec les soubresauts antichrétiens de la Révolution française. Il continue à s'étendre jusqu'à aujourd'hui. Quant au troisième temps, celui du règne mondial d'un antéchrist, de la disparition politique de tout ce qui porte le nom de Dieu[185], il n'est pas encore commencé. Nous pouvons l'affirmer avec certitude en cette fin de millénaire. L’Antéchrist n’est pas là même si divers courants antichrétiens oeuvrent puissamment, même si de nombreux antéchrist sont déjà venus. On constate la proximité de sa réalisation à travers les courants humanistes qui rêvent de plus en plus, depuis les deux guerres mondiales, d’un monde unifié en une seule nation et langue. Nous montrerons que pour saint Paul, c'est la preuve que le retour glorieux du Christ n'est pas imminent[186]. Il ne reviendra pas se montrer à l’humanité tant que les dernières prophéties n'auront pas été réalisées.

Solution 3 : La signification historique de ces trois temps ne s’oppose pas aux autres sens. Il faut se rappeler que les paroles prophétiques de Dieu ne parlent jamais en premier lieu de l’histoire ou de la politique mais d’abord de ce qui concerne le salut des âmes dans leur rapport personnel avec Dieu. Cependant, appliquées à l’histoire, les trois temps qui précéderont le retour du Christ peuvent être datés comme nous l’avons vu. Dieu maintient à chaque époque un témoignage vivant de ces phases afin que chacun comprenne que chacune lui sert pour le salut. Le règne de l’Antéchrist, quoique maintenant les hommes séparés de Dieu, n’en disposera pas moins au salut que la phase primitive où l’humanité vivait de sauvagerie. En effet, par la souffrance et la mort qui de toute façon révèlent à l’homme ce qu’il est, chacun est éduqué dans la voie de l’humilité et de l’appel du salut. C’est ce que signifie cette parole de l’Opéra Starmania : « Y a-t-il quelqu’un dans l’univers, qui puisse entendre nos appels ? »

 

Article 4 : Connaît-on la date de la fin du monde ?

Objection 1[187] : Si le commencement d’une chose est connu avec précision, sa fin peut l’être aussi, « puisque toute chose a sa mesure temporelle ». Or, il en est ainsi du commencement de l’univers, il en sera de même par conséquent de sa fin, de la résurrection et du jugement qui doivent l’accompagner.

Objection 2 : Il est dit, dans l’apocalypse, de « la femme », symbole de l’Église, que « Dieu lui avait préparé une retraite, afin qu’elle y fût nourrie pendant 1260 jours ». Daniel, lui aussi, assigne un nombre déterminé de jours qui semblent bien être des années, comme dans Ezéchiel « Je t’ai compté un jour pour un an ». L’Écriture nous fait donc connaître exactement l’époque de la fin du monde et de la résurrection.

Objection 3 : L’Ancien Testament est la figure du Nouveau, et nous en connaissons exactement la durée. Nous connaissons donc, par là même, celle du Nouveau Testament et, du même pour l’époque de la fin du monde et de la résurrection, puisqu’il doit durer jusque-là : « Voici, je suis avec vous jusqu’à la fin du monde ».

Objection 4 : l’Écriture affirme que Dieu ne fait rien sans en parler à ses serviteurs les prophètes. Il semble donc que certains connaissent la date de la fin du monde, au moins les prophètes.

Objection 5 : Il en est de la date de la fin du monde comme de celle de la mort de chaque homme en particulier, puisque les prophéties de l’Écriture unissent dans un seul regard ces deux évènements. Or il peut arriver qu’un homme connaisse l’heure de sa mort, soit parce que Dieu lui a dit, comme on le voit pour certains saints, soit parce qu’il la conjecture avec l’art médical ; soit qu’il la provoque par le suicide. Donc il doit être possible de connaître la date de la fin du monde.

Objection 6 : Il semble que le Christ au moins connaisse la date de la fin du monde puisque tout jugement lui a été remis[188].

Objection 7 : Que la fin du monde doive avoir lieu, c’est une certitude de foi puisque c’est une prophétie de prédestination. Il doit en être |de même pour la date de cet évènement. Elle doit donc être connaissable par certains et annoncée d’une manière cachée par les Écritures.

Objection 8 : Il semble que la fin du monde ne se produira pas aussitôt après le retour du Christ mais après 1000 années de règne qu’il aura passé en paix sur la terre d’après le livre de l’apocalypse 20.

 

Cependant : Jésus affirme[189] : « Quant à la date de ce jour, et à l’heure, personne ne les connaît, ni les anges des cieux, ni le fils, personne que le Père seul ». C’est pourquoi tout prophète qui prétend annoncer une date ou une année fait œuvre de présomption et ne doit pas être suivi. Il ne peut dire qu’une chose, c’est que la fin est pour « bientôt » [190], puisque, chacun le sait, la mort individuel ne tarde jamais à arriver, en général moins d’un siècle après le moment où l’on parle.

 

Conclusion : Si la fin du monde n’a pas eu lieu juste après la première venue du Christ, c’est que Dieu a décidé de laisser un temps à l’homme pour qu’il puisse se convertir, selon saint Pierre[191] : « Le Seigneur ne retarde pas l’accomplissement de ce qu’il a promis, comme certains l’accusent de retard, mais il use de patience envers vous, voulant que personne ne périsse, mais que tous arrivent au repentir ». Il en sera peut-être de même lorsque l’Antéchrist sera là et que les derniers chrétiens observeront un nouveau retard. C’est pour cette raison que la date de la fin du monde est absolument inconnaissable par personne. Dieu peut la retarder comme il le veut, dans sa sagesse qui prévoit le salut du plus grand nombre. Pour mieux le comprendre, il faut se souvenir qu’il existe en effet deux sortes de prophéties :

1° Les prophéties de prédestinations qui sont données lorsque Dieu annonce un événement qui est fixé d’une façon immuable par sa providence. Ainsi, qu’une Vierge doive enfanter, que le Messie doive souffrir, que la fin du monde doive avoir lieu précédée par la venue d’un antéchrist, voici des prophéties qui se réalisent infailliblement, selon cette parole de Jésus[192] : « Pas un iota de la loi ne sera enlevée sans qu’elle soit accomplie ».

2° Les prophéties de menaces ou de promesses. Elles ne se réalisent que sous condition. Ainsi, lorsque le prophète Jonas annonçait la destruction de la ville de Ninive, il était sous-entendu qu’elle n’aurait lieu que si le peuple restait dans son péché. La ville s’étant convertie, la destruction n’eut pas lieu. Il en est de même de la date de la fin du monde : étant dépendante d’une condition à savoir le temps que Dieu laisse à l’homme pour se convertir, elle peut être reculée ou avancée selon sa miséricorde et à la prière de ceux qui sont proches de lui par la charité. Ainsi, nul ne peut connaître à l’avance une telle date car elle est, en ce qui concerne l’homme inconnaissable. On le voit parfois dans la vie des saints pour la fin des individus. Ainsi, le Padre Pio provoqua à sa prière de nombreuses fois la mort de ses pénitents juste après leur confession.

 

Solution 1 : Pour connaître la fin des choses dont nous connaissons le commencement, il est nécessaire d’en connaître aussi la mesure. C’est pourquoi, si nous connaissons le commen­cement d’une chose dont la durée est mesurée par le mouvement du ciel, nous pouvons en connaître la fin, parce que le mouvement du Ciel nous est connu. La durée physique du mouve­ment du ciel est connaissable par la science positive à travers de simples calculs. On sait que le soleil aura brûlé la totalité de son énergie dans quatre à cinq milliards d’années. Par contre, la durée théologique de ce monde a pour unique mesure la volonté divine qui nous est cachée. Dès lors, nous avons beau connaître le commencement, il nous est impossible d’en connaître la fin.

Solution 2 : Les 1260 jours dont parle l’apocalypse représentent la vie de l’Église dans sa totalité plutôt qu’un nombre déterminé d’années. La raison en est que la prédication du Christ, sur laquelle est fondée l’Église, a duré trois ans et demi, c’est-à-dire, un nombre de jours sensi­blement égal au précédent. Le nombre cité par Daniel ne se rapporte pas aux années qui doivent s’écouler jusqu’à la fin du monde ou à la prédi­cation de l’Antéchrist, mais à la durée de sa prédication même et de sa persécution.

Solution 3 : L’Ancien Testament est la figure du Nouveau, d’une manière générale et sans correspondance nécessaire des détails, d’autant plus que le Christ en a réalisé tous les symboles. C’est pourquoi saint Augustin répond à ceux qui voulaient compter les persécutions de l’Église en se basant sur les plaies d’Égypte : « À mon avis, ce qui se passe en Égypte ne figurait point prophétiquement ces persécutions. Il est vrai que les partisans de cette opinion font à ce sujet des rapprochements d’une ingénieuse habileté, mais ils ne sont point appuyés sur l’esprit prophétique, et, si l’esprit de l’homme parvient quelquefois à la vérité, quelquefois aussi il se trompe ». Ce mélange de vérités et d’erreurs se retrouve dans les prophéties de l’abbé Joachim. Nul ne connaîtra la date de la venue du Christ. C’est pourquoi le Seigneur met en garde contre les faux prophètes, à la fin des temps[193] : « Prenez garde de vous laisser abuser, car il en viendra beaucoup sous mon nom qui diront « c’est moi » et « le temps est tout proche ». N’allez pas à leur suite ». À la fin du monde, certains pourront cependant conjecturer la proximité du retour du Christ s’appuyant sur la réalisation des signes annoncés par l’Écriture sainte. Il reste que très peu seront capables de les interpréter selon leur vrai sens qui est d’abord esprit.

Solution 4 : S’il arrive que certains saints reçoivent avec joie la révélation de la date de leur mort, comme sainte Thérèse de l’Enfant Jésus lors de son premier crachat de sang, c’est parce qu’ils espèrent voir Dieu et le rapprochement du temps excite leur désir d’être bientôt en présence de la Sainte Trinité. Dieu sait, à travers une telle révélation, augmenter leur charité. Pour d’autres, la peur de la mort est utilisée pour l’augmentation de leur humilité et pour les inciter à se repentir de leur péchés. Dans tous les cas, ces révélations ont pour finalité le salut éternel de chacun. Une telle révélation les concerne donc personnellement. Il n’en est pas de même pour la fin de l’humanité en général dont la date précise ne concerne que Dieu seul, et dont l’approche en tant qu’elle est un événement général valable à chaque époque de l’univers suffit à effrayer les méchants et à provoquer l’espérance des saints.

Solution 5 : Par contre, il est vrai qu’à la fin des temps, certaines personnes éclairées par le Saint Esprit conjectureront la proximité de l’évènement, en s’appuyant sur des signes décrits par l’Écriture. Mais là encore, leur raisonnement pourra être mis en défaut par Dieu s’il estime nécessaire de laisser un délai au monde de l’Antéchrist afin qu’il aille jusqu’au bout de sa perversité et de l’apprentissage spirituel des âmes privées de l’espérance. Quant au suicide, qui permet à l’homme de décider lui-même de la date de sa mort, il ne peut être comparé à la fin du monde dont l’initiative viendra de Dieu. Il est probable que l’Antéchrist s’efforcera de provoquer cette autodestruction de l’humanité mais il n’y réussira pas, selon Daniel[194] : « Par son intelligence l’Antéchrist réussira dans la trahison. Il s’exaltera dans son cœur et détruira un grand nombre par surprise. Il s’opposera au Prince des Princes, mais, sans acte de main, il sera détruit ».

Solution 6 : Saint Grégoire le Grand écrit, en réponse à une question d’Euloge d’Alexandrie sur le passage de l’Écriture selon lequel « ni le Fils ni les anges ne connaissent le jour et l’heure » [195] : « Votre Sainteté pense très justement qu’il n’est pas à rapporter au Fils, considère comme tel, mais considéré comme corps, ce que nous sommes. Augustin dit aussi qu’on peut l’entendre du Fils en personne, parce que le Dieu tout-puissant parle parfois comme un homme, par exemple lorsqu’il dit à Abraham : « Maintenant, je sais que tu crains Dieu » [196]. Non que Dieu ait alors appris qu’il était craint, mais parce que, par lui Abraham a reconnu alors qu’il craignait Dieu comme nous parlons d’un jour heureux, non parce que le jour lui-même est heureux, mais parce qu’il nous rend heureux, de même le Fils tout-puissant dit qu’il ignore le jour que lui-même fait ignorer, non qu’il l’ignore, mais parce qu’il ne permet absolument pas qu’on le connaisse ».

Solution 7 : Il peut y avoir des avènements qui, pour une part sont annoncés par une prophétie de prédestination et pour une autre par une prophétie conditionnelle. Ainsi, le fait qu’une Vierge devait enfanter était connu par la foi juive d’une façon certaine à cause de la parole de Dieu en Isaïe[197]. Mais la date de cet évènement n’était connue de personne sinon Dieu puisqu’elle était liée à certaines conditions. Il en est de même pour la fin du monde qui aura lieu avec certitude mais à une date que Dieu seul connaît. Quant à ceux qui s’efforcent de la calculer en s’appuyant sur des savantes combinaisons des Écritures, ils font fausse route. Dieu peut en effet avancer ou reculer la date de la fin du monde en fonction de la prière des saints, de l’humilité des religions.

Solution 8 : Le IVe Livre d’Esdras[198] imaginait que les élus de la dernière génération mèneraient sur terre avec le Messie une vie bienheureuse de quatre cents ans. Cette idée était dans l’air, seule la durée du règne messianique variait selon les fantaisies de l’imagination. Elle subsistera longtemps dans la pensée juive. Le Millénarisme chrétien se rattache à une interprétation littérale du chapitre 20 de l’apocalypse. Il a revêtu plusieurs formes. Cérinthe, que le disciple bien-aimé avait en particulière horreur, promettait aux justes des derniers temps des jouissances toutes charnelles. Chez Papias, dont Bossuet a dit qu’il fut un très vieil auteur mais un très petit esprit, le rêve millénaire s’exprime avec une naïveté déconcertante. Rapportant les dires des presbytres, il imagine une terre nouvelle où l’on verra des vignes porter dix mille ceps, chaque cep ayant dix mille sarments, chaque sarment dix mille rameaux, chaque rameau dix mille grappes, chaque grappe dix mille grains de raisin dont chacun se disputera l’honneur de devenir la nourriture d’un élu. De nos jours, les Témoins de Jéhovah sont les plus célèbres des Millénaristes. Les textes cité de l’apocalypse doivent être confrontés à tous les autres annonçant le retour du Christ. De cette confrontation, il ressort que sa signification n’est pas celle d’un texte de type historique mais symbolique. De fait, il annonce la possibilité pour l’homme ou l’Église fidèle d’un règne de paix permanent au fond de l’âme par la présence fidèle du Messie quelles que soient les épreuves vécues extérieurement. C’est ce qu’expérimentait Sainte Thérèse de l’Enfant Jésus qui, soumise à l’agonie d’une maladie incurable disait[199] : « Je ne regrette pas de m’être livré à l’amour »

 

Article 5 : Peut-on dire au moins que nous sommes dans les derniers temps ?

Objection 1 : Si l’homme ne peut en aucune manière connaître la date de la fin du monde, il semble présomptueux de sa part de dire que les derniers temps sont arrivés.

Objection 2 : Saint Paul met en garde les fidèles contre ceux qui les effraient par l’annonce de l’imminence du retour du Christ et qui les poussent à tout vendre et à ne plus se marier pour être bien prêts selon cette parole du Seigneur[200] : « Malheur à celle qui sera enceinte ce jour-là ».

Objection 3 : Il semble que nul ne puisse dire si nous sommes dans les derniers temps selon cette parole du Seigneur[201] : « comprenez-le bien : si le maître de la maison avait su à quelle heure de la nuit le voleur devait venir, il aurait veillé et n’aurait pas permis qu’on perçât le mur de sa demeure. Ainsi donc, vous aussi, tenez-vous prêt car c’est à l’heure que vous ne pensez pas que le fils de l’homme va venir ».

Objection 4 : Saint Paul lui-même, ainsi que saint Jean se sont trompés sur la date du retour du Christ puisqu’ils écrivent qu’ « il revient bientôt »[202]. Or, voici des siècles que nous attendons. Donc nul ne doit dire que nous sommes dans les derniers temps.

 

Cependant : L’épître aux Hébreux dit[203] : « Encore un peu, bien peu de temps et celui qui vient arrivera et il ne tardera pas ». De même, le livre de l’apocalypse[204] : « Ne tiens pas secrète les paroles prophétiques de ce livre car le temps est proche ». Donc nous sommes dans les derniers temps.

 

Conclusion : Comme nous l’avons montré précédemment, dire que nous sommes dans les derniers temps avant la fin du monde peut avoir plusieurs sens.

1° En un premier sens, l’Écriture peut entendre la dernière phase de l’humanité dans son pèlerinage terrestre avant le jugement général du monde. En ce sens, nous pouvons dire que nous sommes dans le dernier temps depuis que le Christ est mort et ressuscité pour nous. En effet, le temps de la grâce sanctifiante est le dernier de la terre puisqu’il ne peut être suivi, selon le critère du rapport à Dieu, que par un seul état supérieur qui n’est pas de ce monde, la gloire.

2° En un second sens, l’Écriture peut entendre par derniers temps les derniers moments de cette quatrième phase de l’humanité, ceux que vivra la génération qui connaîtra le retour du Christ dans sa gloire. Là encore, deux interprétations sont possibles. La première consiste à dire que chaque génération de l’humanité est dans ce moment ultime puisque chaque homme de cette génération connaît à l’heure de sa mort le retour du Christ dans sa gloire. C’est pourquoi Jésus pouvait dire en vérité aux Juifs de sa génération[205] : « En vérité, en vérité, je vous le dis, cette génération ne passera pas que tout cela ne soit arrivé ». De même, saint Vincent Ferrier et d’autres saints pouvaient en vérité proclamer le retour du Christ dans sa gloire comme imminent.

La seconde interprétation consiste à regarder le retour du Christ glorieux que connaîtra la dernière génération de la terre au sens politique et médiatique du terme, quand selon Saint Paul[206] « la trompette finale sonnera et que ceux qui sont encore en vie sur la terre seront transformés sans passer par la mort ». En ce sens, on peut dire avec certitude que nous serons à la fin des temps quand tous les signes donnés de manière explicite par l’Écriture, confirmés par la Tradition et le Magistère de l’Église seront réalisés. Or ceux qui concernent Israël dans son histoire visible, jusqu’à sa conversion au Christ, ceux qui concernent l’Église et son martyre finale, la politique et le gouvernement mondial de l’Antéchrist[207] ne sont pas accomplis. Donc, au moment où j’écris, nous ne sommes pas dans la fin des fins mais seulement dans le dernier temps.

De plus, quand l’Écriture sera entièrement accomplie, il restera encore une incertitude : celle du délai que Dieu lassera à l’Antéchrist avant de le faire disparaître par le souffle de sa venue. De ce délai, nous ne savons rien. Il peut durer trois ans et demi ou trois millénaires, comme nous l’avons dit.

 

Solution 1 : Comme nous l’avons montré, il est impossible de dire avec certitude que nous sommes dans les derniers temps selon la dernière interprétation. Mais selon les deux premières, cela peut être proclamé sans qu’il y ait de présomption.

Solution 2 : Les faux prophètes dont parle saint Paul accompagnaient leurs annonces de dates précises, comme on le voit encore aujourd’hui dans certaines sectes religieuses. En cela, ils faisaient oeuvre de présomption. Ils poussaient leurs fidèles à attendre le retour du Christ d’une manière fiévreuse en leur faisant davantage vivre du merveilleux de l’évènement que de la charité et de l’espérance qui lui donnent sens. De plus, ils parlaient ainsi dans leur orgueil mégalomaniaque de se faire passer pour des intimes de Dieu. C’est ce à quoi voulait s’opposer saint Louis quand on lui demandait « ce qu’il ferait si on lui annonçait pendant la messe que le Christ était en train d’apparaître dehors ». Il répondait : « Je resterai à prier, là où je suis ».

Quant aux femmes enceintes, elles seront malheureuses au jour du retour du Christ non à cause de leur état mais à cause de l’attachement aux biens de la terre que symbolise ici la grossesse. De même, ceux qui possèdent quelque bien et s’y attachent en souffriront puisqu’ils n’emporteront rien dans l’autre monde.

Solution 3 : De même que la mort peut frapper chaque individu n’importe quand, à la manière d’un voleur dans la nuit, de même le retour du Christ se fera sans prévenir.

Solution 4 : Quand le Christ annonce qu’il revient bientôt ou quand les saints proclament la même chose, ils ne se trompent pas puisque chaque homme ne dispose que de quelques années avant la mort qui correspond pour lui au retour du Christ dont l’apparition le surprend à ce moment.

Mais si l’on entend ces prophéties par rapport au retour ultime de Jésus, selon le troisième sens alors il faut répondre comme saint Pierre[208] : « Devant le Seigneur, un jour est comme mille ans et mille ans sont comme un jour ». Le bientôt de Dieu n’est donc pas comme notre bientôt.

Enfin lorsque le Seigneur annonce à ses disciples[209] : « En vérité je vous le dis, il en est ici présents qui ne goûteront pas la mort avant d’avoir vu le fils de l’homme venant avec son royaume », il ne parle visiblement pas de sa venue définitive mais à la fois des signes glorieux de sa venue (comme le don de l’Esprit Saint fait à la Pentecôte, la prédication opérée par les apôtres jusque dans la capitale du monde qui était Rome et la ruine de Jérusalem qui scelle la fin de l’Ancienne Alliance) et à l’apparition glorieuse qu’il a effectivement donné à tous lorsqu’ils sont morts.

 

Article 6 : La fin du monde consiste-t-elle dans le retour glorieux du christ ?[210]

Objection 1 : La fin du monde ne peut consister dans le retour du Christ. Selon les témoins de Jéhovah, qui lisent l’Écriture Sainte dans sa lettre, c’est par la guerre, les catastrophes de toutes sortes que se terminera le monde.

Objection 2 : Le retour du Christ pourra être daté à partir du moment où l’Antéchrist paraîtra avec son gouvernement mondial humaniste et adonné à l’ange révolté. En effet, le délai entre la réalisation de ces deux prophéties sera de trois ans et demi, d’après Daniel. Ceci semble confirmé par saint Matthieu[211] : « si ces jours-là (ceux de l’Antéchrist) n’avaient été abrégés, nul n’aurait eu la vie (la foi) sauve ».

 

 

Cependant : Alors, le Christ reviendra dans sa gloire accompagné des saints et des anges. Et il enverra ses anges avec une trompette sonore, pour rassembler ses élus des quatre vents, des extrémités des cieux à leur extrémité. La preuve suprême que Dieu nous aime sera donnée puisque le Christ reviendra alors que nous ne l’attendrons plus.

 

 

Conclusion : Après le retour du Christ, le temps sera comme suspendu. Ceux qui auront choisi de l’aimer vivront ces heures en sa présence dans une extase perpétuelle. Ils ne pourront détacher leur âme de sa vue Ils ne verront pas seulement sa beauté physique mais aussi celle de son cœur : tous les symboles utilisés jadis par le Seigneur auprès de sainte Marguerite-Marie prendront sens. Au même moment, ceux parmi les sauvés qui auront à purifier quelque chose seront éloignés pendant un moment de sa vue. Cela ne durera qu’un instant mais cela pourra leur paraître des heures tant ils aimeront et ne supporteront pas son absence. Le purgatoire est fait ainsi : il ne dure sans doute pas longtemps en temps objectif mais sa durée intérieure peut sembler aussi longue que des siècles[212] : « Avez vous vu mon Bien-aimé ? ». Ceux qui auront refusé le Christ seront aussi sur la terre en ces instants mais ils fuiront. Ils ne se sauveront pas dans d’autres lieux, le Christ étant présent partout à la fois. Ils fuiront en eux-mêmes, essayant de détourner leurs pensées de son regard insupportable. Ils crieront : « Va-t-en! Ne vois tu pas que nous ne voulons pas de toi ni d’aucun de ceux qui sont avec toi. Pourquoi restes-tu ainsi à nous regarder. Veux-tu donc nous torturer ? ». Leur choix de solitude sera, on le voit à travers ces mots, définitif.

Lorsque la dernière âme du purgatoire sera sortie de sa solitude entrant avec tous les autres élus dans la vision de la Splendeur, alors tout sera accompli sur la terre et la fin du monde d’ici-bas sera proclamée. La terre telle qu’elle est n’aura plus de sens ni d’utilité, les hommes ayant tous sans exception fait leur choix pour l’éternité.

 

Solution 1 : Les malheurs précéderont la fin du monde mais ne seront pas par eux-mêmes la cause de la fin. Ils seront plutôt une préparation de l’esprit des hommes pour qu’ils désirent la venue du Sauveur. D’autres part, l’interprétation des malheurs est trop littérale chez les témoins de Jéhovah comme chez beaucoup de confessions millénaristes. Le sens des textes de l’apocalypse est symbolique, ce qui ne veut pas dire qu’il n’ait pas une réalisation littérale, mais que sa signification est bien plus universelle et multiple. Le premier des sens est spirituel. Cela signifie que Dieu peut très signifier par le symbolisme des monstres grouillants un temps de paix civile et de concorde sociale, accompagné de l’individualisme, donc du danger le plus grave pour le salut des âmes.

Solution 2 : Trois ans et demi ne symbolisent pas autre chose que le temps de la prédication du Christ. Cela signifie que l’Antéchrist singera le Messie pour réaliser, comme lui, la prédication et la réalisation d’une humanité renouvelée.

Quant à l’interprétation de la durée réelle de ce temps, il est impossible de la faire. Si telle est la volonté de Dieu, le monde de l’Antéchrist durera des siècles. Ceci est peu probable à cause de la nature humaine dont la fragilité est telle que, séparée de Dieu, elle finit par se détruire elle-même. Mais ce n’est pas impossible tant l’intelligence politique de l’Antéchrist et de ses successeurs peut réussir à structurer dans un équilibre fragile entre loi et liberté, une vie où la recherche du bonheur individuel est l’unique valeur. Un tel monde, spirituellement vide, pourra tout de même disposer les hommes au salut. En effet, les souffrances spirituelles et psychologiques seront telles que jamais on aura vu un désir plus grand d’un salut.

La foi demeurera, même si ce n’est que d’une manière privée et chez un petit nombre dispersé. En effet, l’Antéchrist n’aura pas accès au domaine secret de la conscience où l’appelle de Dieu seul peut entrer.

 

Article 7 : Tous les hommes mourront-ils ?

Objection 1 : Il semble que tous les hommes doivent mourir après la venue du Christ et avant de résurrection. En effet la justice de Dieu a condamné la nature humaine toute entière, en punition du péché d’Adam dont tous les descendants contractent la souillure du péché originel. Or la punition du péché originel, c’est la mort.

Objection 2 : La sainte Écriture enseigne la résurrection universelle. Or ressusciter ne se dit proprement que d’un corps tombe en dissolution, comme le déclare saint Damascène.

Objection 3 : Les lois naturelles montrent que les choses viciées et corrompues ne peuvent être régénérées qu’en passant par la mort : le vinaigre ne peut devenir vin qu’en cessant d’être pour se retrouver liqueur de la vigne. Dès lors, puisque la nature humaine a subi une altération entraînant la nécessite de mourir, la mort est pour elle le moyen nécessaire pour parvenir à l’immortalité.

 

Cependant : Le texte du credo dit que le Seigneur viendra juger les vivants et les morts. Donc il y aura des hommes encore vivants lors de son retour. En outre, saint Paul[213] dit explicitement : « Je vais vous dire un mystère : nous ne mourrons pas tous mais nous serons tous transformés, au son de la trompette finale, car elle sonnera la trompette, et les morts ressusciteront incorruptibles, et nous, nous serons transformés ». Donc ceux qui seront encore vivants lors du retour du Christ ne mourront pas.

 

Conclusion : Les Pères se sont partagés sur cette question. Mais l’opinion la plus sûre, si l’on s’en tient à l’Écriture selon son texte grec, c’est que les hommes de la dernière génération, ceux qui verront le retour du Seigneur ne mourront pas. Ils seront « revêtus d’immortalité comme d’un vêtement surajouté » et cela est conforme à la sagesse de Dieu :

1° par sa passion, le Christ a opéré une rédemption totale du péché originel. Il a pris sur lui le péché des hommes, se faisant péché pour nous. Il a payé dans sa chair la totalité de la dette de peine due pour ce péché. Il a donc libéré l’homme de la mort selon cette parole du Seigneur[214] : « Celui qui vit et croit en moi ne mourra jamais ». Et s’il s’avère qu’après la rédemption opérée par le Christ, les hommes régénérés par le baptême meurent tout de même, c’est à cause d’un bien supérieur qui en sort. Il s’agit d’un bien de l’âme puisque celui qui meurt découvre l’humilité de sa condition et peut offrir sa mort en union de charité avec celle du Christ. À la fin du monde, lorsque la puissance de la rédemption opérée par le Seigneur sera manifestée en plénitude, il convient que la peine de la mort disparaisse aussi. C’est pourquoi la dernière génération ne mourra pas.

2° Et on peut donner une deuxième raison à cela ; un désir naturel et universel doit être réalisé en quelques individus. Or ce que nous voulons tous, « c’est de n’être pas dépouillés mais revêtus ». Quelques hommes au moins seront donc revêtus de l’immortalité, sans que la mort les ait dépouillés de leur corps, à l’image de la Vierge Marie.

 

Solution 1 : les quatre dernières demandes de l’oraison dominicale se rapportent à la vie présente et, par l’une d’elle, l’Église demande pour cette vie, la remise de toutes les dettes. Cette prière ne saurait être vaine[215] : « tout ce que vous demanderez au Père en mon non, il vous l’accordera ». Or une de ces dettes, contractées par le péché d’Adam, c’est de naître avec le péché originel. Dieu a remis cette dette à la Vierge Marie en prévision de sa maternité divine ; de même il remettra la mort qui est la peine du péché originel à quelques-uns à la fin du monde.

Solution 2 : Lorsque Jésus dit que[216] « tous ceux qui sont dans les tombeaux entendront la voix du fils de Dieu et ressusciteront », il ne l’entend pas que tous les hommes sans exception seront dans les tombeaux. Il exclut en particulier la Vierge Marie qui n’a pas connu la mort et la dernière génération humaine lors de la fin du monde.

Solution 3 : La résurrection ne suit pas les lois naturelles. Elle est une oeuvre de la puissance divine qui peut réaliser la même chose à partir de plusieurs points de départ. Ainsi, les morts ressusciteront à partir d’une matière décomposée ; les vivants seront transformés dans leur corps, qui sera revêtu d’un nouveau mode d’être.

 

Article 8 : Cette fin sera-t-elle une destruction ou une transfiguration dans un autre monde ?

Objection 1 : Il en est de la glorification du monde dans son ensemble comme de celle du corps de l’homme pris en particulier. Or Dieu utilisera deux manières pour élever le corps à la gloire : en le transfigurant immédiatement dans une forme supérieure, comme on le voit pour le corps de Marie ; en le détruisant par la mort puis en le ressuscitant, comme c’est le cas pour le reste de l’humanité soumise au péché originel. Or le monde matériel n’a pas commis le péché originel puisqu’il en est incapable. Il est donc inutile qu’il soit d’abord détruit par le feu.

Objection 2 : Dieu dit à Noé[217] : « Plus jamais je ne frapperai les vivants comme je l’ai fait ». Si donc Dieu détruit le monde avant de le transformer, il fera mentir sa parole.

Objection 3 : Certaines parties de l’univers matériel sont trop éloignées de la terre pour avoir pu être rendues impures par le péché de l’homme. Il semble que celles-là au moins seront glorifiées dans un autre monde sans passer par la destruction.

 

Cependant : Saint Pierre écrit[218] : « Il viendra le jour du Seigneur, comme un voleur ; en ce jour-là, les cieux se dissiperont avec fracas, les éléments embrasés se dissoudront, la terre avec les oeuvres qu’elle renferme seront consumes. Ce sont des nouveaux cieux et une terre nouvelle que nous attendons selon sa promesse, où la justice habitera ».

 

Conclusion : Pour répondre à cette question, il faut considérer la fin du monde à la manière d’un mouvement. Dans tout mouvement, il y a un terme de départ, un terme final et, entre les deux, un devenir. À la fin du monde, le point de départ sera le monde terrestre tel qu’il est aujourd’hui, c’est-à-dire un monde adapté à l’état de l’homme, corruptible et soumis au changement ; le terme final sera un monde nouveau adapté au corps de l’homme après sa résurrection, c’est-à-dire un monde glorifié, incorruptible et immuable. Il y aura donc entre ces deux mondes une différence radicale de nature. La matière devra être transformée par Dieu au point d’assumer une nouvelle forme sans commune mesure avec l’ancienne, selon saint Paul : « Ce qui est corruptible revêtira l’incorruptibilité », afin de devenir un monde adapté nouvel état de l’homme.

Or, qu’une matière assume une autre forme, cela peut se faire de deux manières :

1° par destruction de la forme antérieure. Ainsi, l’artiste qui veut à partir du bronze d’une statue faire une autre statue différente est obligé de faire fondre la première et donc d’en détruire la forme.

2° En surélevant la forme antérieure à une autre forme supérieure. Ainsi l’homme est capable d’assumer la matière physique extérieure pour en faire le corps humain. C’est ce qu’on voit dans l’assimilation nutritive.

En ce qui concerne la fin de notre univers corruptible, elle se produira selon ces deux manières :

1° De la première manière pour les parties de l’univers physique qui auront été souillées par les péchés de l’homme. C’est ce que nous enseigne saint Pierre. Et cela est convenable à cause du désordre lié au péché dont la marque est visible sur la terre entière. De même que, après le péché originel, le corps de l’homme est soumis à la mort, de même il convient que notre monde soit détruit par le feu avant d’être renouvelé. Le feu purificateur doit effacer toute trace des oeuvres de péché, aussi bien dans l’univers que, analogiquement, dans le corps humain par la mort et dans son âme que purifie le feu du purgatoire. C’est donc à partir d’une matière revenue à son état virginal que Dieu façonnera un monde nouveau.

2° De la seconde manière pour les parties de l’univers qui, étant trop éloignées de l’homme, n’ont pas subies les influences négatives de sa présence. Cette partie du monde sera simplement revêtue d’incorruptibilité, sans subir auparavant la nécessité d’une purification par le feu. Ce sera le cas des astres que nous pouvons observer, bien qu’ils soient situés à des distances considérables.

 

Solution 1 : Le monde doit être transfiguré pour deux raisons :

1° La première, et la plus fondamentale est qu’il a été créé dans une structure d’entropie. La lois de dégradation de la matière n’a pas pour cause le péché originel mais quelque chose de plus radical : c’était un séjour provisoire pour Adam et Ève et leurs enfants, péché ou non. Cette corruptibilité n’aura plus d’utilité dans l’éternité.

2° La seconde raison concerne non l’univers dans son ensemble mais notre terre. Ce monde matériel n’a pas commis le péché originel mais a été marqué par ses conséquences. Ce monde avait en effet été créé pour l’homme et en dépendance harmonieuse de sa sainteté. Par le péché originel, cet ordre a été détruit et les éléments se sont désorganisés : le vice a corrompu les choses bonnes et, partout où est passé l’homme, il reste les vestige de quelques cadavres de son impureté. Même les plus belles oeuvres de l’homme, parfois faites pour Dieu comme le Temple de Jérusalem et les cathédrales, ne sont pas exemptes de ce nouvel ordre fondé sur les vanités. Il convient donc que ces oeuvres soient détruites par un feu, de la même manière que la mort détruit le corps des pécheurs.

Solution 2 : Cette destruction du monde et son renouvellement auront lieu après le retour glorieux du Christ sur la terre, lorsque tous les hommes auront été jugés et de manière concomitante à la résurrection ou à la transfiguration de leur corps. Ce n’était pas le cas pour le déluge. Pour chaque homme, la fin du monde aura donc déjà eu lieu.

Solution 3 : Comme on l’a montré, le feu ne purifiera la terre et les lieux touchés par l’homme qu’à cause de l’influence de son péché qui doit être purifiée. Il n’est donc pas nécessaire que le reste de l’univers soit détruit avant d’être transformé.


NOTES

[1] Apocalypse 11, 5.

[2] Luc 21, 12.

[3] Apocalypse 13, 17.

[4] Luc 21, 14.

[5] Colossiens. 1, 24.

[6] Matthieu 10, 23.

[7] Actes 16, 6.

[8] Colossiens 1, 23.

[9] Vitalini Sandro, Théologie de l’au-delà, Université de Fribourg, 1980, p. 76.

[10] Marc 13, 10.

[11] Genèse 3, 15.

[12] 1 Pierre 3, 19.

[13] Jean-Paul II est-t-il celui qui a réalisé cette prophétie ?

[14] Psaume 127, 1.

[15] Voir Question 8, article 3.

[16] Jean 3.

[17] Voir Y. Congar, Le mystère du temple, Cerf, 1957, 1ère Partie, Paris.

[18] Matthieu 16, 18.

[19] Jean 21.

[20] Apocalypse 19, 7.

[21] Apocalypse 13, 7.

[22] Jean 12, 24.

[23] Catéchisme de l’Eglise Catholique, 1997, 675 à 677.

[24] Jean 21, 18 à 23.

[25] Voir article 4.

[26] Jean 21, 19.

[27] Matthieu 24, 21.

[28] Actes 1, 7.

[29] Jean 21, 19.

[30] Matthieu 24.

[31] Daniel 9.

[32] Apocalypse 11, 7.

[33] Jean 21, 18-23.

[34] Voir Daniel 8, 9.

[35] Voir L’Anneau du Pécheur de Jean Raspail, qui raconte la manière dont disparut du monde visible la papauté d’Avignon.

[36] Matthieu 16, 18.

[37] Jean 21, 17.

[38] Voir «Ad tuendan Fidem », lettre apostolique sur le Magistère de l’Église, Documentation Catholique 1998, n°2186.

[39] Jean 21, 18.

[40] Jean 11, 49.

[41] Jean 12, 20.

[42] Luc 19, 28.

[43] Jean 13.

[44] Depuis Vatican II, l’Eglise semble réaliser ce chemin de kénose à la lettre.

[45] Daniel 1, 31.

[46] Bibliographie sur le sens de la liturgie :

Théodore Strawinsky, «en quête de l’art sacré », Nova et Vetera, 1956/2, p. 81.

Maritain J. : Liturgie et contemplation, Paris, Desclée de Brouwer, 1960.

«Quelques réflexions sur le sacrifice de la messe », Nova et Vetera43, (1968), 1-35.

«Signe et symbole », dans : quatre essaies sur l’esprit de la condition charnelle, Paris Desclée de Brouwer, 1939, 63-127.

L’Église du Christ, la personne de l’Église et son personnel, Paris, Desclée de Brouwer, 1966.

[47] Apocalypse 12, 8.

[48] Daniel 11, 31.

[49] Proverbes 21, 1.

[50] Luc 21, 28.

[51] Jean 19.

[52] Marc 14, 52.

[53] Jean 12, 4.

[54] Jean 12, 6.

[55] Jean 13, 6.

[56] Matthieu 24, 15.

[57] Matthieu 16, 18.

[58] Luc 21, 28.

[59] Jean 4, 21.

[60] 2 Macchabées 4, 5.

[61] Donatienne de Lacheisserie, objection, Bois-le-Roi, septembre 1994.

[62] Matthieu 24, 15.

[63] Apocalypse 20, 8.

[64] 2 Macchabées 10.

[65] Luc 22, 32.

[66] Jean 21, 23.

[67] Jean 20, 28.

[68] Jean 19, 26.

[69] Matthieu 24, 22.

[70] Luc 1, 45.

[71] L’Église a fait de saint Louis-Marie Grignon de Montfort un Docteur de l’Église pour ses deux écrits sur Marie : «Le secret de Marie », «Le traité de la vraie dévotion à la sainte Vierge ».

[72] Luc 10, 21.                                                                                                                    

[73] Eléments de bibliographie :

COATHALEM H, Le parallélisme entre la Vierge et l’Église dans la tradition latine jusqu’a la fin du XIIe siècle. Univ. Greg Rome, 1954

GARRIGUES J. M. et LE GUILLOU M. J, « Statut eschatologique et caractère ontologique de la succession apostolique », RT 75 (1975), 395 117

CONGAR. La Sainte Église, Paris, Cerf (Unam Sanctam, 41), 1963.

«La Personne Église », RT, 71, (1971), 613 640.

FEUILLET A- «Le temps de l’Église d’après le IVe évangile et l’Apocalypse », MD 65 (1961), 60-79

JOURNET Ch, 1. L’Église du Verbe incarné, I, II, III. Paris, Desclée de Brouwer, 1951-1969.

Esquisse du développement du dogme marial, Paris. Alsatia. 1954.

Le mal, Paris, Desclée de Brouwer, 1961. Théologie de l’Église, Paris, Desclée de Brouwer, 1958.

La volonté salvifique sur les petits enfants, Paris, Desclée de Brouwer, 1958.

« L’Église de Dieu. Le livre du p. Bouyer », Nova et Vetera 46 (1971), 129-147.

« La sainteté de l’Église : le livre de Jacques Maritain », Nova et Vetera 46 (1971), 1-33.

« Qui est membre de l’Église ? », Nova et Vetera 36, 193-203. Repris et amélioré dans : L’Église du Verbe incarné, t. II (2e éd)., 1304 1314.

« L’Église et la femme », Nova et Vetera 4 (1957), 299-313.

NICOLAS J. H. : «Le Christ centre et fin de l’histoire » RT 81 (1981), 257-380.

« Le Saint-Esprit principe de l’unité de l’Église » : Atti del congresso teologico internazionale di pneumatologia, Roma Libr ed Vaticana, 1983. 1359-1380

BREMOND H. « Histoire littéraire du sentiment religieux en France », Bloud et Gay, 1924 et ss.

[74] Traité de la vraie dévotion à la sainte Vierge, éd. Du seuil, Paris, 1966, p. 55.

[75] Citation de sainte Thérèse de l’Enfant Jésus.

[76] A. Feuillet, La femme vêtue du soleil (Apocalypse 12), et la glorification de l’épouse du Cantique des cantiques (6, 10), Nova et Vetera, 1984, 1.

[77] Luc 2, 51.

[78] Apocalypse 19, 17.

[79] Apocalypse 10, 2.

[80] Apocalypse 10, 6.

[81] Sur l’Apocalypse, on peut consulter :

L. Cerfaux-J. Cambier, L’Apocalypse de saint Jean lue aux chrétiens, Paris, l955. (Initiation pour de bons exégètes)

D. Mollat, Une lecture pour aujourd’hui : L’Apocalypse, Le Cerf, Paris, 1984. (Notes laissées du plus haut intérêt pour pénétrer l’esprit johannique, par un des meilleurs connaisseurs)

p. Prigent, Apocalypse e liturgie, Cahiers théologiques, Neuchâtel, l965. Du même, Et le Ciel s’ouvrit, L’Apocalypse de saint Jean, coll. « Lire la Bible », Le Cerf, 1980. (Commentaire suivi, par un professeur protestant).

[82] Dans son Traité de la vraie dévotion à Marie, (lire plus loin° saint Louis-Marie Grignon de Montfort annonce explicitement la venue de tels témoins. Cette interprétation là est même, si l'on considère la façon dont Dieu nous sauve, aussi certaine que les autres. Dieu ne peut laisser les hommes affronter l'époque de l’Antéchrist sans proposer à ceux qui seront attentifs, toutes les armes de la survie spirituelle. S'il envoie sa mère dans de nombreuses apparitions, c’est qu’elle est la plus capable de former des âmes contemplatives. Mais il lui adjoint de nombreux témoins afin que toutes les sensibilités entendent le message. Certains sont déjà venus et, unique parmi tous les autres, sainte Thérèse brille au cœur de l'apostasie en marche. Son témoignage est le même que celui d’Énoch : «Elle marcha avec Dieu, puis elle disparut car Dieu l’enleva! ” A la fin du monde, lors­que l'Antéchrist viendra, les hommes croyants n’auront qu’à l'imiter : marcher avec Dieu dans le secret de la charité. Alors Jésus reviendra et les enlèvera.

Vers la fin du monde, avant que le règne de l’Antéchrist ne rende toute prédication impossible, il est probable que le Seigneur suscitera des nouveaux Elie qui prêcheront dans le monde entier l’Evangile. C'est ce que Jésus semble annoncer («semble » car ces textes ont plusieurs niveaux de sens) : «Cette bonne nouvelle sera annoncée dans le monde entier, en témoignage à la face de toutes les nations. Et alors viendra la fin.” (Matthieu 24, 14). Saint Louis-Marie Grignon de Montfort décrit les apôtres des derniers temps de la façon suivante (Traité de la vraie dévotion à la Sainte Vierge, édition du seuil, Paris, 1966, 49ss) :

“ Ces grandes âmes, pleines de grâce et de zèle, seront choisies pour s'opposer aux ennemis de Dieu, qui frémiront de tous côtés, et elles seront singulière­ment dévotes à la Très Sainte Vierge, éclairés par sa lumière, nourries de son lait, conduites par son esprit, soutenues par son bras et gardées sous sa protection, en sorte qu'elles combattront d'une main et édifieront de l’autre. D'une main, elles combattront, renverse­ront, écraseront les hérétiques avec leurs hérésies, les schismatiques et leurs schismes, les idolâtres avec leur idolâtrie, et les pécheurs avec leurs impiétés. et, de l’autre main, elles édifieront le temple du vrai Salomon et la mystique cité de Dieu. ” “ Mais qui seront ces serviteurs, esclaves et enfants de Marie ? Ce seront un feu brûlant, ministres du Seigneur qui mettront le feu de l'amour divin partout. Ce seront comme des flèches dans la main du puissant (ps. 126, 4), dans la main de la puissante Marie pour percer ses ennemis. Ce seront des enfants de Lévi, bien purifiés par le feu de grandes tribulations et bien collés à Dieu, qui porteront l’or de l’amour dans le cœur, l'encens de l'oraison dans l’esprit et la myrrhe de la mortification dans le corps, et qui seront partout la bonne odeur de Jésus-christ aux pauvres et aux petits, tandis qu'ils seront une odeur de mort aux grands, aux riches et aux orgueilleux mondains.

Ce seront des nues tonnantes et volantes par les airs au moindre souffle de l’Esprit saint, qui, sans s’attacher à rien ni s’étonner de rien, ni se mettre en peine de rien, répandront la pluie de la parole de Dieu et de la vie éternelle. ils tonneront contre le péché, ils gronderont contre le monde, ils frapperont le diable et ses suppôts, et ils perceront d'outre en outre, pour la vie ou pour la mort, avec leur glaive à deux tranchants de la parole de Dieu, tous ceux auxquels ils seront envoyés de la part du Très-Haut.

Ce seront des apôtres véritables des derniers temps, à qui le Seigneur des vertus donnera la parole et la force pour opérer des merveilles et remporter des dépouilles glorieuses sur ses ennemis ; ils dormiront sans or ni argent et, qui plus est, sans soin, au milieu des autres prêtres, et ecclésiastiques et clercs ; et cependant ils auront les ailes argentées de la colombe, pour aller avec la pure intention de la gloire de Dieu et du salut des âmes, où le Saint-Esprit les appellera, et ils ne laisseront après eux, dans les lieux où ils auront prêché, que l’or de la charité qui est l’accomplissement de toute la loi.

Enfin, nous savons que ce seront de vrais disciples de Jésus-Christ, qui marcheront sur les traces de sa pauvreté, humilité, mépris du monde et charité, enseignant la voie droite de Dieu dans la pure vérité, selon le saint Evangile, et non selon les maximes du monde, sans se mettre en peine ni faire acception de personne, sans épargner, écouter ni craindre aucun mortel, quelque puissant qu'il soit. Ils auront dans leur bouche le glaive à deux tranchants de la parole de Dieu ; Ils porteront sur leurs épaules l'étendard ensanglanté de la Croix, le crucifix dans la main droite, le chapelet dans la gauche, les sacrés noms de Jésus et de Marie sur leur cœur, et la modestie et mortification de Jésus-christ dans toute leur conduite. Voilà de grands hommes qui viendront, mais que Marie fera par ordre du Très-Haut pour étendre son empire sur celui des impies, idolâtres et Mahométans. Mais quand cela sera-t-il ? Dieu seul le sait : c’est à nous de nous taire, de prier, soupirer et attendre : Expectans expectavi. ”

[83] 2 Macchabées 10, 29.

[84] Les anciens juifs croyaient en la venue d’Énoch et d’Elie eux-mêmes, à partir d’un paradis terrestre où ils attendaient vivants leur heure. Nous ne nous attarderons pas sur cette vision dont l’Evangile manifeste suffisamment le caractère mythologique’cf Marc 9, 12-13). Consulter aussi :

Bellarmin, Apologia, Opera, éd. Vives, t. 12, p. 171-176.

Grail, Jean-Baptiste et Elie, «Vie spirituelle », juin 1949, 8-106.

Augustin, In Joan, 4, 5-6, P. L, 35, 1408.

[85] Romains 11, 16.

[86] Apocalypse 3, 13.

[87] Genèse 5, 22.

[88] 2 Romains is 2, 11.

[89] Matthieu 17, 12.

[90] A Grail, Jean-Baptiste et Élie, «Vie spirituelle », juin 1949.

[91] Saint Césaire d’Arles commente ce texte de l’Apocalypse (Collection les Pères dans la foi, Desclée de Brower, p. 88) «Et je donnerai à mes deux témoins c’est-à-dire aux deux Testaments, de prophétiser et ils prophétiseront pendant mille deux cent soixante jours ». Il a dit le nombre de la dernière persécution, de la paix future et de tout le temps qui s’écoule à partir de la passion tu Seigneur : parce que l’un et l’autre temps ont le même nombre de jours, ce que l’on dira en son lieu. « Couverts de sacs » c’est-à-dire de cilices, du fait qu’ils sont établis dans les rangs des pénitents, c’est-à-dire de ceux qui confessent leurs péchés, car il les dit couverts de sacs par esprit d’humilité.

«Et lorsqu’ils auront achevé leur témoignage la bête qui monte de l’abîme leur fera la guerre ». Il montre ouvertement que ces choses arriveront avant la dernière persécution, quand il dit : «Lorsqu’ils auront achevé leur témoignage ».

«Et si quelqu’un veut leur nuire ou les tuer un feu sort de leur bouche et dévore leurs ennemis » c’est-à-dire si quelqu’un nuit ou a voulu nuire à l’Église, à la prière de sa bouche il sera consumé par le feu divin soit dans le présent pour sa correction, soit dans le siècle à venir pour sa damnation.

«Sur les places de la grande ville », c’est-à-dire au milieu de l’Église ». Et les peuples de divers peuples, tribus et langues, verront leur corps pendant trois jours et la moitié d’un jour » c’est-à-dire trois années et six mois ; En effet il mêle les temps, tantôt le présent, tantôt le futur, comme le Seigneur dit : «Une heure viendra où tout homme qui vous aura tué, estimera qu’il a rendu honneur à Dieu ».

[92] La mort et le jugement dernier selon les enseignements de l’islam, Rayhane éditions 1991, Fdal HAJA, p. 57.

[93] A propos de l’Antéchrist, il existe de nombreuses interprétations depuis les plus matérielles aux plus métaphoriques. Consulter par exemple : D. Buzy, Antéchrist, D. B, Suppl, I, 1928, p. 305.

Bellarmim, Apologia, Opera, éd. Vivès, t. 12, p. 17I-176.

A Grail, Jean le Baptiste et Élie, «Vie spirituelle », juin 1949, p. 598-606.

L. Billot, De novissimis, p. 169-176, notes.

J. Pohle, Lehrbuch der Dogmatik, t. 3, 8e éd, par Giehrens, p. 703-709.

J. du Plessis, La caravane humaine, 1942.

Idem, Les derniers temps, 1936.

Halévy, L’essai sur l’accélération de l’histoire, 1948.

Un livre étrange, écrit en 1872, prédisait après de savants calcule sur les prophéties de tous les temps. en particulier celles de sainte Hildegarde, la fin du monde pour 1917.

J. du Plessis, Les derniers temps, ch. I.

Augustin, Epist, 199, 46. P. L, 33, 922-926.

[94] 2 Théssaloniciens 3, 4-5.

[95] 1 Jean 2, 18.

[96] 1 Jean 4, 3.

[97] Saint Augustin, les deux cités.

[98] Apocalypse 12, 3.

[99] Apocalypse 13, 1.

[100] L’opinion du Cardinal Ratzinger (La mort et l’au-delà, Communio-Fayard, 1994, p. 204) : «Dans les autres écrits du Nouveau Testament, quelques-uns de ces signes sont présentés de façon plus concrète. Ainsi, la figure de l’Antéchrist passe désormais au premier plan, surtout (bien que le terme n’y soit pas encore) en 2 Théssaloniciens 2, 3-10. Pour comprendre cette figure apocalyptique de l’ » Impie » (2, 8 ; cf. 2, 3), il faut noter que Paul le caractérise en citant substantiellement deux textes de l’Ancien Testament : Daniel 11, 36, et Ezéchiel 28, 2 Le premier de ces deux textes dépeint le grand persécuteur de la foi juive à l’époque hellénistique : Antiochus épiphane. Le second dépeint le prince mythique de Tyr, prince hybride et donc voué à l’échec. Que l`Antéchrist à venir soit décrit sous des traits qui, à l’origine, étaient ceux de deux autres personnages depuis longtemps passés à l‘histoire lui ôte quelque chose de son caractère strictement singulier, et range l’Antéchrist de la fin des temps dans une longue série de précurseurs déjà fondamentalement doté de ce qu’on trouvera chez lui au suprême degré. La même tendance s’inscrit encore plus fortement dans 1 Jean 2, 18-20, où apparaît le thème de l’Antéchrist. Dans ces deux derniers textes, les actuels fauteurs d’erreur en matière de christologie sont qualifiés d’ » Antéchrist » Il s’ensuit que c’est maintenant la «dernière heure «, mais qui précisément parce qu’elle est la dernière perd toute valeur chronologique et exprime finalement une certaine disposition d’esprit, une certaine proximité intérieure par rapport à la fin. Ce courant se poursuit dans les visions parallèles de l’Apocalypse : le vrai pendant de l’ » Antéchrist «, ce sont les deux animaux qui montent de la mer et de la terre (13, 1-18). Dans ce texte aussi, l’Antéchrist est considéré très concrètement du point de vue de l’histoire temporelle, et l’équivalence est établie entre lui et l’Etat romain divinisé tel qu’il se présente, d’une part, dans ses empereurs-dieux, et, d autre part, dans leurs prêtres.

Avec cette conception de l’Antéchrist va de pair une insistance plus marquée sur l’idée de persécution qui, dan l’Apocalypse, atteint son paroxysme. Le thème de la prédication évangélique et de l’universelle efficacité du salut qui vient du Christ a encore connu un ultime approfondissement dans le combat de Paul sur le thème d’Israël consécutif au plein épanouissement de l’Église des païens. L’histoire de l’exégèse de Romains 9-11 en a conclu que la première étape vers la fin des temps serait forcément la conversion historique d’Israël au Christ.

[101] Il finit par accepter le baptême afin de mourir garrotté plutôt que brûlé vif.

[102] 2 Jean 8 ;

[103] D. Buzy, Antéchrist, D. B, Suppl, I, 1928, p. 305.

[104] 2 Théssaloniciens 2, 4.

[105] 1 Jean 2, 18.

[106] Daniel 11, 31.

[107] 1 Jean 2, 19.

[108] Œuvres, Livre L, chap. 27.

[109] Aussi Gerhoch de Reichersberg (1093/1094-1169) voit-il juste, quand il considère l’Antéchrist comme une sorte de principe de l’histoire de l’Église, «qui ne se concrétise pas en une personne, mais sous mille figures. Il fait table rase de l’image traditionnelle : il faut n’y Voir qu’un être allégorique, et non historique. L’Antéchrist doit s’entendre littéralement de tout homme qui est Christo Filio Dei contrarius mérite ce nom. En d’autres termes, chacun est Antéchrist qui détruit l’ordo et fomente la confusio ». Quoi qu’il en soit des généralisations outrancières que le prévôt pessimiste en ait tirées concernant le but, le fond de sa pensée est pourtant juste, à savoir que l’Antéchrist n’est un que dans la multitude de ses manifestations historiques, dont chaque époque, à sa manière, est menacée.

[110] Apocalypse 13, 17 et 18.

[111] Exode 20, 9.

[112] Exode 21, 1.

[113] L’Apocalypse, Césaire d’Arles, Collection les Pères dans la foi, Desclée de Brower, p. 65 : «Lorsqu’il ouvrit le sixième sceau, il y eut un grand tremblement de terre », c’est-à-dire la dernière persécution. « Et le soleil devint noir comme un sac de crin et la lune devint tout entière comme du sang et les étoiles tombèrent sur la terre ». Ce que sont le soleil et la lune, les étoiles le sont aussi, c’est-à-dire l’Église, mais la partie est à comprendre du tout. Ce n’est pas en effet toute l’Église qui tombe du Ciel. Mais il dit tout parce que la dernière persécution s’étendra à tout l’univers. Et alors ceux qui auront été justes, demeureront dans l’Église comme dans le Ciel : Mais les cupides, les hommes injustes et adultères accepteront de sacrifier au diable. Et alors ceux qui se disaient chrétiens seulement en paroles, telles les étoiles, tombent du Ciel qui est l’Église. « Comme un figuier agité par un grand vent laisse tomber des figues vertes ».

[114] Apocalypse 20, 1.

[115] 2 Théssaloniciens 2, 4.

[116] Voir l’article suivant.

[117] Genèse 3, 14.

[118] La vie proposée par Satan n’a rien à voir avec celle de Dieu. Sa dignité n’est pas celle de l’amour poussé jusqu’au mépris de soi… Elle est liée au culte de sa grandeur individuelle.

[119] En latin, Lucis ferro, Lucifer. Il parlera donc en vérité de son projet de paradis fondé sur la noblesse des intelligences.

[120] Sous-entendu Jésus-Christ et son message d’humilité et d’amour.

[121] Voir Genèse 11, 9: Dieu divisa l’humanité à Babel pour l’empêcher de s’unir et de se croire toute puissante. Son but n’était bien sûr pas la préservation égoïste de sa primauté mais le salut éternel de l’homme.

[122] Luc 23, 34.

[123] Luc 16, 31.

[124] 2 Théssaloniciens 2, 10 à 12.

[125] 2 Théssaloniciens 2, 7.

[126] Genèse 11, 7.

[127] Apocalypse 17, 14.

[128] 2 Théssaloniciens 2, 5.

[129] Matthieu 24, 15.

[130] Daniel 8, 22-26.

[131] Daniel 9, 26-27.

[132] Daniel 12, 5-13.

[133] A la fin du XXème siècle, abreuvée de souffrance, l’humanité finit par rédiger la charte d’un monde nouveau qu’elle s’efforça de réaliser à l’aide des instances internationales.

Son but : Que chacun puisse profiter des plaisirs et des joies de la vie car ils sont ce qu'il y a de plus précieux sur la terre.

Ses moyens : Il convient de donner à tous les hommes la possibilité d’obtenir ces plaisirs et ces joies. En premier lieu, il faut mettre au ban de la société toutes les idThéologies qui, au cours des siècles passés se sont rendues coupables de fanatismes et de violences. Toute guerre doit être définitivement bannie puisqu’elle est source de malheur.

En second lieu, il convient de montrer aux peuples que le bonheur décrit a pour condition la liberté et le respect de la liberté d'autrui.

Ses lois : Etablir des lois civiles favorisant la liberté dans le respect d'autrui. Liberté d'aimer celui qui veut bien de cet amour (l'amour n’étant pas seulement la pulsion sexuelle mais aussi le sentiment) ; Liberté de penser et de s'exprimer (dans la mesure où les idées soutenues respectent le principe de l'article 1 et les conditions de l'article 2 ; Liberté de donner la vie au moment choisi, à condition que le nouveau-né soit un enfant normal, doté de toutes les facultés pour trouver dans les meilleures conditions le bonheur proposé et qu’il ne soit pas surnuméraire par rapport aux possibilités de la planète ; Liberté d'arrêter une grossesse non désirée, tant que l'embryon n'est pas un être humain (=doté de liberté) ; Liberté de choisir l’heure de sa mort, surtout lorsque celle-ci approche et supprime la possibilité du bonheur proposé dans l'article 1 ; Bref, toute liberté apte à favoriser le bonheur dans le respect de la liberté d'autrui.

4) Etablir des lois civiles favorisant le respect d'autrui dans la liberté : Respect de celui qui n'éprouve plus de sentiment et veut quitter son conjoint (possibilité de divorce) ; respect de toutes les opinions d'autrui ; Tolérance de ses actions dans la mesure où elles ne détruisent pas la liberté d'autrui ; Respect du droit des enfants qui, n’étant pas des êtres totalement éduqués dans la liberté, ont besoin de l'amour de leurs parents ; Respect de ceux qui veulent quitter ce monde et terminer leur existence dans un choix digne de l'être humain (euthanasie) ; Bref tout ce qui favorise le respect de la liberté d'autrui, en vue du bonheur personnel.

5) Etablir une justice et des peines adaptées contre ceux qui commettent des délits et des crimes contre autrui, selon qu’il a été défini libre et digne de respect aux articles 3 et 4.

6) Favoriser les sciences et les techniques capables d'aider aux conditions matérielles du bonheur du plus grand nombre. Nourriture pour tous, santé, richesse, temps pour les loisirs, protection de la nature, prolonga­tion de la durée de vie, accès à la culture etc.

7) Adapter avec souplesse ces lois en fonction de l’évolution des mentalités, pour que chacun se sente libre et respecté et même aimé dans un monde où règne la concorde entre tous. Favoriser l'attention aux autres, à condition qu’elle n’aille pas jusqu’à établir des liens étouffants pour la liberté. C’est de cette attention que naîtra l’équilibre psychologique d’une société vouée aux angoisses de sa condition mortelle. ”

Un tel projet de société n’est certes pas parfait. Il reconnaît avec réalisme son défaut structurel : la nécessité pour l’homme de mourir alors qu'il désirerait vivre toujours. Mais reconnaissons-le avec honnêteté : Si Dieu n'existait pas, ne serions nous pas les premiers à y adhérer et à y travailler ? Existe-t-il meilleure façon de vivre sur la terre les quelques années où le hasard de l’évolution nous a placé ? Ce projet est si bon (le moins mauvais qu'on puisse imaginer compte tenu de ce que nous sommes), qu’il est difficile d'en inventer un meilleur. L’acceptation du divorce et du vagabondage des amitiés est logique. Pourquoi s'imposer à vie le joug d'une vie commune alors que l'amitié se vit beaucoup plus facilement dans la liberté et la spontanéité ? N'y a-t-il pas plus de joie à se reVoir qu'à se supporter ? Rien n’empêche bien sûr à ceux qui veulent se marier de le faire, s'ils y trouvent le bonheur. Il en est de même pour l’acceptation de l'avortement. L'embryon n’ayant ni âme immortelle ni liberté, pourquoi s'imposer à le garder s’il ne vient pas au bon moment ? De même, pourquoi vivre dans la maladie et la vieillesse puisque tout se termine dans le néant ?

On le voit, cette conception du monde ressemble à s’y méprendre à celle du christianisme. Beaucoup de chrétiens les identifient d’ailleurs de nos jours. Elles ont des éléments communs : sens du respect d’autrui, recherche du bonheur de l’autre. Pourtant, en y regardant de plus près, il est possible de discerner qu’elles sont absolument différentes, à tous points de vue. Puisque celle-là exalte l‘amour de soi, de son propre équilibre et bonheur individuels. Il s’agit bien d’un antichristianisme.

[134] Apocalypse 11, 9.

[135] 2 Théssaloniciens 2, 8.

[136] Matthieu 4, 4.

[137] Matthieu 24, 22.

[138] Daniel 8, 25.

[139] Daniel 9, 26.

[140] 1 Théssaloniciens 5, 3.

[141] Daniel 8, 24.

[142] Daniel 8, 25.

[143] Daniel 12, 7.

[144] Genèse 6, 3.

[145] Voir par exemple Genèse 5, 6. 6, 3 etc. .

[146] Genèse 3, 5.

[147] Matthieu 27, 25.

[148] 2 Théssaloniciens 2, 4.

[149] Matthieu 24, 15.

[150] Matthieu 24, 30.

[151] Luc 12, 4.

[152] Luc 21, 32.

[153] Genèse 11, 6.

[154] Luc 7, 22.

[155] Jean 8, 28.

[156] 1 Jean 4, 16.

[157] Matthieu 12, 40.

[158] Josué 10, 14.

[159] Matthieu 12, 39.

[160] Isaïe 53.

[161] En disant cela, le Cardinal Balthazar se sépare radicalement de la position thomiste traditionnelle. Saint Thomas affirmait en effet que le Christ avait conservé durant toute sa passion la vision béatifique dans son intelligence. En conséquence, il ne pouvait souffrir dans son esprit qui était bienheureux. Le mystère du sépulcre devenait mystère glorieux de prédication aux âmes des défunts. La foi Catholique n’oblige pas à tenir cette opinion : Si elle affirme avec netteté que le Christ a eu la vision béatifique dès le premier instant de sa conception (il n’a pas eu à prendre conscience qu’il était Dieu!), elle regarde comme une hypothèse possible qu’il ait pu accepter de suspendre l’exercice de cette vision au moment de sa passion. On devine les perspectives bouleversantes qu’ouvre cette recherche inaugurée avec l’encouragement des papes Paul VI et Jean-Paul II par Balthazar.

[162] Matthieu 24, 30.

[163] Luc 21, 28.

[164] Marc 15, 39.

[165] Isaïe 2, 10.

[166] A propos de la nature de ces événements, les interprétations sont légion, jusqu’aux plus littérales.

Voir à ce sujet :

C. de Kirwan, Comment peut finir l’univers, collection «Science et Religion «, 1901, t. 23.

L. Billot, De novissimis, p. 169-176) notes.

J. Pohle, Lehrbuch der Dogmatik, t. 3, 8ème éd, par Giehrens, p. 703-704.

p. Teilhard de Chardin, Vie et mort des planètes, «Etudes «, 1946, t. 249, p. 167-169 (Œuvres, t. V : L’avenir de l’homme, p. 153-156).—Le Phénomène humain, Œuvres, t. I, p. 258-259.

Le P Rousselot (L’intellectualisme de saint Thomas, 2e éd, p. 110) remarquait que les questions qui passionnaient les scolastiques sur le paradis et les origines humaines passionnent aussi les enfants chrétiens, notre époque est tournée non vers le commencement mais vers la fin des temps et se pose des questions auxquelles seules répond souvent l’imagination créatrice, rançon de l’intérêt trop pratique pour l’instant présent.

SCHLIER (H)., Das Ende der Zeit, Fribourg, 1971, spécialement pp. 67-84.

Ibidem, «La compréhension de l’histoire selon l’Apocalypse de saint Jean », Le Temps de l’Église, ’Tournai-Paris, 1961, pp. 269-277.

Ibidem, De l’espélance. Essais sur le Nouveau Testament, Paris, 1968, pp. 159-170.

SCHNACKENBURC (R)., Gottes Herrschaft und Reich, Fribourg, 1959 ; trad. fr. : Règne et royaume de Dieu, 1967.

THEVENAZ (J.-p)., L Espérance en action, Paris, 1973.

Ibidem, Conversion à l’avenir, Paris, 1975 (textes choisis).

[167] Genèse 8, 21.

[168] Matthieu 13, 49.

[169] 1 Corinthiens 7, 31.

[170] RATZINGER J, La mort et l’au-delà, Communio-Fayard, 1994, p. 200.

[171] Apocalypse 6, 11.

[172] Péguy aimait distinguer dans l’histoire les «périodes » et les «époques ». Dans les périodes, rien de grand n’arrive, la vie de l’humanité suit son cours sans aventures extraordinaires. Comme un fleuve tranquille et paresseux, les nations et les civilisations se hâtent lentement vers une fin qui ne les préoccupe qu’à demi. Dans les époques au contraire, le fleuve s’agite et tourbillonne, les remous succèdent aux remous, les digues se rompent et ce sont alors les grandes catastrophes. Mais c’est aussi l’heure des héros.

Depuis 1914 et 1939, nous sommes entrés dans une époque de l’histoire. Il est difficile d’en douter. Certains s’en désolent. Si l’on songe aux ruines accumulées par deux guerres mondiales et on ne sait combien de guerres «en chaîne », on est tenté de les suivre. Mais le chrétien fait confiance à la Providence rédemptrice qui ne permet le mal qu’en vue d’un plus grand bien.

[173] Daniel 11, 35.

[174] Marc 1, 15.

[175] Qohelet 3.

[176] Daniel 11, 40.

[177] I Corinthiens 10, 11.

[178] Apocalypse 10, 6.

[179] Matthieu 24, 8 «Et tout cela ne fera que commencer les douleurs de l'enfantement ».

[180] Matthieu 24 et 25 et les parallèles en Marc et Luc.

[181] Genèse 3, 15.

[182] Matthieu 24, 34.

[183] Matthieu 24, 4-11.

[184] Les chrétientés soumises par l’islam ont-elles déjà réalisée cette prophétie portant sur l’apostasie (Afrique du Nord, Turquie ) ? Sans doute. Mais la prophétie prendra sa pleinitude quand elle concernera non une Egliose particulière mais l’universalité des chrétienté. La disparition de la papauté en sera le signe politique le plus visible.

[185] 2 Théssaloniciens 2, 4.

[186] 2 Théssaloniciens 2, 1-3.

[187] Objection 1 à 3 de saint Thomas dans le Supplément de sa Somme de Théologie.

[188] Jean 5, 22.

[189] Matthieu 24, 36.

[190] Apocalypse 1, 1.

[191] 2 Pierre 3, 9.

 

[193] Matthieu 24, 4.

[194] Daniel 8, 25.

[195] Marc 13, 32.

[196] Genèse 22, 12.

[197] Isaïe 7, 14.

[198] Esdras 7, 28.

[199] Manuscripts autobiographiques, Derniers entretiens.

[200] Luc 21, 23.

[201] Matthieu 24, 43.

[202] Apocalypse 2, 12.

[203] Hébreux 10, 37.

[204] Apocalypse 22, 10.

[205] Marc 13, 30.

[206] 1 Corinthiens 15, 41.

[207] Ces oscillations nouvelles ne sont plus désormais qu’un aspect d’une question plus vaste, celle du sens de l’histoire. Notre époque a résolu ce problème en termes optimistes ou pessimistes selon le tempérament ou la manière d’envisager les multiples cataclysmes d’une époque fertile en bouleversements cosmiques et sociaux. D’Augustin à Hegel, la théologie de l’histoire s’est laïcisée, elle a fait également l’objet de nombreux travaux de vulgarisation. Nous n’en retiendrons qu’un exemple caractéristique de la pensée religieuse de notre époque. Dans une série d’ouvrages qui ne manquent pas d’intérêt, M. du Plessis retrace le cheminement de ce qu’il appelle « la caravane humaine ». C’est une espèce de discours sur l’histoire universelle, envisagée à la manière de Bossuet et de saint Augustin : les empires succèdent aux empires, mais notre histoire est d’abord une histoire religieuse. On contemple alors comme d’une tour élevée, la manière dont, se relayant les uns les autres, certains peuples sont appelés à prendre la tête du cortège, mais bientôt l’Église, nouvel Israël, entre dans cette histoire et c’est alors l’affrontement de deux cités, du peuple de Dieu et du prince de ce monde. J. du Plessis, La caravane humaine, 1942

[208] 2 Pierre 3, 8.

[209] Matthieu 16, 28.

[210] Voir pour cet article la question 8. En effet, comme nous l’avons montré, il n’existe pas de différence essentielle en, tre le retour du Christ à l’heure de la mort et celui de la fin du monde. La différence est accidentelle en tant qu’elle se fait pour tous en un seul acte à la dernière génération.

[211] Matthieu 24, 22.

[212] Cantique 5, 6 ss.

[213] 1 Corinthiens 15, 51.

[214] Jean 11, 26.

[215] Jean 11, 22.

[216] Jean 5, 28-29.

[217] Genèse 8, 21.

[218] 2 Pierre 3, 12.

ACCUEIL    TABLE      SUIVANT