ACCUEIL   TEXTE DU TRAITÉ DES FINS DERNIÈRES   FORUM

Questions Disputées sur le Grand portail Thomas d'Aquin

http://www.thomas-d-aquin.com

DÉSIR "NATUREL" DE VOIR DIEU?

 Le désir naturel de voir Dieu
Auteur: Cristian de Leon (---.express.oricom.ca)
Date:   20/06/2003 06:46

Cher amis,

Dieu a crée l'homme à son image. Être spirituel, l'homme ne peut se satisfaire d'aucun objet naturel comme d'une chose définitive. Que l'homme désire, qu'il trouve satisfaction ici-bas, cela ne peut être que provisoire. Toujours Dieu l'appelle, de manière confuse pour lui ou de manière distincte, dans la foi et l'adoration, toujours est-il que le désir de l'homme est Dieu, et à la rigueur nous pourrions dire que le désir de Dieu, c'est l'homme. Dieu a situé Sa créature dans un monde fait pour lui, pour l'homme. Il lui a transmis Son image pour que l'homme puisse, à travers les réalités de ce monde, reconnaître de ce qui vient de Dieu. Le monde est un livre qui nous parle de Dieu. L'homme aussi est un livre, et dans son visage se reflète la présence de Dieu.
Le désir de voir Dieu est donc à la fois un désir naturel (voulu par Dieu) et une grâce accordée par Dieu (puisque tout vient de Lui). Plus l'homme questionne le monde, plus il y découvre la trace de Dieu. Plus cette présence se fait sentir, plus l'homme découvre la bonté inépuisable de Dieu.
Il en résulte que vouloir voir Dieu découle de notre volonté, de notre nature, de notre raison naturelle, puisque l'image de Dieu en nous nous fait découvrir ce que nous sommes en tant que créatures. Mais toujours est-il que c'est de Dieu que nous avons cette possibilité, et non de nous-mêmes. Et je crois que si nous n'avions pas cette possibilité en nous-mêmes, notre liberté de reconnaître Dieu serait en quelque sorte un automatisme, nous ne serions donc pas des créatures, mais des mécanismes issus d'un principe impersonnel.
Cela m'amène à l'adoration. Qu'est-ce donc ? L'adoration me semble être la reconnaissance de notre néant en face d'un Dieu qui a eut la bonté infatiguable de nous donner cette possibilité de L'aimer, malgré notre petitesse. Mais plus encore : pour nous surprendre, Dieu c'est fait plus petit et plus misérable que nous. Là encore notre raison naturelle est capable de reconnaissance, puisque la Révélation nous révèle à nous, dans notre raison, la folie de Dieu. Le désir de Dieu est donc de se donner pleinement à l'homme, pour qu'il partage ce qui se vit à l'intérieur de Sa trinité. Et plus encore : Dieu dans Son Verbe fait chair invite la raison de l'homme à jouir éternellement sa Sa bonté surnaturelle, surnaturelle pour qui ? Pour nous, car Son surnaturel est "naturel" pour Lui.

Le Chevalier de la beauté

 

 Re: Le désir naturel de voir Dieu
Auteur: Cristian de Leon (---.express.oricom.ca)
Date:   21/06/2003 23:40

Comme il n'y a personne qui riposte à ce texte, je vais me répondre : Vous avez dit l'essentiel et on ne peut rien rajouter ni soustraire de ce que vous avez dit, cher Chevalier de la beauté.

Le Chevalier du miroir

 

 Re: Le désir naturel de voir Dieu
Auteur: L'animateur du forum (---.w81-50.abo.wanadoo.fr)
Date:   21/06/2003 23:46

 
Cher Cristian,

     Ne croyez pas que votre appel restera sans réponse. Le sujet est passionnant. Il a déjà été abordé et synthétisé de façon magiqtrale par Alain Contat. Mais je prépare une réflexion sur le sujet, qui me demande quelque temps.

Cordialement.

 

 Re: Le désir naturel de voir Dieu
Auteur: Cristian de Leon (---.express.oricom.ca)
Date:   22/06/2003 00:14

Cher Animateur,

Voyez excuser mon impatience. J'en profite pour vous remercier de la beauté de ce site, autant morale que plastique.

Amicalement

 

 Re: Le désir naturel de voir Dieu
Auteur: Arnaud Dumouch (193.191.142.---)
Date:   26/06/2003 10:10

Cher Cristian,
Pardon de ne pas répondre très vite. Je suis débordé en ce moment.
Il y a eu un débat magistral sur ce thème il y a à peine un mois. Je vous joins la synthèseque j'en avais faite, pour mon propre travail.
Mais votre texte dit tout, en mieux.

LE DESIR NATUREL DE VOIR DIEU

Article 1 : L’homme possède-t-il un inconscient spirituel porté vers un bonheur sans limite (la béatitude) ?
Si on suit Aristote, un bonheur humain est possible. Selon lui, il se réalise à travers la possession de deux biens : l’amitié et une contemplation naturelle de l’Etre premier.
Ce bonheur raisonnable suffit-il pour combler les aspirations de l’homme ? Qohélet constate que non (Ecclésiaste 1, 12) : « Moi, Qohélet, j'ai été roi d'Israël à Jérusalem. J'ai mis tout mon coeur à rechercher et à explorer par la sagesse tout ce qui se fait sous le ciel. C'est une mauvaise besogne que Dieu a donnée aux enfants des hommes pour qu'ils s'y emploient. J'ai regardé toutes les oeuvres qui se font sous le soleil: Eh bien, tout est vanité et poursuite de vent! » L’expérience montre qu’un désir irréaliste mais très réel demeure en celui qui est comblé de tout. Le philosophe Feuerbach décrit ces désirs qui dépassent le raisonnable:
1- L’homme est touché dans son être même : il ne veux ne pas mourir, il désire vivre éternellement.
2- Le bonheur auquel il aspire doit être toujours nouveau, libéré du poids du quotidien.
3- Son intelligence voudrait maîtriser la totalité du réel.
4- Son affectivité aspire à l’amour romantique d’un être complémentaire qui se s’use jamais, dont le premier désir résiste au temps.
5- Son désir de puissance illimité qui fait souvent de l’homme un prédateur insatiable.
5- Son psychisme rêve de plaisir, de beauté, de paix et d’activité à la fois.
6- Cela s’étend jusqu’au corps qu’il voudrait lumineux, jeune, impassible, léger, obéissant, délivré des limites et des murs.
Ces désirs sont connus des théologiens. Ils appellent béatitude un état où tout désir est comblé. La béatitude se distingue du bonheur qui n’en est qu’une approche mesurée.
Au plan psychiatrique, ce désir est dangereux car utopique. Il conduit les gens raisonnablement heureux au malheur et les angoissés au suicide. L’éducation s’efforce soit de le réprimer dans l’inconscient soit de le canaliser vers des activités constructives comme l’amour, l’art, la contemplation du vrai. Il ressort alors, tôt ou tard, sous la forme d’une angoisse, c’est-à-dire un mal-être dont le sujet ignore l’origine. C’est l’une des pierre d’achoppement du monde moderne.
Au plan politique, ce désir non canalisé est source des messianismes temporels. Les politiques s’efforcent de combler leur concitoyens de tous les biens pour instaurer par la matière, la béatitude ici-bas. Or la consommation de drogue, le suicide, la violence autodestructrice augmentent sans qu’ils en trouvent la raison.
Au plan religieux, ce désir constitue la raison mêmes de toutes les religions qui proposent, d’une manière ou d’une autre la béatitude pour l’au-delà.

Article 2 : Ce désir est-il un acte, ou bien une puissance, ou bien, sous différents aspects, l'un et l'autre ?
Ce désir apparaît à la connaissance par diverses activités qu’il produit comme le mal-être et son effet, la recherche perpétuelle de « toujours plus ». Il y a donc bien une actuation. S’il est un acte, c’est qu’il existe une puissance tapie quelque part dans l’homme.
On peut se représenter cela métaphoriquement comme un "creux", une béance dans le désir agissant comme un inconscient douloureux. Si ce vide n'est pas empli, l'esprit souffre sans savoir pourquoi. On peut représenter cela à la manière de ce vase dont parlait Agnès, la soeur de sainte Thérèse, dans l'histoire d'une âme.
Au plan scientifique, il s’agit d’une puissance.

Article 3 : Ce désir a-t-il pour objet Dieu vu par son essence, ou bien Dieu en tant qu'accessible à la raison, ou bien Dieu sous la raison commune de béatitude ?
Ne peut-on pas dire que la psychanalyse de Freud a cherché l’objet de ce désir ? Il parle d’une recherche inconsciente lié à une libido (désir fondamental du plaisir). L’expérience montre que sa recherche reste superficielle. Certes, le plaisir est important car présent en extension dans chacune des velléités du bonheur infini. Mais il n’est qu’un aspect de ce qui est constaté.
Au plan philosophique, on peut dire que l’objet de ce désir n’est pas un simple bonheur (une vie raisonnablement agencée dans l’épanouissement modéré de l’esprit). Il a pour objet la béatitude, c’est-à-dire un bonheur complet, irraisonnable, de tout l’être (esprit, sensibilité et corps) où le désir s’arrête tant il est comblé d’actuations toujours renouvelées.
Toujours au plan philosophique, on doit donc en déduire que la contemplation naturelle de Dieu à travers ses œuvres ne comble pas la totalité de ce désir. Dieu y est connu comme l’inconnu. Il y est aimé comme le Créateur des choses ce qui est loin de correspondre aux velléités d’amour et d’union décrites par Feuerbach plus haut. Ce désir ne peut donc avoir pour objet Dieu en tant qu'accessible à la raison, même si celui qui contemple Dieu ainsi trouve un certain soulagement à son désir.

Cependant, Au plan théologique : quand la révélation passe par là, elle permet de comprendre par l’espérance des biens promis la profondeur du désir en question. On s’aperçoit que la bonne Nouvelle promet point par point, sans rien omettre, tout ce qui est désiré de manière velléitaire par le non-croyant.
1- L’éternité de l’être : « De mort, il n’y en aura plus ».
2- Le bonheur : « On ne se souviendra plus du passé. J’essuierai toutes les larmes de leurs yeux. »
3- Son intelligence verra Dieu, la Lumière, face à face.
4- Son affectivité : Sainte Thérèse de Lisieux la décrit dans un poème : « J'ai besoin d'un coeur brûlant de tendresse, restant mon appui sans aucun retour, aimant tout en moi, même ma faiblesse... Ne me quittant pas, la nuit et le jour. Je n'ai pu trouver nulle créature qui m'aimât toujours, sans jamais mourir. Il me faut un Dieu prenant ma nature, devenant mon frère et pouvant souffrir ! »
5- Son désir de puissance : car Dieu mettra sa Toute-puissance à la disposition des humbles.
6- Son psychisme qui verra de ses yeux un monde nouveau préparé pour l’éternité.
7- Son corps qui sera ressuscité glorieux.

Conclusion : Ainsi, ce que la révélation montre, c’est que ce désir a pour objet non seulement la béatitude de la partie supérieure de l’être, mais celle de tout l’être dans son extension. Il s’agit à la fois, et dans l’ordre d’importance de 1- Dieu vu dans son essence, aimé et possédé comme un époux (donc de la béatitude essentielle, celle de l’esprit), mais aussi 2- de la glorification de la sensibilité avec le mode de lumière et de beauté qu’elle implique et 3- de la résurrection dans la gloire de la chair, avec le monde physique qu’elle implique.
Bref, c’est l’épanouissement total de tout l’être, jusqu’à ce que l’imaginaire, dans sa folie, ne peut concevoir, qui semble l’objet réel de cet inconscient spirituel.

Article 4 : A-t-il pour sujet l’intellect, ou bien la volonté, ou bien, sous des aspects différents, l’une et l’autre puissance ?
Ce désir n’a pas pour siège l’esprit mais l’essence de l’âme humaine. En effet, il étend son feu dans tout l’être : La substance (dans sa recherche d’immortalité) ; l’intellect (dans sa recherche du Vrai) ; la volonté en tant qu’appétit (sous la raison générale de Bien) ; Mais aussi la volonté dans son rapport aux moyens (dans sa recherche de toute puissance) ; le composé d’esprit et de psychisme (dans sa recherche du Beau) ; la sensibilité (dans sa recherche du plaisir sensible) ; le corps (dans son aspiration à l’incorruptibilité). Il me semble donc que cet appétit dépasse l’une ou l’autre faculté de l’esprit.
C’est ce que semble rappeler la phrase de saint Paul (Romains 8, 19) : « Car la création en attente aspire à la révélation des fils de Dieu: si elle fut assujettie à la vanité, -- non qu'elle l'eût voulu, mais à cause de celui qui l'y a soumise, -- c'est avec l'espérance d'être elle aussi libérée de la servitude de la corruption pour entrer dans la liberté de la gloire des enfants de Dieu. Nous le savons en effet, toute la création jusqu'à ce jour gémit en travail d'enfantement. »
Bref, il me semble que la puissance qui est à la source de ce désir n’a pas pour sujet l’esprit dans l’une ou l’autre de ses facultés, mais la racine de notre être (l’âme) puisque seule une cause plus radicale que celle d’une faculté peut avoir un tel effet universel dans l’être. Ce serait une marque entitative, une orientation crée dans l’âme par Dieu au moment où il la crée ?

On objecte que Dieu ne peut avoir mis une telle marque dans la nature humaine. S’il l’avait mise, c’est qu’il aurait créé l’homme pour la Vision béatifique et la glorification de ses facultés. Or, le don de la Vision est gratuit…
Comme Alain, je pense qu’il n’y a pas de contradiction entre gratuité du don et présence de cette marque entitative. Un simple exemple permet de le comprendre. L’entrée dans la vision béatifique fonctionne comme le mariage d’amour. Les époux se donnent gratuitement. Cette gratuité n’empêche pas que, dès leur conception, ils ont reçu dans leur être une orientation innée pour l’amour de l’autre sexe.

Article 5 : Ce désir est-il connaissable par la raison seule, ou bien par la révélation proprement dite, ou bien à partir des effets de la révélation dans l'histoire, la prédication évangélique par exemple ?
Ce que j’ai dit répond à cette question : Dans la réalité, les effets de ce désir sont souvent anarchiques puisqu’ils ne sont pas ordonnés par leur vrai cause. Du coup, au plan d’une raison athée, le chercheur a beaucoup de mal en en découvrir l’unité. Sans son principe d’intelligibilité, ce désir apparaît non structuré, sans signification. Il peut être décrit par la raison seule comme le prouve Feuerbach. Dans ce cas, il apparaît comme une velléité que l’individu doit réprimer et canaliser car ennemie du bonheur puisque inaccessible. Par contre, au plan sociologique, il apparaît comme le moteur de l’humanité qui la pousse à aller toujours plus loin dans tous les domaines (conquêtes géographiques, scientifiques, intellectuelles, croissance matérielle etc.). L’humanité ne supporte pas de frontière.
Au plan d’une philosophie réaliste, ouverte à la contemplation d’un Etre premier, je me demande si quelqu’un de très perspicace ne pourrait pas en déduire une certain soupçon sur le monde de l’au-delà en posant le principe suivant : Dieu, qui a créé l’âme humaine, y aurait-il mis de tels désirs sans raison ?...
Par la révélation, ce désir prend tout son sens, de même qu’une puissance devient connue par son acte : Comme dit saint Augustin : « Avant de te connaître je t’aimais », ce qui montre que cet appétit fondamental de l’âme s’exerce sans objet conscient avant que le don de la foi ne vienne rendre explicite son objet.
Ce n’est que dans la Vision béatifique que la profondeur de ce désir sera connu dans son acte, donc en plénitude. Sa partie suprême, celle qui concerne l’esprit et la Vision de Dieu, apparaîtra alors non comme un désir infini puisqu’elle trouve son siège dans une âme finie. Elle apparaîtra comme le désir d’un être infini. Cet être (Dieu) la dépassera toujours et ce désir, pourtant comblé, ne pourra en maîtriser la démesure de la Trinité. Sa partie seconde (la glorification de la sensibilité et du corps), loin d’être une velléité, deviendra la plus réaliste des réalités.

Article 6 : En quel sens l'actuation de ce désir naturel est-elle surnaturelle ?

Ce désir entre en acte dès que la vie spirituelle émerge, c’est-à-dire dans l’enfance.
De manière naturelle, ce désir s’actue de manière anarchique comme tout appétit séparé de son objet. Livré à lui-même, sans être canalisé, il est source des plus profondes maladies psychiques.
Mais, comme un torrent, il peut être en partie canalisé dans les digues naturelles de la recherche de biens terrestre. 1- La recherche de l’amitié et de d’une contemplation de l’Etre premier donne un certain bonheur, selon Aristote. Celui qui n’a pas la chance ou l’éducation pour entrer dans ces deux finalités risque bien d’expérimenter ce qu’est la convoitise : à la recherche du bonheur, on emplie sa vie de toujours plus de plaisirs, de richesses, de gloires, sans jamais être rassasié, sans autre objet précis que la recherche d’un bonheur toujours plus grand. C’est ce qui explique que le cœur de l’homme, même lorsqu’il est objectivement comblé de tous les biens terrestres, est sans repos.
De manière surnaturelle, ce désir prend son sens. La foi en révèle la vraie nature ; la charité en fait toucher déjà l’objet ; l’espérance révèle que seule la Vision béatifique le comblera et qu’en attendant, il faut vivre assoiffé sur terre. Ce dernier point est important au plan spirituel pour ceux qui se contenteraient de la vie chrétienne d’ici-bas : la vie terrestre reste une vallée de larme ; la vie de la grâce et l’eucharistie ne peuvent combler qu’en partie ce désir ; seule la Vision béatifique et la glorification le pourra.

Article 7 : Dieu aurait-il pu ne pas accomplir ce désir, et laisser la nature humaine dans l’état de pure nature ?
On en revient ici à l’hypothèse des limbes des enfants morts sans baptême.
J’essaye de m’imaginer cet état. L’hypothèse de saint Thomas montre que dans les limbes, les enfants vivront ressuscités pour l’éternité d’un bonheur naturel et sans souffrir de ne pas voir Dieu. L’esprit de ces enfants s’exercera puisqu’il vivra d’une contemplation philosophique de Dieu, à travers ses effets selon les trois modes qu’il décrit [par mode de causalité : « Dieu existe puisque ces réalités sont sorties du néant » ; par mode de négation : « Dieu est infini, à l’inverse de ces créatures finies » ; par mode d’éminence « Dieu est infiniment intelligent, bien plus que moi »].
Ces enfants ne seront donc plus des enfants. Ce sont des adultes qui penseront et aimeront. Leur corps sera ressuscité. Leur psychisme sera dans sa plénitude. Ils pourront voir de leur yeux les merveilles inouïes du monde nouveau. Ils passeront leur éternité, séparés du monde des élus, avec leurs compagnons de limbes, à visiter ces merveilles. Ca doit être fabuleux, une véritable aventure…
La question que je me pose est celle-ci : comment imaginer que l’inconscient spirituel que les six articles précédent ont décrit puisse alors s’éteindre ? Cela me paraît très contradictoire avec l’expérience de la nature humaine. Saint Augustin dit dans ses confessions (je site approximativement) : « Posséder toutes les merveilles du monde, sans te posséder toi, la Source de tous les bien, c’est être indigent. » J’avoue que ces observations de l’âme humaine me laissent dubitatives sur la possibilité d’une éternité vraiment heureuse, sans désir, sans la Vision de Dieu. Mais Bouddha le montre, le désir, c’est cause de la souffrance.

 

 Re: Le désir naturel de voir Dieu
Auteur: Paulux (62.39.205.---)
Date:   02/07/2003 18:47

Arnaud,
Vous voudrez bien m'excuser de n'avoir pas lu l'intégralité de votre dernier message mais j'aimerai rebondir sur votre dernière phrase à propos du bouddhisme. Cette philosophie vise effectivement à tuer en nous le désir pour atteindre une félicité débarrassée de toute émotion et de tout mouvement.
Je crois qu'il s'agit en fait d'un suicide spirituel et mental car le désir est le moteur de l'âme.
Je peux difficilement donner des arguments pour prouver ce que j'avance, mais outre le fait que cela semble conforme à l'anthropologie thomasienne nous pouvons imaginer la scène suivante:

Vous êtes assis sur une chaise et vous vous posez la question: me leve-je ou ne me leve-je pas?

Si vous jouez le jeu avec honnêteté vous vous apercevrez rapidement que vous ne pouvez pas prendre de décision sans mobile. Nous pouvons donc en conclure que la liberté est un instrument et que le désir est un moteur, et que l'on ne va pas bien loin avec une voiture sans moteur ni essence, eu-t-elle la meilleure direction possible.

Ceci étant posé, on peut se demander de quelle façon le désir de voir Dieu qui habite nécessairement chaque homme -même s'il ne peut le nommer ou en prendre conscience ou indiquer son objet- doit être entendu:

- est-ce une volonté propre de Dieu à notre égard (voire de toute la Création),
- ou est-ce une propension ontologique de toute créature ?

St Thomas (ou l'Eglise) s'est-il penché sur la question? Laquelle de ces deux propositions respecte le mieux et notre liberté et l'amour particulier de Dieu pour chacun d'entre nous ? Peut-être sont-elles miscibles...

ACCUEIL   TEXTE DU TRAITÉ DES FINS DERNIÈRES   FORUM