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Questions Disputées sur le Grand portail Thomas d'Aquin

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L'avortement

 animation tardive
Auteur: Jean-Christophe T (---.ppp.tiscali.fr)
Date:   28/05/2003 12:53

A l'animateur du forum.

A votre invitation, j'ouvre ce nouveau débat. je reprends les questions posées :


Vous dîtes : "le corps n'est pas fait de matière, mais de matière et d'âme." D'autre part, "on" dit qu'un corps est fait de matière et de forme (hylemorphisme). Mais "on" dit aussi que l'homme est corps et âme.
Parlez vous de matière première? La matière première peut-elle être directement déteminée par l'âme? Ne faut-il pas que l'âme informe une matière déjà différenciée en devenant alors l'acte d'un corps organique (un un corps donné par les parents?).(je crois qu'Aristote le précise dans le De Anima)

La maladie, la mort cérébrale etc... ne sont elles pas les conséquences d'une atteinte de cette matière organisée, le corps, ne permettant plus la préhension du corps par l'âme? la conséquence en étant leur séparation, la mort. Je ne voie alors que de la matière seconde : le cadavre.

Autrement dit quel est l'ordonnancement entre le l'âme, le corps, la matière différenciée, la matière première. Quel est le lien entre les gamètes ou le zygote avant animation et le cadavre?

Bien cordialement

 

 Re: animation tardive
Auteur: Arnaud DUMOUCH (193.191.142.---)
Date:   30/05/2003 12:11

Cher Jean-Christophe,
Je pense comme vous. En regardant, simplement, comme vous le faites, la réalité, je pense qu'on trouve la vérité sur ce rapport âme corps.
Avant l'infudsion de l'âme spirituelle, on constate que ce n'est pas n'importe quelle matière qui est informée par l'âme humaine mais une matière bien structurée, communiquée par l'acte sexuel des deux parents, et portant quelque chose des deux. Mais, lorsque Dieu uni à cette matière préexistante la réalité spirituelle qu'il crée, il en ressort un homme.
Par l'action divine, la matière préallablement disposée se trouve unie avec l'âme pour faire un seul être, et l'union est si forte qu'Aristote dit qu'elle est comparable à la forme et à la matière dans l'oeuvre d'art. On ne peut plus intellectuellement les séparer; On peut seulement les distinguer.
Il y a un changement dans l'être même de la matière qui n'est plus une simple matière prédisposée à recevoir l'âme, elle devient lE CORPS HUMAIN CONCRET de cette personne. Le corps humain est fait d'âme et de matière.

Cela n'empêche pas, comme vous le dites, que l'âme ne possède pas une puissance illimitée à maintenir dans l'unité de son être cette matière. La matière a aussi sa propre nature, qui tire dans un autre sens. La vieillesse, c'est quand le poids de la matière se fait plus lours pour l'âme. Les généticiens disent que c'est la matière elle-même qui s'use car la division cellulaire n'est plus assez efficace pour la renouveller.
A un certain moment, la capacité de l'âme ne suffit plus. Le corps connaît un nouveau changement dans son être. Il devient un cadavre, soumis aux seules lois de ses molécules et atomes. Il se décompose.

 

 Le moment de l'animation de l'embryon
Auteur: Arnaud Dumouch (---.88.238.242.codenet.be)
Date:   31/05/2003 12:31

Cher ami,
Le nouveau débat que vous avez ouvert s’intitule : « l’animation tardive" de l’embryon. Sur la question du moment de cette animation, un débat réel s’ouvre. Permettez moi de vous présenter mon opinion, qui n’est qu’une opinion, avec une relative précision de méthode. Sébastien Lutz vous présentera sans doute une autre opinion, tout aussi argumentée. A vous de conclure dans cette question libre…

AU PLAN PHILOSOPHIQUE, il me semble qu’il est impossible d’être définitif sur le sujet du moment exacte de l’apparition de l’âme spirituelle. Pour connaître AVEC CERTITUDE la présence de la CAUSE (l’âme spirituelle), il faudrait en trouver un EFFET manifeste et spécifique. Il s’agit d’une induction, l’un des moyens philosophiques de connaître ce qui est invisible. Or, le premier acte de la vie spirituelle n’apparaît que plusieurs années après la naissance de l’enfant... Chacun se doute que l’âme spirituelle est bien présente avant l’âge de deux ans… L’esprit du nourrisson sommeille mais est bien là.
Il existe cependant un SIGNE de la présence de cette âme unique dans la morphogenèse. Saint Thomas pensait que l’embryon était successivement animé par une âme végétative, puis par une âme sensitive. La présence, dès la conception, du chiffre biologique complet, l’absence de rupture visible ou de saut de développement indique plutôt autre chose…

Par contre, il me semble qu’AU PLAN DE LA THEOLOGIE CATHOLIQUE, il y a une possibilité d’aller plus loin. Saint Thomas d’Aquin pensait que l’âme spirituelle était créée par Dieu au sixième mois de la grossesse. Il en avait UN SIGNE dans la réaction du petit enfant Jean-Baptiste lors de la visitation de Marie à Elizabeth. Son tremblement était manifestement lié à la grâce (donc il était le signe de la présence de son esprit).
Depuis, il y a eu le dogme de l’Immaculée Conception (1851, je crois). Marie fut immaculée le jour de sa conception, ce qui signifie que, comme Eve, elle vivait de la grâce originelle, de la présence familière de Dieu dans le jardin de son esprit, dès le jour de la conception de son âme…
Quand son âme fut-elle conçue ? La liturgie semble dire : « 9 mois avant sa naissance ». L’immaculée conception se fête le 8 décembre, la maternité de Marie le 8 septembre suivant. Vous savez que la liturgie participe du charisme de l’infaillibilité ordinaire du Magistère, d’après le récent Motu Proprio Ad Tuendam Fidem (18 mai 1998).
Marie est de notre espèce. Si son âme est conçue le jour de sa conception, pourquoi pas nous. Marie n’est pas une déesse à part de nous. Sa nature est entièrement humaine, même si sa vie surnaturelle est unique…
Tout ceci constitue un réseau concordant de SIGNES qui rendent probables, selon moi, la conclusion suivante : « Quand deux parents conçoivent un enfant, leur acte prend une dimension sacrée. Car Dieu le bénit aussitôt la fusion des gamètes en l’achevant par la création de l’âme de leur enfant ».

Je trouve un dernier signe de la présence de cette âme dans la position de l’Eglise sur l’avortement volontaire. Sa « panique » face à ce que Jean-Paul II n’hésite pas à appeler un « génocide » n’a rien à voir avec la position de l’Eglise sur la contraception artificielle. Dans un cas, je ne pense pas forcer sa position en disant quelle y voit un homicide ; dans l’autre, une indélicatesse, parfois grave, souvent simplement imprudente, contre l’amour du couple et l’ouverture à la vie. Or, si l’avortement, avant six mois de grossesse, ne faisait qu’éliminer une chair pré-humaine, une disposition à recevoir l’âme spirituelle, ne pensez-vous pas que l’Eglise, menée invisiblement par l’Esprit, réagirait autrement ?
Un dernier point.
Cher ami, j’habite en Belgique. Dans l’église mon village se trouve le tombeau des Ducs de Mérode, morts au XVIème siècle. Tous les enfants de ce couple y sont représentés sous forme de statues de marbre. Or la pauvre Duchesse fit deux fausses couches très précoces. Ces deux enfants là aussi sont représentés, sous la forme de deux anges montant au Ciel. Vous voyez que l’intuition que les enfants sont vivants est très ancienne, au moins dans le cœur de leur mère…

 

 Re: Le moment de l'animation de l'embryon
Auteur: Polaire (---.proxy.aol.com)
Date:   31/05/2003 17:47

"""""""""Il en avait UN SIGNE dans la réaction du petit enfant Jean-Baptiste lors de la visitation de Marie à Elizabeth. Son tremblement était manifestement lié à la grâce (donc il était le signe de la présence de son esprit)."""""""Ce n'est pas un peu léger comme argument.?

cher ami
Vous ne manquez par d' art , ni de délicatesse ,ni de sensibilité ,je dirais bien que toutes ces qualités sont présentes à chaque fois ,en totalité . Ce qui nous donne des textes assez insaisissables , de mon point de vue , étonnants .
Les agathes de mon enfance , ces billes de verre ou une spirale colorée est incluse , la forme intérieure pourrait en être un anneau de Moébius , qu' elle me ferait penser à vos textes .
.Où commence votre pensée ,où finit elle ? . Dans quels méandres l' argumentation se perd -elle pour ressurgir d'on ne sait où mais qui semble avoir un fondement dans ce qu' on aurait pu lire ailleurs .
Ce qui est laché d'une main en l' air un moment reviendra dans l'autre main, certainement le message prendra fin . Un exercice de jonglage intellectuel périlleux ,dont je ne fais qu 'entrevoir la motivation .

Périlleux ,car il est évident qu 'une intelligence vous anime mais que vous devez bien savoir qu' aux yeux de vos confrères en philosophie votre discours ,dans l 'interférence même des mondes auxquels il se réfère , ce que ce discours laisserait perplexe (le mot est faible ).

Polaire jean luc

 

 Re: Le moment de l'animation de l'embryon
Auteur: jean-christophe T. (---.pops.easynet.fr)
Date:   31/05/2003 23:09

Cher Arnaud,

Je vous remercie d'avoir apporté des éléments de réponse.

1) Il m'est difficile de concevoir une animation "gigogne" : d'abord végétative, puis (dès que les structures nerveuses s'ébauchent et deviennent fonctionnelles) une âme sensitive, puis enfin dès que le sytème nerveux supérieur est complet (permettant la perception, l'imagination..) une âme spirituelle qui s'assoie sur ces dernières facultés. Il me semble qu'on se trouverait devant une juxtaposition d'âmes. Pour se rattraper, on pourrait dire l'âme spi. assume les autres!


La symétrie avec la mort cérébrale est intéressante : la science considère la mort cérébrale comme l'instant où l'individu n'a plus de cohérence (plus de faculté intégratrice, plus de conscience) que le philosophe considère (pas tous!..) comme la mort de l'individu. Pourtant, par le jeu de techniques de réanimation, une "apparente" cohésion extérieure (battement cardiaque, chaleur, parfois mouvement réflexe, un cas connu de grossesse prolongée plusieurs semaines jusqu'à la naissance d'un prématuré qui a une dizaine d'années maintenant), pourtant donc, on est face à un "individu" animé du moins végétativement. Peut on dire qu'il persiste un principe vital, une âme? Est elle encore spirituelle, ou bien a-t-elle reflué ne laissant apparaître qu'une âme végétative. Cette "désanimation", cette mort progressive serait-elle le pendant de l'animation tardive?

La théorie du tout ou rien me paraît plus simple personnellement. Qu'en pensez vous?

2) Si la philosophie est la servante de la theologie, je ne sais pas, en sens inverse, si on peut réfléchir un article de la foi sur un point philos.

3) A tous,

Prière de ne pas transformer ce forum en réglement de compte. Pour moi qui n'aie pas fait "mes humanités" en Sorbonne, je souhaite (peut-être suis-je trop exigent) des réponses simples...et tant pis si elles paraissent simplistes à d'autres...Bien qu'étant peu locace, je lis les différentes questions et j'ai remarqué que le ton "fraternel"avait changé ces derniers temps...

 

 Re: Le moment de l'animation de l'embryon
Auteur: Polaire jeanluc (---.ipt.aol.com)
Date:   31/05/2003 23:43

Pour avoir une réponse simple il faudrait que le problème soit simple .Or il est quasiment insoluble .Vous avez deux modes réalités le matériel et le spirituel qui sont compris comme hétérogènes . Ils peuvent chacun être régulé intérieurement: les lois de la matières: les lois de l'esprit mais les relations de l un à l'autre sont difficile à penser .De quel ordre sont-elles .matérielles ?spirituelles?
Déjà dès l' abord ,premier problème :elles sont pensées . ce qui signifie que le regard sur le coprs est un regard spirituel ( de pensée) ce qui éloigne un peu plus de la réalté en-soi de la relation présumée entre le matériel et le spirituel .On pourrait opter pour une coéxistence sans relation causale de l'un à l'autre une sorte de parallélisme (genre Spinoza )
.
Tout cela se fonde sur le postulat de deux réalités hétérogènes . Ce postulat est une croyance , qui peur être croyance philosphique ,mais c'en est une ;

Vous voudriez des réponse simples à des problèmes qui n'en ont peut être pas .Car c'est vouloir établir une relation entre deux réalités définies dès l'abord par leur possibilité d' action dans leur domaine à l' exclusion d' autres ingérences possibles , c'est le cas de la matière qui ne peut dans le sens commun n 'être agit que par la matière . Si elle est agit par le spirituel et en participe il faut changer de concept ou l' amender (idem pour l esprit )
On aurait une réalité qui ne serait ni matière, ni esprit .

Il se peut que les thomistes le fassent je ne sais trop comment .

polaire jean-luc

 

 L'âme comme acte premier d'un corps organisé
Auteur: Sébastien (---.w193-253.abo.wanadoo.fr)
Date:   01/06/2003 12:16

Chers amis,

C’est une question difficile qui vient d’être posée sur le forum, pour y répondre, il y a deux méthodes.

a) Procéder a priori : c'est-à-dire en utilisant des arguments de convenance, notamment théologiques.
b) Procéder a posteriori (via inventionis) : à partir de l'observation même de l'embryon.

Arnaud Dumouch utilise la première méthode. Je ne suis pas persuadé que ce soit la meilleure : on ne fait pas de philosophie à partir de conclusions théologiques.

Tentons plutôt la seconde méthode. Pour savoir si le suppôt que l'on a face de soi est un être humain, il y a trois manières de s'en assurer qui aboutissent à des certitudes différentes.

1)le sujet que l'on a face de soi pose des actes humains, par exemple un acte d’intellection. Conclusion : c'est un être humain en vertu de principe agere sequitur esse : l’agir d’une substance révèle la nature de cette substance.

2) le sujet qu'on a en face de soi ne pose pas d'actes humains, mais a les organes pour les poser. C'est un être humain, car il y une puissance réelle pour les poser. C'est le cas d'un homme dans le coma, qui n'a qu'une vie végétative : le langage courant dit d'ailleurs de ces gens que ce sont "des légumes".

3) le sujet qu'on a en face de soi ne pose pas d'actes d'humains et n'a pas -encore- les organes pour les poser. C’est exactement le cas qui nous occupe et nous pouvons reformuler alors notre question de la manière suivante : au moment de la fécondation , l’embryon est-il suffisamment disposé pour recevoir l’âme humaine. Certains font alors valoir l’argument suivante : dès le départ, la rencontre des gamètes produit un être qui peut être perçu comme ayant biologiquement la caractéristique humaine. On pourrait citer ici deux opinions de scientifiques :

« L'apport récent de la biologie nous a appris que la vraie naissance correspond à la fécondation. La vie humaine commence avec la cellule fécondée. Il n'y a aucun motif pour fixer une étape où l'on ait le droit de l'arrêter. » (Professeur Debré, au nom de l'Académie nationale de médecine, devant la commission des affaires familiales et sociales de l'assemblée, 11 juillet 1973)

« Pour la réflexion éthique en revanche, le concept opérationnel est celui d'une entité évolutive continue, débutant à l'oeuf, après la réunion des génomes paternel et maternel, et en se transformant progressivement en ce qui sera nouveau né. Toute discontinuité dans ce processus apparaît quelque peu artificielle, et, pour dire, semble établie pour les besoins de la cause, justification a posteriori de catégorisations légales beaucoup plus que de donnée indiscutables à leur origine. La notion de pré-embryon, définissant une chose vivante qui se transformerait à un moment précis en être humain dont il faudrait respecter la dignité, apparaît donc largement absurde. Il est vraisemblable qu'un telle notion a été avancée pour justifier des pratiques auxquelles on voulait soumettre le pré-embryon, selon une démarche utilitariste qui prévaut particulièrement dans la culture anglo-saxonne. » (Professeur Axel Kahn)

Pourtant, on peut faire valoir une objection sérieuse sur ce point : l’ongle humain possède bien dans chacune de ses cellules l’ADN humain ; malgré tout, personne ne niera qu’il n’est pas disposé à recevoir une forme humaine.

Aussi, je prèfère m’en tenir à ce que dit saint Thomas qui pose un principe et une conclusion :

Le principe est celui du rôle spécifique des organes corporels dans la vie de l’être animé : « Ce n'est pas la forme qui est ordonnée à la matière, c'est bien plutôt la matière qui est ordonnée à la forme ; et c'est à la forme de nous expliquer pourquoi la matière est de telle sorte, et non inversement. (…) Il fallait donc que l'âme intellectuelle possédât non seulement la faculté de penser, mais encore celle de sentir. Or, le sens ne peut fonctionner sans un organe corporel. Il était donc nécessaire que l'âme intellectuelle fût unie à un corps apte à servir d'organe au sens. » (I, 76, 5, c.).

Autrement dit, si l’on admet que l’âme spirituelle peut informer n’importe quel corps quel que soit son état d’organisation, cela revient à mettre en cause la nécessité même de l’organisation pour que l’âme puisse exercer ses fonctions.

La conclusion est que l’âme spirituelle est infusée quand un certain nombre de dispositions sont non seulement virtuellement présentes, mais actualisées : «l'âme, étant une partie de la nature humaine, ne possède sa perfection naturelle que dans son union au corps. » (I, 90, 4, c.) ce qui signifie qu’il y a une succession d’âmes dans l’embryon (I, 118, 2, ad 2).

Cette solution est plus conforme à la définition de l’âme comme acte premier d’un corps organisé ayant la vie en puissance et au rôle des causes dispositives : une forme n’apparaît réellement que lorsque les propriétés spécifiques y sont introduites comme dispositions ultimes.

Cordialement

Sébastien

 

 Re: Le moment de l'animation de l'embryon
Auteur: Arnaud Dumouch (---.88.238.180.codenet.be)
Date:   01/06/2003 13:50

Cher Jean-Luc,
Je suis très amusé de votre réponse qui, je crois est pleine de vérité. Je passe rapidement (trop parfois) de la philosophie (recherche de la vérité par l'observation du réel, avec les seules forces de l'intelligence) à la théologie chrétienne (recherche de la vérité à travers la Révélation). Mais, vous avez vu, je vous préviens à chaque fois en mettant, EN GRAS: PHILOSOPHIE, THEOLOGIE. Vous n'êtes donc pas totalement piégé. C'est que, pour moi, le réel venant de Dieu, il possède une seule cohérence, quelque soit la méthode utilisée, quoiqu'il faille distinguer les méthodes.
Cher Jean-Christophe, Je pense que lorsque Sébastien reviendra, il vous expliquera avec soin sa conception de l'animation tardive des embryons qui est, selon la lettre, plus thomiste que la mienne. Mais elle ne l'est pas nécessairement selon l'esprit.
Pour répondre, à vos remarques, je dirai que, comme vous, il m'est difficile de concevoir une animation "gigogne" : d'abord végétative, puis une âme sensitive etc.
Cependant, je reste ouvert à cette hypothèse de l'animation tardive à cause de quelques objections pertinentes que m'a apporté mon frère, qui est chercheur en biologie. Que penser par exemple du problème de certains siamois? Quand un enfant naît avec un corps et deux têtes, cela ne pose pas de réel problème. Visiblement, deux esprits sont présents parce que chaque tête à sa propre pensée, sa propre liberté. Mon frère me décrivait ainsi le cas de deux petites filles. L'une commandait la jambe droite. L'autre la jambe gauche. Quand elles étaient fâchées, elles n'arrivaient plus à marcher. S'il y a deux esprits, il y a bien deux âmes et seul les corps se sont mêlés, accidentellement.
Mais il existe selon lui des cas de siamois plus profonds et complexes. Par exemple, il arrive que les cellules de deux embryons fécondés se mêlent à tel point qu'il naît un seul bébé, complet et en apparence normal. Ce n'est que par la suite, devant certains troubles, qu'on s'aperçoit que ce bébé possède deux ADN. Parfois, il est une fille dans une partie de son cerveau, garçon dans une autre.
Devant de tels faits, je crois que la philosophie reste muette. Si l'animation a eu lieu à la conception, avant le mélange des deux embryons, cet enfant possède-t-il deux âmes? Le cerveau en ébullition, je me réfugie alors, cher Jean-Luc, en THEOLOGIE, espérant que Dieu me montrera qui était cet enfant dans l'autre monde!!!!!!


Jean-Chistophe, Vous soulevez un problème du même type: celui de la mort cérébrale. Un frère de saint Jean qui m'a raconté que son grand-père avait reçu en 1917 une balle dans la tête. Il avait fini par mourir, vers 1989. Juste avant de mourir, il semblerait qu'il se soit réveillé, affirmant avoir vécu sa mort cérébrale "dans un perpétuel voyage hors de son corps." Jean-Luc lui-même peut témoigner de ce phénomène dans une expérience de son épouse. Bref, il y a visiblement dans ce domaine de l'âme et du corps des mystères profonds à découvrir.
Il me semble que nous devons avoir l'aristotélisme humble. L'essentiel est que visiblement, l'homme possède une unité substantielle. Son corps n'est pas un véhicule extérieur (Platon). Il est partie de son être. Mais comment est structuré, profondément, ce corps et son union à l'âme?????
Pour revenir à la mort cérébrale, pour ma part, je dirais avec prudence que la présence de l'âme se manifeste dans un corps cliniquement mort, par le maintient d'une certaine unité organique NATURELLE. Lors de prolongations purement artificielles, avec respirateurs, coeur extérieur, perfusions de glucose, il n'est pas selon moi impossible que l'âme soit déjà partie. Mais l'inverse est possible aussi... Votre hypothèse d'une survie du corps à travers un simple principe végétatif me parait tout-à-fait soutenable. Bref, nous n'en savons rien et j'aimerais connaître celui qui conclura de manière définitive. Tout cela est du domaine, non de la SCIENCE, mais des SIGNES de probabilité? Voilà pour faire un peu de critique.

Vous dites enfin: 2) Si la philosophie est la servante de la théologie, je ne sais pas, en sens inverse, si on peut réfléchir un article de la foi sur un point philos.
Je pense que c'est possible, mais uniquement parce que je suis croyant. Je n'aurais jamais utilisé cet argument dans un Forum aristotélicien. Mais dans un forum thomiste, pas de problème.
Saint Thomas le faisait sans cesse. Il a corrigé la philo d'Aristote, à cause de sa foi, sur plusieurs points:
Exemple: l'éternité du monde (Aristote), remplacée par saint Thomas, à cause du livre de la Genèse, par sa création à un temps t. (Pourtant, saint Thomas n'est pas toujours cohérent jusqu'au bout car il garde la théorie aristotélicienne de l'incorruptibilité des corps célestes).
Autre exemple: Pour Aristote, l'âme humaine vient "d'ailleurs". Il ne pense pas pouvoir dire davantage. saint Thomas ose, éclairé, sans aucun doute, par sa foi: "elle est créée ex nihilo" par Dieu.
Bref, chez lui, l’aller-retour entre raison et foi est perpétuel et fécond. Saint Thomas est un homme libre et un penseur fécond car il croit en deux sources de la connaissance : la REALITE, telle qu’on peut la connaître ; Dieu qui ne peut mentir à propos du salut. Finalement, saint françois de Salles écrivait : « Foi et raison, comme deux affectionnées, doivent marcher ensemble vers leur unique objet : la vérité tout entière. »

Qu'en pensez-vous?
Arnaud

 

 Re: Le moment de l'animation de l'embryon
Auteur: Sébastien (---.w193-253.abo.wanadoo.fr)
Date:   01/06/2003 14:27




Réponse à Arnaud,

Vous prétendez que l’on peut faire, en bon thomiste, de la philosophie à partir de la théologie. Cette affirmation mériterait à elle seule un débat tout entier, car vous posez ici le problème de la philosophie chrétienne…

Pour le moment, je reviens aux objections que vous présentez à la thèse de l’animation tardive et qui sont d’ordre théologique. Je ferais quelques remarques.

1) Ces arguments sont des arguments de convenance. Nulle part il est définit que l’âme humaine soit immédiatement infusée au corps.


2) Il est vrai que dans le cas du Christ et de la sainte Vierge, il y a une animation au moment de la conception. Saint Thomas l’enseigne formellement et, étant cohérent avec lui-même, il se pose l’objection suivante : « Partout où il y a un avant et un après, il y a forcément plusieurs instants. Mais, selon le Philosophe, la génération de l'homme requiert un avant et un après : il y a d'abord le vivant, ensuite l'animal et ensuite l'homme. Donc l'animation du Christ ne pouvait se réaliser au premier instant de sa conception. » (III, 33, 2, arg. 3)
Voici la réponse de saint Thomas :
« Ce que dit là le Philosophe s'applique à la génération des autres hommes, parce que c'est de façon progressive que leur corps se forme et se dispose à recevoir l'âme. Étant d'abord imparfaitement disposé, il reçoit une âme imparfaite. Ensuite, quand il est parfaitement disposé, il reçoit une âme parfaite. Mais le corps du Christ, à cause de la puissance infinie de l'agent, fut instantanément disposé de façon parfaite. Aussi reçut-il dès le premier instant une forme parfaite, c'est-à-dire une âme rationnelles. » (III, 33, 2, ad 3)


3) Pour l’avortement, même si l’animation est tardive, il demeure illicite, étant donné qu’on prend le risque de tuer un être humain ou qu’on tue ce qui est appelé à devenir un être humain. Cf. Tertullien « Il est déjà un homme celui qui le sera. » Mis en forme, on obtient le raisonnement suivant : Pour rendre licite l’avortement, il ne suffit pas de prouver que le fœtus puisse ne pas être un personne, il faut pouvoir prouver avec certitude que cela n’en est pas une. En effet, dans le cas contraire, on prend le risque d’être homicide. Or il est impossible d’avoir la certitude métaphysique que le fœtus n’est pas une personne humaine. Donc il n’est jamais licite d’avorter. De fait, je rappelle que l’Eglise distinguait au Moyen-Age deux fautes de gravité inégale : « l’avortement homicide » et « l’avortement contraception » en cas d’élimination de l’embryon avant son « animation » (avant qu’il soit humain). Ainsi dans les pénitenciels du haut Moyen Age, la pénitence prévue pour une avortement provoqué après le 40° jour peut atteindre 10 ans et tandis qu’en cas « d’avortement contraception », elle n’excède jamais un an. De même, dans le décret de Gratien (1140), on lit : « n’est pas homicide celui qui procure l’avortement avant que l’âme ne soit infusée dans le corps ». [Cf. Thomas Deswarte (Université Paris IV Sorbonne), « L’Eglise et l’embryon », in Catholica, n° 49 (automne 1995), pp. 114-119.]



Cordialement

Sébastien

 

 Re: Le moment de l'animation de l'embryon
Auteur: Polaire jluc (---.ipt.aol.com)
Date:   01/06/2003 16:15

"rép à Sébastien

""""Vous prétendez que l’on peut faire, en bon thomiste, de la philosophie à partir de la théologie."""""""""""""""vous nêtes pas en reste par rapport à Arnaud .

Je suis heureux à chaque fois qu il est rappelé que St Thomas (qui m'est de plus en plus sympathique )"""se pose l’objection suivante..!!.!""""""

Sa christologie est médiévale .Bref .
Maintenant ,moi ,je ne peux être médiéval . non franchement et décidément il y a quelque chose de "moderne" en moi , moi qui ne me croyais pas si moderne comparé à d' autres, mais comparé à vous ..

Bien . ce n'est pas très intéressant ce que je dis là .. mais ce "formel" chez Thomas """Saint Thomas l’enseigne formellement """ m' étonne à chaque fois .
Comment aurait -il ,lui, pu penser quoi que ce soit de neuf s'il s'était réglé sur les déclarations fomelles d' Aristote (par exemple )..

Il ya tout un corpus de questions réactualisables ,me semblet-il ..
Ce que font les kantiens, je vous parle plus haut de Cassirer , ce qui leur permet de survivre, et très bien ..

Polaire jean luc

 

 Re: Le moment de l'animation de l'embryon
Auteur: Arnaud Dumouch (---.88.238.180.codenet.be)
Date:   01/06/2003 16:22

Cher Sébastien : Vous dites : « on ne fait pas de philosophie à partir de conclusions théologiques ».
Tout à fait d’accord. J’ai cherché si j’avais dit une telle énormité quelque part. Heureusement, je ne l’ai pas dite. Relisez-moi.
Pourtant, vous écrivez encore : « Vous prétendez que l'on peut faire, en bon thomiste, de la philosophie à partir de la théologie. » Si j’ai dit cela, je rougis de honte. Mais j’ai cherché. Je me suis relu. Je n’ai pas dit cela. Mon orgueil m’oblige à être de nouveau précis :
J’ai dit et ce n’est pas la même chose.: « On peut rechercher la VERITE à partir de sa raison, ou à partir de sa foi. » (voir la citation de saint François de Sales.
La philosophie est implique une méthode. La raison seule y intervient. La foi n’est pour elle qu’opinion.
La théologie implique une autre méthode. Elle s’appuie sur la confiance en Dieu qui parle. Elle est une science fondée sur la confiance. Ca n’a rien à voir.
Mais la VERITE, elle, n’est autre que la conformité au réel. Apparemment, le réel est fait de plein de choses, qui, pour le moment, sont parfois accessibles par la raison pure, d’autre fois par Révélation, parfois par les deux.
Alors, un croyant qui est aussi philosophe, ou scientifique, jongle facilement, au bout d’un certain temps, avec les méthodes d’approche du réel, sans pourtant les confondre. Je ne l’avoue jamais quand je discute avec un pur scientifique athée ou non chrétien. Mais ici, nous procédons comme saint Thomas faisait. Nous sommes des thomistes et nous parlons, souvent, entre croyants, à la recherche du REEL.

 

 Re: Le moment de l'animation de l'embryon
Auteur: Arnaud Dumouch (---.88.238.180.codenet.be)
Date:   01/06/2003 16:23

Cher Sébastien : Vous dites : « Vos arguments sur l'animation tardive sont des arguments de convenance. » Tout à fait d’accord. C’est ce que j’appelle des SIGNES (par opposition à des PREUVES). Ces signes sont parfois scientifiques (l’ADN par exemple), le plus souvent théologiques.
Mais vos propres arguments sont du même ordre. Vous dites (corrigez-moi si je résume mal): « L’organe réceptacle de l’esprit n’est pas là dans l’œuf fécondé, donc l’esprit non plus. » Ce raisonnement vous paraît-il davantage qu’une convenance ? Pour un arbre, je le prendrais comme une preuve : « l’arbre n’a pas de cerveau. Il n’a donc pas de psychisme. » Mais pour un homme dont nous voyons par expérience, qu’il soit petit ou grand, l’unité substantielle, corps et âme ?
Que pensez-vous de ces enfants hydrocéphales qui naissent et vivent parfois des années sans la partie proprement humaine du cerveau ? Ils sont comme des « légumes », dans une unité corporelle qui traduit la présence d’une âme ? Leur âme est-elle non spirituelle puisque l’organe n’est pas là ? C’est ce qu’on devrait tirer de votre raisonnement et on devrait éliminer physiquement ces corps non humains.
Je ne conteste pas une certaine valeur à vos arguments. Je les remets face à la complexité du réel. C’est ce qui rend pauvre notre recherche et ce débat.
En définitive, je pense que deux opinions se confrontent que ni la méthode philosophique, ni la foi ne pourront définitivement régler. Jean-Christophe devra choisir et, jusqu’à l’entrée dans la Vision béatifique (je parle ici en croyant, non en philosophe), rester ouvert à la vérité.

 

 Re: Le moment de l'animation de l'embryon
Auteur: Sébastien (---.w193-253.abo.wanadoo.fr)
Date:   01/06/2003 16:33

Cher Jean-Luc,

Vous avez tout à fait raison pour une fois : je ne suis "moderne" ni dans mon style, ni l'objet que je traite, ni dans les méthodes que j'emploie pour résoudre les questions qui se posent à moi.
J'en n'éprouve aucun complexe. Pire, je dois vous avouer que j'en tire une certaine fierté.

Je constate que vous avez tout de même la bonté de lire ma prose. J'ai la faiblesse de croire que vous y peut-être quelque intérêt....

Cordialement

Sébastien

 

 Re: Le moment de l'animation de l'embryon
Auteur: Sébastien (---.w193-253.abo.wanadoo.fr)
Date:   01/06/2003 16:40

Cher Arnaud,

« En définitive, je pense que deux opinions se confrontent que ni la méthode philosophique, ni la foi ne pourront définitivement régler. Jean-Christophe devra choisir et, jusqu’à l’entrée dans la Vision béatifique (je parle ici en croyant, non en philosophe), rester ouvert à la vérité. »

Tout à fait d’accord. Votre position se tient. C’est même celle privilégiée par le Magistère actuellement. Je voulais simplement montrer ici qu’il est ENCORE permis de penser autrement et que les arguments en faveur de ma thèse sont, comme les vôtres, valables.
Au lecteur de se faire sa propre opinion...

Cordialement

Sébastien

 

 Re: Le moment de l'animation de l'embryon
Auteur: jean-christophe T. (---.pops.easynet.fr)
Date:   01/06/2003 18:27

Cher Sébastien,

1) Vous citez Th d'Aquin " Ce n'est pas la forme qui est ordonnée à la matière, c'est bien plutôt la matière qui est ordonnée à la forme".

Cela dit ce n'est pas n'importe quelle âme qui anime ce corps. C'est celle prédisposée à CE corps. Il semble donc que la forme soit ordonnée à la matière corporelle dans le cas de l'homme? Paul ne réagit pas comme Jean même s'il sont de même nature.



2) dans le cas de l'animation différée, animation adaptée en fonction de l'évolution du type de matière organisée, il y a changement de forme, donc de substance. Une même substance peut elle changer de forme? Car il s'agit du même être qui évolue.


3) Je sors du cadre de l'animation différée pour une toute petite question.... L'animateur du forum insiste (dans un cours qu'il a traîté sur la personne humaine) sur le fait qu'il ne saurait y avoir de métaphysique de la personne mais seulement une physique (au sens aristeto.) de la personne (ou bien encore un philo de la nature). Il me semble avoir compris que c'était parceque la personne n'est pas une cartactéristique de l'être en général.
Qu'en est il de la mort humaine? peut-on l'appréhender sur la plan métaphysique ou seulement sur le plan de la nature. Autrement dit, la mort de l'homme est elle un évènement métaphysique?

Cordialement.

 

 Re: Le moment de l'animation de l'embryon
Auteur: Sébastien (---.w193-253.abo.wanadoo.fr)
Date:   01/06/2003 18:58

Cher Jean Christophe,

A)« Cela dit ce n'est pas n'importe quelle âme qui anime ce corps. C'est celle prédisposée à CE corps. Il semble donc que la forme soit ordonnée à la matière corporelle dans le cas de l'homme? Paul ne réagit pas comme Jean même s'il sont de même nature. »

Si Paul ne réagit pas comme Pierre, non parce qu’ils ont une âme différente. De même qu’il y a une unique forme pour l’eau dans le monde entier, il y a une unique forme humaine, qui est la MEME pour tous. Si Pierre et Paul réagissent différemment, la raison en est purement accidentelle. Elle n’est donc pas à chercher du côté de la forme qui est spécificatrice et peut appartenir à un nombre infini d'individus. Je vous rappelle qu'en thomisme, l'individualité ne vient pas de la forme, mais de la matière signée par la quantité. (De ente et essentia chap II)

B) « dans le cas de l'animation différée, animation adaptée en fonction de l'évolution du type de matière organisée, il y a changement de forme, donc de substance. Une même substance peut elle changer de forme? Car il s'agit
du même être qui évolue. »

Dans toute cette affaire, les parents jouent le rôle de cause dispositive, c’est-à-dire, qu’ils concourent à l’apparition d’une substance nouvelle, en formant une matière ordonnée à la réception d’une forme nouvelle par altération des propriétés de l’ancien corps et la réception des propriétés du nouveau. Si les parents n’engendrent pas en effet une âme spirituelle, ils engendrent néanmoins un homme, car, comme le dit saint Thomas, « c’est l’homme tout entier qui est produit par les parents, parce que les dispositions ultimes introduites dans la matière par leur action génératrice sont liées nécessairement à la venue d’une forme qui est spécifiquement humaine. » (De potentia, q. 3, a. 9, ad 2)

C) « Qu'en est il de la mort humaine? peut-on l'appréhender sur la plan métaphysique ou seulement sur le plan de la nature. Autrement dit, la mort de l'homme est elle un évènement métaphysique? »

Deux questions pour répondre à la vôtre :
1. Quel sens donnez vous au mot métaphysique ?
2. Selon vous, pensez vous que l’immortalité de l’âme est-elle une vérité démontrable par la seule raison ?

Cordialement
Sébastien

 

 Re: Le moment de l'animation de l'embryon
Auteur: Polaire (---.proxy.aol.com)
Date:   01/06/2003 19:48

rep à Sébastien

""Vous avez tout à fait raison pour une fois""je l'entends comme " pour une fois je vous donne raison ,entierement sur un sujet celui de la modernité "

Il m'est évident que sur le reste, ce que je dis ne peut emporter vchez vous qu'une partielle ,très partielle adhésion ,et en général sur l' ensemble aucune . Ce qui ne m 'émeut pas véritablement .Le contraire serait troublant .

Qu' en est -il de la réciproque .. je vous suis parfois , disons que je suis d' accord jusqu à un certain point ..pas plus . J'y trouve de l' intérêt , certes ,je perçois aussi des difficultés .
Certains postulats ne sont jamais remis en question et des problèmes naissent ,insolubles parce que les postulats ne permettent pas de les résoudre .
Or ces problèmes se posent . La bonne logique voudrait qu'on repense les axiomes .
La manière résoudre les problèmes consiste parfois à échapper à l' argumentation proprement philosophique soit en se reférant à la lettre du texte thomiste ,soit au dogme catholique .
Polaire j luc

 

 Re: Le moment de l'animation de l'embryon
Auteur: Sébastien (---.w193-253.abo.wanadoo.fr)
Date:   01/06/2003 20:15


rép. à Jean-Luc

« La manière résoudre les problèmes consiste parfois à échapper à l'argumentation proprement philosophique soit en se référant à la lettre du texte thomiste, soit au dogme catholique »

Cela me semble normal quand je discute avec des catho- thomistes, surtout sur des problèmes posés au sein du dogme catholique.

Par contre, il me semble que lorsque je discute avec vous personnellement, j’échappe à cette critique. Dites moi, si je me trompe…

Pour le reste, je crois que chacun a ses postulats. Votre position perspectiviste en est un aussi :-))))

Cordialement
Sébastien

 

 Re: Le moment de l'animation de l'embryon
Auteur: jean-christophe T. (---.pops.easynet.fr)
Date:   01/06/2003 22:01

Réponses à Sébastien.

""Deux questions pour répondre à la vôtre :
1. Quel sens donnez vous au mot métaphysique ?
2. Selon vous, pensez vous que l’immortalité de l’âme est-elle une vérité démontrable par la seule raison ?""


1. science de l'être en tant qu'être. En fait, la lecture de l'expression "l'évènement métaphysique de la mort" dans des ouvrages non philosophiques est la raison de ma question. La métaph. est -elle synonyme de ontologie et ontisme... je ne sais pas.
D'ailleurs quels sont les écueils du métaphysicien, ou plutôt qu'est-ce que la métaph. n'est pas?...mais je suis peut-être trop gourmand, une question à la fois!



2.Non. La présence de puissance spirituelle non matérielle semble être une ouverture.

En fait , Cher Sébastien, je profite de toutes ces questions et réponses pour mieux appréhender les principes et les causes. Une choses est d'admettre une définition (...du style ingurgitation des 24 thèses thomistes....) autre chose et de découvrir un principe, ce qui n'est pas chose aisée...

Cordialement.

 

 LA PERSONNE EN METAPHYSIQUE
Auteur: Arnaud Dumouch (---.88.238.151.codenet.be)
Date:   02/06/2003 09:05

Ceci est une réponse à Jean-Christophe, en dehors du débat d'ici:
Vous demandez: "L'animateur du forum insiste sur le fait qu'il ne saurait y avoir de métaphysique de la personne mais seulement une physique (au sens aristeto). Il me semble avoir compris que c'était parce que la personne n'est pas une cartactéristique de l'être en général."

Je n'ai pas eu une formation strictement aristotélicienne mais plutôt thomiste à travers le père MD Philippe. aussi, je me garde de parler d'Aristote lui-même.
Mon professeur a été essentiellement le père MD Philippe OP. Il a une position différente de celle que montre Guy pour Aristote. Il pense que la personne peut être abordée en métaphysique (c'est-à-dire du point de vue de l'être). Il s'inscrit dans une vieille tradition scholastique puisque le premier à l'avoir fait est un certain Boëce (La consolation de la philosophie) qui définissait ainsi la personne humaine: "une substance individuelle de nature raisonnable".
La raison semble être la suivante: Aristote aurait développé essentiellement une approche métaphysique de type "philosophia perennis" (à travers les principes universels, valables au delà des individus concrets).
Mais le père MD Philippe insistait pour que nous ne contentions pas de ce niveau abstrait d'intelligibilité. Il nous forçait à partir de l'expérience et à toujours revenir aux êtres concrets. "A quoi sert la philosophie, sinon à connaître le réel. La personne n'est-elle pas une réalité?"
Selon lui, la personne est un "POS" (en grec), c'est-à-dire une manière d'être concrètement. Ainsi, toute réalité pouvait, selon lui, être étudiée du point de vue de l'être.
C'est pourquoi il traitait de la mort en métaphysique. Vous demandez: "La mort de l'homme est elle un évènement métaphysique?"
Selon lui, la mort touche la PERSONNE en tant qu'elle est (donc du point de vue métaphysique) puisqu'elle vient briser son unité substantielle. Mais il donnait au mot substance un sens particulier qui n'est pas tout à fait le même qu'Aristote. Pour Aristote, la substance est la personne elle-même; Pour lui, elle est le principe profond qui unifie en un seul être les éléments divers (corps-, esprit etc.) qui font une personne humaine.
Si vous êtes interressé par ses cours oraux, je crois qu'ils les mettent à disposition sous forme de Cdrom MP3.
Communauté saint Jean, Maison saint Joseph, 42590 Saint Jodard
Arnaud

 

 Re: LA PERSONNE EN METAPHYSIQUE
Auteur: L'animateur du forum (---.w81-49.abo.wanadoo.fr)
Date:   02/06/2003 18:13

 
Cher Arnaud,

     Toute science étudie l'être qui lui est propre, du point de vue qui lui est propre. Ainsi la physique étudie l'être mobile du point de vue de la mobilité, le "de Anima" étudie chaque espèce d'être vivant du point de vue de sa vie. La vie propre à l'homme est la vie de l'esprit, intelligence et volonté. Donc le "de Anima" étudie l'être de la personne humaine du point de vue de sa vie spirituelle. Je ne nie pas qu'on puisse le faire d'un point de vue "métaphysique", je pense simplement que l'analyse "métaphysique" de la personne n'apporte rien de plus que son analyse du point de vue du "de Anima".

     «Mais le père MD Philippe insistait pour que nous ne contentions pas de ce niveau abstrait d'intelligibilité. Il nous forçait à partir de l'expérience et à toujours revenir aux êtres concrets». Il avait fort raison, mais en partant de l'expérience et en revenant au concret, nous prouvons ainsi que nous avons quitté le niveau métaphysique, qui est justement séparé de la matière concrète expérimentale. «Ainsi, toute réalité pouvait, selon lui, être étudiée du point de vue de l'être». Certes, mais cela ne dit pas que nous soyons en métaphysique. Soit nous étudions la personne humaine du point de vue de l'être "en tant qu'être" et nous entrons en métaphysique, mais nous quittons du même coup la spécificité qui constitue la "personne humaine", soit nous l'étudions du point de vue de l'être "de la personne humaine", et nous restons dans le concret, mais nous n'entrons pas en métaphysique.

     «Je n'ai pas eu une formation strictement aristotélicienne mais plutôt thomiste à travers le père MD Philippe». Il y aurait beaucoup à dire sur cette affirmation. La formation dispensée par le père MD Philippe est-elle "strictement thomiste", ou comme vous le dites "plutôt thomiste" ? Il me semble que l'intéressé opterait pour la seconde réponse. Le père Philippe ne se veut finalement ni thomiste, ni aristotélicien, mais développe une pensée personnelle, certes à l'aide de ces auteurs, mais en s'en démarquant délibéremment. J'ai suivi les cours du père Philippe en "théologie naturelle" pendant deux ans. C'est notamment en pensant à lui (mais pas uniquement, car nombreux sont ceux qui pensent comme lui sur ce sujet) que j'ai écrit mon dernier éditorial. Le "tout métaphysique" conduit à de graves confusions. Le plus souvent nous croyons voler en métaphysique et nous n'avons pas décollé de la dialectique.

Cordialement.

 

 Re: LA PERSONNE EN METAPHYSIQUE
Auteur: Sébastien (---.w217-128.abo.wanadoo.fr)
Date:   03/06/2003 11:44

Cher Jean-Christophe,

1. Je partage l’opinion de l’animateur : on ne doit pas mettre le mot métaphysique à toutes les sauces. En toute rigueur de termes, la métaphysique est la science de l’être en tant qu’être. Cette définition est la plus précise de toutes, car elle se fait sur le sujet propre de la métaphysique, càd sur la chose même sur laquelle elle porte. Or la mort est la corruption ou la dissolution de l’être vivant. Elle a donc sa place en physique.


2. Ma question sur l’immortalité de l’âme n’était pas innocente, car si l’on tient que l’immortalité de l’âme est démontrable rationnellement, se pose inévitablement la question de sa survie. Il faut d’ailleurs distinguer deux problèmes dans celui-ci :

· l’un de droit : l’âme humaine est-elle exemple de la corruption ?
· l’autre de fait : l’âme humaine sera-t-elle anéantie par son créateur ?

La question de droit est assez facile à résoudre si l’on tient que l’âme humaine est immatérielle. La question de fait est, elle, plus complexe. Pour prouver l’immortalité de l’âme, saint Thomas a recours à un argument fondé sur le désir naturel : « tout être désire naturellement exister, sous le mode qui lui convient. Chez les êtres dotés de connaissance, le désir est proportionné au mode de connaître. Le sens ne connaît l'être que dans une étendue et une durée concrètes, mais l'intelligence le connaît absolument, et par référence à n'importe quel temps. Aussi, tout être doté d'intelligence désire-t-il naturellement exister toujours. Mais un désir naturel ne peut être vain. Toute substance intelligente est donc incorruptible. » (I, 75, 6, c.)

Pour autant, la compréhension de cet argument ne peut se faire que dans un vaste ensemble : il faut admettre, pour qu’un désir naturel ne soit pas vain, que Dieu existe et qu’il est sage et juste. On peut penser alors, qu’il serait conforme à la sagesse de Dieu de ne pas anéantir l’âme humaine et à la justice de lui donner une récompense si elle a pratiqué le bien et un châtiment si elle a pratiqué le mal. Mais ici, tout devient incertain, car nous sommes dans le domaine du possible. Seule la Révélation peut nous apporter une confirmation.

En ce sens, la mort devient un problème métaphysique car elle met en jeu plusieurs questions qui sont au-delà du matériel.

Cordialement

Sébastien

 

 Re: LA PERSONNE EN METAPHYSIQUE
Auteur: Guillaume (---.w81-249.abo.wanadoo.fr)
Date:   03/06/2003 11:53

Bonjour à tous,

Je voudrais simplement poser une question qui vous paraîtra sans doute un peu naïve :

Si la métaphysique est la science de l'être en tant qu'être, qu'est-ce que l'ontologie ?

Merci,

Guillaume.

 

 Re: LA PERSONNE EN METAPHYSIQUE
Auteur: Sébastien (---.w217-128.abo.wanadoo.fr)
Date:   03/06/2003 12:16

Cher Guillaume,

C'est tout le problème de la division de la philosophie. Le père Ramirez, qui fut un des derniers néo scolastiques de haute pointure; y a consacré un ouvrage entier (De ipsa philosophia)...
Sinon,
Dans les sciences spéculatives, le critère fondamental de division est constitué par les deux types d'abstraction et par la separatio, qui nous permet d'entrer en métaphysique. D'où deux catégories : la physica et la métaphysica.

1.L'ens mobile définit le champ de la physica. A l'intérieur de la physica, il y a place pour des spécifications ultérieures, dont celle de l'ens mobile animatum, qui correspond au De anima. Il faut faire ici attention que, pour les médiévaux, notre distinction entre philosophie et sciences de la nature n'avait pas lieu. Ils concevaient une science commune à tout les êtres qui sont in materia et motu, qu'Aristote avait appelée "philosophie seconde" ou "physique", et des sciences particulières, qui devaient permettre d'étudier, par approfondissement successif, les différentes provinces de l'être mobile, de manière à parvenir à une botanique, un zoologie, des traités de la sensation ou de la mémoire, etc.

2. L'"ontologie" et la "théologie philosophique" sont une seule discipline: la philosophie première ou métaphysique. Ce point est capital, et apparaît très clairement en In Boethii de Trinitate, q. 5, art. 4: lisez et relisez cet article. Il y a un seul subiectum, l'ens ut ens, obtenu au terme d'un jugement de séparabilité de la matière. qui présuppose la découverte antérieure de réalités immatérielles; de ce sujet, la métaphysique recherche, comme toute science, les principes: or, le principe suprême de l'ens ut ens, c'est l'ipsum esse subsistens, Dieu. La seule science qui ait Dieu directement pour sujet, c'est la théologie révélée.

Cordialement

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